J'ai trouvé le film envoûtant et le principe fascinant (cette société
traumatisée par une guerre cataclysmique qui s'est mis d'accord pour bannir les passions et même les émotions
). Mais j'ai été gêné par deux aspects du film. D'abord, la fin. Le héros est
infichu d'attendre tranquillement sa compagne chez lui et préfère courir comme une poule sans tête pour la retrouver, quitte à faire étalage de ses émotions devant de parfaits inconnus qui pourraient tout aussi bien le dénoncer et condamner ses plans d'exil, et surtout, quitte à ce qu'elle, Nia, rentre à son appartement et ne le trouve pas
; j'ai trouvé ça complètement con. Le héros ne se montre pourtant pas foncièrement stupide précédemment, donc cette action totalement irréfléchie de sa part m'est apparue invraisemblable, et d'autant plus frustrante qu'elle entraîne
sa "zombification" (fou de chagrin en la croyant morte, il prend l'injection censée neutraliser à vie tout affect). Moi je déteste quand l'objectif des héros se trouve ruiné, mis hors d'atteinte, par un rebondissement improbable, mal amené, arbitraire de la part du scénariste. Et il se trouve que ce dernier cherche visiblement le beurre et l'argent du beurre, car non content de flinguer la perspective de bonheur amoureux pour de mauvaises raisons, il force un happy end qu'on pourrait résumer en un joyeux "FUCK SCIENCE", ou encore "l'amour plus fort que l'industrie pharmaceutique du futur" : malgré son traitement de cheval anti-émotions, à effet permanent sans espoir de rémission, le héros n'a besoin que de quelques heures pour avoir de nouveau envie de toucher la main de son amie. On se demande pourquoi on a eu si peur ?
Tout ça pour ça. Bon et puis le second aspect qui m'a gêné, c'est la mise en scène des scènes où les personnages découvrent leurs sensations. En fait je ne me suis pas senti en empathie car il n'est jamais montré suffisamment précisément ce que les persos ressentent exactement ; il y a comme un manque de précision, c'est flou. La caméra monte, descend, part sur le côté ; la bande-son est déconnectée des sens, elle joue sa (jolie) musique mais sans tâcher de nous faire ressentir la physique de ce qui se passe à l'écran. Manque de précision. Cela vaut aussi pour l'interprétation des acteurs, comment ils font vivre leur personnage : le héros est musclé parce que l'acteur l'est, alors qu'on ne voit jamais son personnage faire de sport et qu'il passe son temps à dessiner et rêvasser. Là encore le réalisateur a manqué de précision (sans doute trop content d'avoir Hoult et Stewart, il n'a pas osé leur demander grand chose). Bon et malgré tout ça, j'ai quand même bien aimé, j'ai bien cru à l'univers, les quelques scènes d'exposition où l'on nous explique l'histoire de ce monde sont intéressantes, voir les deux se tourner autour et chercher à se voir alors que c'est interdit génère une tension efficace. Et puis la musique est chouette et j'aime bien Kristen Stewart (dommage qu'elle aussi arbore le look de Kristen Stewart de cette époque plutôt que d'avoir développé un look pour ce rôle, là aussi ça me rappelle l'acteur qui passe dans un film entre deux portes, sans trop s'impliquer ; ça me rappelle Kurt Russell dans BONE TOMAHAWK avec exactement la même barbe que chez Tarantino...). La vie dans cette société fait vraiment peur, ça ne m'a pas laissé indifférent. J'ai apprécié la séance.