Vous connaissez tous le pitch, puisque le film du solide réalisateur qu'est Cédric Kahn est directement inspiré de l'histoire vraie de Xavier Fortin.
Un couple de marginaux baba-cool (c'était encore l'époque), Paco et Nora. Ils vivent dans la nature, genre Larzac, dans une caravane ou dans une bâtisse de pierre abandonnée, vaguement retapée, sans eau ni électricité, élevant quatre chèvres et trois lapins. Le spectacle de cette magnifique nature, le matin, suffit au bonheur de Paco. II ne demande rien de plus à la vie. Ils ont deux petits garçons, qui portent des "prénoms d'Indiens". Lorsque ceux ci ont 7 et 8 ans, Nora (l'excellente Céline Sallette, encore elle!) décide de revenir à une vie plus "normale". Sans doute a -t elle conscience que l'on n'élève pas des enfants comme ça, en leur "faisant l'école" et en les sortant de la société.
Pour le fanatique Paco, il n'est pas question d'arracher les enfants à "leur" vie, celle qui, d'après lui, est idéale. Et qu'ils ont toujours connue. Quand le tribunal donne, évidemment, la garde des enfants à Nora, Paco enlève ses fils et ils vont vivre dix ans dans la clandestinité! [Soit dit en passant, les gendarmes n'ont quand même pas dû se fouler la rate pour les retrouver!!]. Bénéficiant des aides et des complicités de la communauté "écolos-radicaux", changeant de résidence régulièrement -Cévennes, Languedoc, Alpes du sud même semble t-il-, vivant toujours d'élevage et, pour les garçons, de travaux sur les chantiers agricoles (la belle utopie de la scolarité à la maison semble s'être fracassée sur la réalité....).
Le film nous montre deux époques: le début de la vie sauvage; et dix ans après, quand les petits devenus ados commencent à se révolter, à avoir envie de rencontrer des jeunes filles "normales".... révoltés contre leur père, mais tout en lui gardant une dévotion extrême.
Mathieu Kassovitz (acteur bien trop rare!) incarne littéralement Paco. Il est magnifique. Il rendrait presque sympathique ce dangereux illuminé. Le côté passionnant du film, c'est de nous faire rentrer dans ce monde marginal. Gentils écolos; d'autres, beaucoup plus agressifs (les "punks"), ceux qu'on imagine bien en train de castagner du côté de Sivens. La fascination pour cette vie primitive, la vraie vie, l'essence de la vie, et il y a une petite fraction de moi qui adhère à cette idée....
Le côté plus négatif, c'est que j'ai trouvé le film extrêmement froid. Même lorsqu'à la fin, le mélo s'en mêle.... on reste extérieur, je trouve. Mais c'est une œuvre intéressante, enrichissante, assurément à voir.