Plonger : les secrets du tournage

Avec Plonger, Mélanie Laurent adapte un livre pour la deuxième fois après Respire. C'est son producteur Bruno Lévy qui lui a parlé du roman, lequel a convaincu la réalisatrice de rencontrer l'auteur Christophe Ono-Dit-Biot qui lui a donné carte blanche pour l’adaptation. Elle explique : "Les thèmes qu’il aborde – les relations hommes/femmes, l’art, l’écologie – m’étaient proches, je me suis emparée du livre autant qu’il s’est emparé de moi. La dernière scène, notamment, qui donne lieu à tant d’interprétations différentes de la part des lecteurs, me fascinait. Ce sont parfois trois pages, trois lignes, trois mots qu’on aime qui donnent envie de faire un film."

Mélanie Laurent a écrit le scénario de Plonger avec Julien Lambroschini, qui avait déjà collaboré avec elle sur Respire. Ensemble, ils ont dû condenser le livre de 500 pages environ en se centrant sur l'essentiel. Ainsi, le film ne montre pas beaucoup la rencontre des deux héros. La cinéaste précise : "Parce qu’il suffisait de les voir heureux ensemble en Espagne avec cette fracture à venir qu’on devine déjà entre eux. Passé ce prélude, la construction en deux parties s’imposait : on devait d’abord s’attacher à Paz, à sa manière d’être et de ressentir les choses puis seulement après, se concentrer sur César en le suivant dans sa quête. On inversait les ressentis du livre."

Mélanie Laurent et son équipe n'ont pas rencontré de difficultés pour obtenir l’autorisation de tourner au sultanat d’Oman. En revanche, quitter ce décor de rêve pour rejoindre les studios d’Aubervilliers s'est avéré plus délicat... Elle se rappelle : "Nous logions tous dans des bungalows sur la plage, on se projetait des films le soir à la belle étoile. Moralement, la partie parisienne a été plus délicate à tourner."

Mélanie Laurent a longtemps cherché l'actrice qui allait se glisser dans la peau de Paz. La réalisatrice a ainsi rencontré beaucoup de comédiennes espagnoles et a même envisagé à un moment de prendre une actrice anglo-saxonne. "Je m’éloignais de Paz mais je gardais l’idée d’un couple avec une double culture. Au fond, ce qui comptait, c’est que la femme qu’aime César vienne d’ailleurs, qu’elle se sente enfermée à Paris et n’y trouve pas sa place. Et puis alors que j’étais toujours en quête de ma comédienne, j’ai revu, presque par hasard, un essai de María que je n’avais pas visionné : coup de foudre", se souvient Mélanie Laurent.

Côté références pour structurer le film, Mélanie Laurent avait en tête The Constant Gardener de Fernando Meirelles. "Mais, contrairement à mes deux précédents longs métrages, où j’avais beaucoup de titres en tête, je ne me suis appuyée que sur lui. Visuellement, je savais ce que je voulais faire, je n’avais pas besoin de repères", précise-t-elle.

Beaucoup de scènes de Plonger ont été réalisées sous l'eau. Pour ce, Mélanie Laurent, qui avait une peur phobique de l’eau, a dû faire son baptême de plongée dès son arrivée à Oran. La réalisatrice développe : "Nous avons fait appel à l’équipe du champion français d’apnée, Guillaume Néry, qui a réalisé « Runnin’ (Lose it All) », le clip de Beyoncé. J’en ai un souvenir épique. La doublure de Gilles qui devait plonger à sa place s’est révélée très maladroite et c’est finalement Gilles lui-même qui possède son PADI, son brevet de plongée, qui a tourné ses propres scènes. Il a plongé en pleine mer à trente mètres de profondeur et a eu, je ne le trahis pas en le disant, la peur de sa vie."

La lumière du film est très différente selon le fait que l'on soit dans la première ou la deuxième partie du long métrage : claire-obscure dans la première, éclatante dans la seconde. "Dans la première, on devait éprouver le mal-être de Paz et la noirceur dans laquelle elle se débat : la lumière manque, je filme beaucoup les silhouettes dans le noir – nous avons d’ailleurs encore énormément retravaillé ce côté sombre à l’étalonnage. Je tenais à ce que l’on soit au contraire ébloui, comme César l’est lui-même, en arrivant à Oman : qu’on ait presque mal aux yeux quand il sort de l’aéroport", explique Mélanie Laurent.

Mélanie Laurent avait proposé à Gilles Lellouche de jouer dans Les Adoptés (très probablement le personnage finalement tenu par Denis Menochet), son premier long métrage, mais l'acteur n'avait pas pu se libérer à ce moment-là.

Même s'il lui est par le passé déjà arrivé de jouer des rôles dramatiques comme dans Thérèse Desqueyroux par exemple, le personnage que Gilles Lellouche incarne dans Plonger est tout de même assez différent des emplois auxquels le public l'assimile. Le comédien explique : "Il m’est quand même arrivé de jouer des rôles dramatiques. Le problème est qu’ils ont été complètement occultés par l’image que le public a de moi. Aujourd’hui, j’ai clairement envie d’aller vers un répertoire plus complexe - expérimenter des choses qui me donnent le sentiment de faire vraiment mon métier, prendre des risques."

Gilles Lellouche parle du personnage qu'il joue, un homme qui n’existe que par le regard qu’il pose sur cette femme qu’il aime à la folie mais qu’il ne comprend pas : "Quand je pense à César, je vois un homme de 44 ans qui aime plus qu’il n’est aimé et cela me touche. C’est beau à jouer : cette femme dont il est fou amoureux lui échappe, il n’a aucune prise, il n’arrive pas à la retenir, il perd pied. Je trouve ça magnifique. Très poignant."