Ce sont les histoires de Victor, de Nadia, de Samuel, de Fabio et de Luna, tous vont devoir accomplir quelque chose pour trouver qui ils sont et qui ils veulent devenir. Romain Paul, dont c’est le premier rôle au cinéma s’est mis dans la peau de Victor, 13 ans, qui vit une situation complexe entre le besoin d’avoir un père avant absent et la nécessité de garder une mère, en même temps il devra savoir s’il veut aimer une jeune fille, s’il veut partir de son habitat singulier, s’il veut devenir footballeur, s’il veut comprendre la passion de son père… Je ne vous dirais pas la fin, que la réalisatrice Alix Delaporte nous cache jusqu’aux dernières minutes, mais je vous direz juste qu’en le regardant, cette narration éclatée, entre toutes ces situations, m’a fait me demander si à la fin la réalisatrice me donnerez une ficelle, un message pour rassembler dans un contenant toutes les émotions qu’elle avait créé pour moi. Puis à la fin, cette réalisatrice m’a ému une dernière fois en me donnant un indice sur la vie futur de cet adolescent, ce qui était pour elle ce message si bien conservé. Tout en effleurant seulement les pépites de ce film, je dirais encore trois choses qui mérite que vos yeux se posent sur cette œuvre.
D’abord le fait que tout dans ce film est suggéré, atténué comme pour le rendre plus vrai et donc plus fort. C’est un procédé qui devenait assez rare aujourd’hui. Ici il est mis au profit d’acteurs qui savent tout dire sans parler et à des décors qui permettent à tous de tout extérioriser. Quel plaisir aussi de ne pas être prit pour des infirmes. Toujours en subtilité et pour qu’aucun mots ne soit de la redite, Alix Delaporte a préféré faire parler les images, les regards et la musique. On comprend ce qui s’est passé sans l’avoir vu et sans un dialogue d’explication rébarbative. Au contraire, pour ceux qui auraient peur d’un film qui veut dépeindre l’adolescence dans sa forme exaltante, ici vous êtes privés de pathétique, de larmoyant, d’exaltant à la caricature, vous allez seulement voir des images qui parlent d’elles-mêmes.
Ensuite, le fait que l’on soit un spectateur actif, sans cesse en échange avec Victor qui comme presque toujours seul, est en fait avec nous. C’est face à notre regard qu’il évolue, porté par cette 6ème symphonie de Gustav Mahler. Ainsi tandis qu’il marche, on réfléchit. A force de penser avec lui, on peut ressentir un peu de frustration lors de certaine séquence qui pourraient nous apporter nos fameuses réponses mais qui sont toujours coupées avant cela. A chaque fois que l’on pourrait avoir un message clair et non suggéré, il y a coupure avant que ce soit trop évident, comme pour nous laisser dans la peau de Victor qui lui, a une vie en suspens, où il ne sait pas vraiment ce que demain sera pour lui. C’est une façon assez douce et naturelle de raconter une histoire mais c’était aussi risqué car à force de tout murmurer le spectateur pouvait se perdre et sortir de la salle sans jamais avoir trouvé de message, de sens au film. Et pourtant à la fin tous se rejoint dans deux regards et dans la signification d’une symphonie, c’est un très beau message.
Dire quelques mots sur ces acteurs filmés avec amour, ils resplendissent à l’image par leurs justesses et leurs sobriétés. Pour un premier film, Romain Paul est extraordinaire, quand on lui demande ce que représente pour lui le fait de jouer Victor il répond que c’est comme s’il voulait l’aider et que s’il retournait sur cette plage il redeviendrait sûrement cet adolescent qu’il a compris et incarné. Bravo.
Enfin, ce film offre des instants inouïs d’amour, de sincérité et de vie. Par exemple quand Victor se fait raser le crâne par Luna, c’est dingue comme c’est banal en soi, mais l’image, le lyrisme qui est donné à ces adolescents crée un aparté délicieux, comme si certain moments de l’histoire devaient être immortalisés. Un beau coup de cinéma.