J'avais adoré Michael Kohlhass, l'adaptation faite par Arnaud des Pallières du roman de Kleist, faite avec ce nécessaire sens de la grandeur et de l'épique....
Je suis donc allée voir Orpheline de confiance -et je suis bien déçue. L'idée était excellente pourtant: montrer une jeune femme épanouie, comprendre pourquoi sa vie dérive en revenant dix ans en arrière, reculer encore de dix ans pour voir l'ado déboussolée qui a précédé la jeune femme, et enfin l'enfant, retourner aux racines, à l'acte fondateur..... Ce qui fait une vie, ces strates qui la composent et constituent l'adulte que l'on devient.
Quatre époque, quatre actrices. Renée (Adèle Haenel) est institutrice, équilibrée, heureuse avec son compagnon géorgien Darius (Jalil Lespert); elle est en attente des résultats d'une FIV; ils l'espèrent fort, ce bébé..... Tout va bien -jusqu'à ce qu'arrive dans sa vie, sortant de prison, une certaine Tara -et que la police vienne l'arrêter; elle ne s'appelle pas Renée, c'est une fausse identité, elle s'appelle Karine. Toute sa vie est un mensonge. Dans le rôle de Tara, la belle Gemma Arterton nous fait un festival en garce sulfureuse, en vipère vindicative.... magnifique!
Dans l'épisode suivant, on retrouve Karine, qui couche à droite et à gauche, avec le brave Maurice (Sergi Lopez), avec l'inquiétant Lev (Robert Hunger-Bühler) qui oeuvre dans le milieu assez trouble des courses hippiques. Adèle Exarchopoulos déploie l'étendue de son jeu expressif: oeil glauque et bouche ouverte.... Le problème c'est que l'actrice qui interprète Karine ado, (Solène Rigot), sans doute soucieuse de suivre son modèle, est à peu près aussi monocorde.....L'ado est rebelle, fugueuse, elle passe ses nuits en boîte, a draguer, et quand son père (Nicolas Duvauchelle) la retrouve, il la tabasse.... Et nous voilà avec l'enfant. La petite fille (Vega Cuzytek) est remarquable. Et quelle est jolie! Nous sommes dans un casse automobile; deux familles y travaillent; celle de Karine, avec un gentil papa aimant; une autre famille, avec deux petits garçons, à peu près du même âge. Et là: un drame. Cette quatrième séquence est la plus intéressante, avec la première.
Pourquoi ne sommes nous pas convaincus? Parce que, sur le drame, nous n'en savons pas assez pour comprendre pourquoi il a fait éclater la famille de Karine, pourquoi ce gentil papa est devenu une brute....et la petite Karine, une désaxée qui le hait. Parce que les deux actes intermédiaire sont joués par des actrices peu intéressantes, parce qu'ils se résument à une succession assommante de fellations, jeux saphiques et autres gaîtés sexuelles.....
C'est dommage: on a l'impression d'être passé à côté d'une oeuvre. D'autant que la fin, intelligente quoique surprenante, est belle...