Le dernier film de Cédric Klapisch, ‘Ce qui nous lie’ et son univers viticole, avaient marqué un relatif renouveau après des années de vaches maigres, entre comédie sociale ratée (‘Ma part du gâteau’) et tentative encore plus ratée de conclure sa trilogie historique (‘Casse-tête chinois’). ‘Deux moi’ semble confirmer cette reprise, même si on peut nourrir l’impression que Klapisch arrive après la bataille, avec son histoire de deux trentenaires parisiens, voisins d’immeuble sans le savoir, victimes de ce spleen qui frappe les jeunes actifs isolés dans la grande ville : éloignement de la famille, géographiquement ou émotionnellement, activité professionnelle stressante ou, au contraire, vide de sens, solitude sentimentale et prise de conscience du médiocre palliatif que constituent les applis de rencontre, secrets et drames refoulés,...ce faisceau de causes ne pourra commencer à trouver sa résolution qu’à travers la libération progressive de la parole sur un divan de psy. Un tel pitch aurait pu servir de prétexte à une comédie plus ou moins finaude, mais Klapisch a toujours tourné le genre à sa manière, en y injectant de l’humour à petite dose, des moments de retrouvailles chaleureux, une observation souvent attentive des codes de la génération envisagée, des moments de réconfort et énormément d’empathie pour ses personnages déboussolés, et son dernier film mérite plus que jamais son statut de point médian entre production populaire et cinéma d’auteur. ‘Deux moi’ aurait également pu prendre la route de la rom’com puisqu’il tombe sous le sens qu’au cinéma, deux personnages esseulés et pourtant si proches sont voués à se rencontrer. C’est là que le réalisateur recourt à une astuce tout simple mais tout à fait logique dans le propos du film : le spleen urbain moderne a comme conséquence qu’on se croise sans se voir, qu’on est trop centré sur ses propres tracas pour remarquer ceux des autres, et que la multiplicité des occasions et des possibilités dissimule toujours l’évidence. Ce n’est peut-être pas grand chose mais c’est largement suffisant pour que ‘Deux mois’ marque sa (petite) différence avec le tout-venant de la production hexagonale.