La Graine et le mulet, 2007, de Abdellatif Kechiche avec Habib Boufares (Slimane), Hafsia Hersi (Rym) et plein d’autres comédiens fantastiques, débutants ou non professionnels. Oublions tout propos politique, il n’y en a quasiment pas, car ce n’est un film ni sur le racisme, ni sur les harkis, ni sur les méandres de l’administration etc. C’est une observation magistrale, minutieuse, fine, délicate, drôle, riche, d’une famille ordinaire, française d’origine maghrébine, installée à Sète. Avec en plus, une narration romanesque sublime et un suspense final aussi cocasse que bouleversant. Certes, il y a des scènes beaucoup trop longues qui, parfois, en deviennent pénibles (les pleurs de la femme trompée !) comme si l’auteur laissait ses comédiens sortir leurs tripes, aller au bout du bout de leur jeu dans des exercices d’improvisation. On trouve aussi des scènes d’anthologie qui supportent bien l’insistance de la longueur (quand Rym tente de convaincre sa mère) et des scènes pagnolesques (les copains, au bistro, philosophes et prophètes de l’avenir). Le talent du cinéaste réussit toujours à faire passer les émotions du quotidien, avec authenticité, sans pathos ni clichés. Le héros est un taiseux, obstiné, têtu, digne, qui s’exprime, et avec quelle force, par ses silences, ses regards. Ce qui compense avec le reste de la famille (au sens large du terme), les femmes surtout, qui s’agitent, gueulent, rient, débordent d’énergie. A l’âge le plus improbable, Slimane, récent chômeur, va tenter de monter un restaurant sur un vieux rafiot, de ceux qu’il a passé sa vie à réparer. Et c’est ainsi qu’il va, aussi, réparer sa vie, se prouver qu’il existe, et construire quelque chose pour ses enfants, aidé dans cette entreprise, par une jeune fille formidable, la fille de sa compagne, qui fera, pour le sauver, à la fin du film, une danse du ventre d’une sensualité inouïe, annonciatrice…de mort. On a déjà vu au cinéma des familles éclatées qui se soudent autour d’un projet (Little Miss