Fortement recommandable, le show policier de, respectivement, AMC et Netflix, The Killing, offre les qualités manquant à beaucoup de projets similaires. Revisite à la sauve américaine d’une série européenne à succès, plus précisément un show danois, la série bénéficie du même appui que son modèle scandinave. Bien des artisans danois de l’œuvre originale ont fait le déplacement Outre-Atlantique, notamment la showrunner Veena Sud. En de bonnes mains, soit dans l’élan d’un pessimiste latent typiquement nordique, les deux premières saisons sont des succès retentissants. La suite, un peu moins saluée, n’en restera pas moins une œuvre policière majeure, une partie d’échec douloureuse, fatigante pour les nerfs mais toujours très réaliste. La production choisit par ailleurs un lieu fort intéressant pour baser ses intrigues, soit la métropole parfois un peu oubliée de Seattle. Au porte du canada, dans un angle égaré des USA, la ville offre un terrain de jeu souvent pluvieux parfaitement adapté à la rigueur du ou des récits, prenant, comme parfois ailleurs, le rôle d’un véritable personnage, notamment de par les multitudes et sublimes prises aériennes de la ville.
Tout commence avec la découverte du cadavre d’une jeune fille, la fameuse Rosie Larsen. Deux saisons durant, notre tandem de flics, les lieutenants Sarah Linden et Stephen Holder, s’acharneront à faire éclater la vérité, dans un bouillon malsain de politique, de famille et de problèmes internes. Le final satisfaisant de ces deux saisons qui n’en forme qu’une seule, du strict point de vue narratif, aura poussé la production à prolonger les souffrances des deux policiers, au travers d’une troisième saison plus sombre encore, là ou frappe la prostitution des mineurs, la pédophilie, la pornographie et les meurtres en série. Sans échappatoire envisageable, la quatrième et dernière saison du show, repris par Netflix entre temps, offrira, en dépit d’une intrigue annexe, une véritable fin à l’errance de nos amis lieutenants. La principale caractéristique de toutes ses péripéties, parfaitement complémentaires et toujours judicieuses, sera finalement la noirceur, la dramaturgie. Le ressenti humain s’avère alors l’élément clef dans la lecture d’une œuvre profondément sombre, mais qui par la force et la foi de certain, brillera de mille feux pour raviver une note d’espoir.
The Killing c’est aussi deux comédiens parfaitement complémentaires et diablement efficaces. Je pense bien sûr à Mireille Enos, frêle d’apparence mais toujours d’une force de caractère inébranlable, et Joel Kinnaman, grand gaillard d’apparence indestructible mais rongé par tous les maux du monde. Les deux acteurs trouvent toujours le ton juste, entre complicité amicale, confrontation d’orgueil ou professionnelle. La petite dame et le grand bonhomme sont indiscutablement de parfaits personnages de séries, suffisamment complexes pour se révéler sur la durée, suffisamment attachants pour que l’on traîne dès les premiers instants dans leurs sillages sans regarder en arrière. Accessoirement, en forme de plus-value, notons les présences, dans des seconds rôles, de comédiens eux aussi talentueux, d’Elias Koteas à Peter Sarsgaard, notamment.
Voilà donc une série, finalement plutôt concise mais largement suffisante, qui ravira les amateurs de polars, de sensations. Agréablement surpris par les intrigues proposées, ravi par une mise en scène très soignée, ébloui par des comédiens parfaitement à leurs places, je pourrais toutefois déplorer un léger manque d’originalité. En effet, à force de bouffer du policier jusqu’à l’indigestion, peut-être que mêmes les meilleurs exemples en pâtissent. Mais peu-importe, The Killing est une véritable réussite. Avis aux abonnés d’une certaine plateforme VOD. 16.5/20