Le monde des plus grands méchants du cinéma se divise en deux catégories : ceux qui marquent uniquement leur film, et ceux qui marquent l'Histoire du cinéma. Lui, il marque. Apparu sur les écrans en 1966 (en 1968 en France), son allure, sa méchanceté profonde, son cœur de pierre et sa dangerosité ont marqué tous les spectateurs qui ont croisé sa route.
Dans Le Bon, la Brute et le Truand, il s'agit de la Brute, alias Sentenza, un tueur froid que rien n'arrête. Dans sa quête pour retrouver un trésor confédéré face à Tuco le truand et Blondin le "bon" (disons le moins pire), il semble inéluctable, et voilà pourquoi il est resté culte.
Un personnage introduit de main de maître

Sentenza fait son entrée lorsqu'il arrive à cheval chez un certain Stevens. Ce dernier s'attable et commence à manger, bientôt rejoint par le pistolero. Envoyé par "Baker", Sentenza écoute son interlocuteur, qui l'informe qu'il a "tout dit à Baker à propos de cette maudite caisse de dollars". Une information qu'ignorait le tueur.
Sentenza laisse passer et précise qu'il cherche un mystérieux Jackson et que "quand [il] cherche quelqu'un, [il] le trouve toujours". Mais il lui manque une information : le nom d'emprunt actuellement utilisé par Jackson. Stevens lui lâche l'information (Bill Carson) et lui donne 1000 dollars pour qu'il le laisse tranquille. Le tueur, qui "finit toujours le travail pour lequel on [le] paie", assassine Stevens et l'un des membres de sa famille, et part avec l'argent.
Où Sentenza passe, l'espoir trépasse

Par la suite, Sentenza fait tout ce qu'il faut pour justifier son surnom de "brute" en regardant impassible le passage à tabac du pauvre Tuco (Eli Wallach) dans un camp de prisonniers, dont il fait couvrir les cris par la musique d'un orchestre de détenus. Une scène violente et poignante. On le voit aussi interroger la petite amie de Bill Carson à coup de claques ou engager une troupe de bandits "rapides comme l'éclair" pour se débarrasser de Tuco et de Blondin (Clint Eastwood).
L'héritage de "la Brute"

Sentenza est interprété avec brio par Lee Van Cleef, acteur dont le "nez d’aigle et les yeux de Van Gogh" avaient déjà séduits Sergio Leone dans Et pour quelques dollars de plus, ce qui avait permis au comédien, dans la misère, de retrouver une meilleure vie (et une carrière, car ses prestations chez Leone vont lui permettre de beaucoup travailler en Italie par la suite).

Sentenza est resté dans la mémoire collective comme l'un des plus grands méchants du cinéma par son côté impitoyable, la violence dont il est capable et la froideur avec laquelle il accomplit les étapes d'un plan mûrement réfléchi en amont. Preuve que le personnage a marqué les esprits : le rappeur Akhenaton du groupe IAM se référera souvent à Sentenza comme un alter ego fictif à qui il ne faut pas en conter.