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    Christopher Eccleston : "The Leftovers m'a fait questionner mes propres croyances et mon approche de la vie"

    A l'occasion du Festival Séries Mania, nous avons pu rencontrer Christopher Eccleston, l'intense prêtre de "The Leftovers". Il évoque pour nous la saison 3 du show, diffusée tous les lundis en US +24 sur OCS...

    HBO

    Allociné : Nous avons longuement attendu cette troisième et dernière saison de "The Leftovers". Qu'est-ce que l'on peut en espérer ?

    Christopher Eccleston : L’inattendu, je pense… Nous avons développé la réputation de ne pas livrer une télévision standard. Je pense qu’on a souffert de ça dans la saison 1 car nous trouvions que nous n'avions pas les téléspectateurs que nous avions le sentiment de mériter. Cela s’est amélioré durant la saison 2 et, certainement, les critiques y ont été pour beaucoup. 

    On ne peut pas s’attendre à de vraies réponses sur ce qu'était le ravissement. Damon Lindelof [le showrunner] a été clair sur cette question dès le début et, ce, à cause de son expérience sur Lost.

    C’est intéressant de voir que certains téléspectateurs veulent pouvoir mettre les choses dans des cases. Vous n'aurez rien de tout ça.

    The Leftovers, c'est un regard sur notre propre vie

    Je pense que l’humour de la série, qui manquait un peu dans la saison 1, s'est accru cette saison. Si vous rencontrez Damon, vous réalisez que c’est quelqu’un de sérieux, d’intelligent mais aussi quelqu'un qui regarde la vie avec un grand sens de l’humour. Il y a beaucoup d'humour, un mélange entre comédie et tragédie dans la saison 3.

    Je pense que les téléspectateurs qui nous suivent aiment avant tout les personnages. Et je pense qu'ils seront satisfaits de ce qui va leur arriver. L'intelligence du téléspectateur est respectée [dans The Leftovers]. Ce que l'on cherche dans une série comme ça, c'est un regard sur notre propre vie. Et on regarde notre vie sans la moindre idée de ce qui va advenir de nous, de vous, de moi. On ne sait pas. C'est un peu comme ça que notre série se termine en quelque sorte. Certaines personnes sont perdues, d'autres continuent...

    HBO

    [Ce que je peux vous dire aussi], c'est que vous pouvez vous attendre à un lion...

    Un lion ?

    Oui. Je promets aux téléspectateurs un lion.

    Un lion en cage ?

    Je ne peux rien dire au sujet du lion (rires).

    Parce qu'une partie de la saison se déroule en Australie, n'est-ce pas ?

    Est-ce que je suis autorisé à le dire... Mais, oui, nos personnages vont voyager. Ils quittent les Etats-Unis. Je peux vous dire ça. Et il y a un lion (rires).

    Cela fait un très bon pitch à la saison 3 !

    Oui (Rires) ! Ils quittent les Etats-Unis. Et il y a un lion. 

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    Matt finit son chemin à des millions de kilomètres de l'homme que l'on a rencontré

    Entre l'homme qu'il était dans la saison 1 et celui qu'il est dans la saison 3, quel genre de voyage a expérimenté Matt Jamison ?

    Le voyage moral, intellectuel et émotionnel de Matt est immense dans la saison 3. Matt finit son chemin à des millions de kilomètres de l'homme que l'on a d'abord rencontré dans la première saison. Je peux promettre ça. C'était très satisfaisant pour moi de pouvoir jouer ça. J'ai beaucoup de chance d'avoir pu jouer Matt Jamison dans la série.

    Cela m'a fait questionner mes propres croyances, ma propre approche de la vie. Quand on interprète un personnage comme celui-là, vous êtes continuellement en conversation, pas au sens littéral, mais en conversation avec votre showrunner. Sur votre vie, sur la sienne, sur la vie des personnages... Matt va surprendre les gens. Comme il le fait tout le temps. C'est un homme très surprenant (rires).

    J'ai eu la chance de rencontrer Damon à un moment charnière de ma vie

    Vous évoquez le fait que votre vision de la vie a changé avec "The Leftovers" ainsi que les conversations profondes échangées avec Damon Lindelof. Est-ce que vous avez le sentiment qu'en termes d'âme et de spiritualité, vous avez en quelque sorte grandi ?

    Oui, tout à fait. Mon interprétation de ce personnage coïncide avec la naissance de mes enfants, j'ai également traversé l'andropause masculine (rires). J'ai embrassé le milieu de ma vie. Enfin, j'espère ! Mais qui sait ? J'ai atteint la cinquantaine, mes enfants sont arrivés, ils ont grandi... Tout cela est arrivé en même temps que mon rôle de Matt dans The Leftovers. 

    J'ai eu la chance de rencontrer Damon à ce moment de ma vie. Notre première conversation n'a pas consisté en un simple échange de banalités. On a directement commencé à parler de foi, de choses essentielles. Alors, oui [la série] a eu un impact énorme sur moi. Je suis resté athée mais j'ai jeté un oeil à la Bible pour la première fois de ma vie et j'y ai découvert des écrits et des idées extraordinaires. 

    Pierre Perusseau / Bestimage

    Les personnages de "The Leftovers" vivent jour après jour avec un sens aigu d'une nouvelle apocalypse à venir, surtout cette saison. Et c'est désormais quelque chose d'assez réel, qui nous parle. Bien sûr, nous ne vivons pas avec un sentiment aussi menaçant au-dessus de nos têtes mais le monde n'est pas particulièrement rassurant non plus. 

    The Leftovers a été en avance sur son temps. Nous sommes plus proches de l'apocalypse aujourd'hui que nous ne l'avons jamais été depuis un certain nombre d'années. Ce qui peut arriver dans votre pays dans les semaines à venir [cette interview a été réalisée le 14 avril], ce qui aurait pu arriver en Hollande... Ce qui est arrivé dans mon pays, la honte du Brexit, qu'on se retire ainsi... Je veux d'ailleurs m'excuser devant tout le monde pour ce que nous avons fait (rires). Et bien évidemment, l'abruti aux Etats-Unis, le chimpanzé qui règne désormais sur l'Amérique.

    Nous sommes plus proches de l'apocalypse que nous ne l'avons jamais été

    La série a été un peu en avance [sur tout cela]. Soudainement, parce que les activités terroristes se sont accrues et qu'il y a eu une virée à droite, nous avons aujourd'hui une vision un peu plus apocalyptique des choses. Et cette série... Cette série, en gros, parle de l'émerveillement, de la fragilité et du merveilleux cadeau qu'est la vie. Et nous commençons tous à entrevoir ça aujourd'hui. 

    C'est aussi ce qui est touchant dans "The Leftovers". Elle touche si finement à l'idée que nous devons aimer les gens qui nous sont proches. Ce sentiment que l'on a lorsqu'on perd quelqu'un dans la vie, elle parvient à le retranscrire et à le faire comprendre très justement.

    Tout cela vient de Damon et de son écriture. Je crois qu'il dit que c'est tout ce que nous avons. Alors, prenons le maximum des uns et des autres tant qu'il est encore temps. Par exemple, dans la saison 1, il y avait ce passage très poignant. Nora, le personnage de Carrie Coon, fait le deuil de son mari et Matt lui dit que ce dernier la trompait. Quelle complexité [de sentiments] cela représente ? Pour les téléspectateurs et pour le personnage. Elle n'avait aucune idée qu'il avait une liaison avec une femme de l'école. 

    J'ai lu récemment dans un journal anglais qu'un jeune homme était mort dans un accident de voiture. Et sa femme a simultanément appris sa mort et que la personne, morte sur le siège passager à ses côtés, était sa maîtresse. La complexité de ce genre de situation, de sentiments [contradictoires] est exactement ce que la série approche. Et nous sommes terriblement faillibles, n'est-ce pas ? Et le pardon n'est pas dans la place en ce moment. Le Brexit n'est pas dans le pardon, Trump non plus...

    HBO

    Dans la bande-annonce de la saison, 3, on voit les personnages lever la tête vers le ciel mais aussi suivre les oiseaux des yeux. Dans le premier épisode de la saison, il y a cette même image mais, également, la présence d'oiseaux mystérieux dans la séquence initiale mais aussi à la fin. Est-ce qu'il s'agit d'un moyen d'évoquer la religion ou à nouveau l'apocalypse qui se prépare ?

    Je pense que c'est pour dire les deux et aucune des deux. Je pense que c'est simplement pour évoquer la vie. Quand on voit des personnages faire ça, ce n'est pas qu'ils pensent immédiatement à Dieu, je pense que c'est plus qu'ils regardent la nature suivre son cours. Ces oiseaux sont en vie et je suis en vie. Avec Damon, on touche à tout cela. 

    Pouvons-nous nous attendre à des épisodes spéciaux comme celui qui se déroulait dans l'hôtel la saison passée ?

    Oui, on peut s'y attendre. Il y aura à nouveau des épisodes où l'on se focalisera sur un seul personnage... Mais, oui, absolument. Déjà, le Season Premiere démarre [de manière surprenante] comme celui de la saison 2 où l'on découvrait la femme des cavernes. 

    Damon a raconté une histoire marrante lors de la soirée de lancement [à Séries Mania]. Sa mère s'était installée pour regarder le premier épisode de la saison 2 et lorsque la femme des cavernes est arrivée à l'écran, elle l'a appelé et lui a dit : "Damon, je suis vraiment désolée de te dire ça mais quelque chose ne va pas. Ils ne passent pas 'The Leftovers'. Alors, il lui a dit : 'Maman, tout va bien, assieds-toi tranquillement et regarde...' Elle pensait que la série avait été retirée de l'antenne (rires). C'est génial. 

    HBO

    Si le générique reste le même, sa musique change à chaque épisode, n'est-ce pas ?

    Je ne l'ai pas encore vu et la musique reste toujours une surprise pour moi. La musique a effectué elle aussi un voyage [dans The Leftovers]. Je pense que c'est parce que Max Richter, le compositeur, est aussi un téléspectateur de la série et qu'elle a aussi un impact sur lui... 

    Est-ce que vous et le reste du casting avez posé des questions à Damon Lindelof sur la fin au début du tournage ?

    J'ai appris à ne pas le faire. Je pense qu'il a assez de questions comme ça. Je lui fais confiance et j'aime être surpris. 

    Et l'avez-vous été ?

    Oui et non. Je pense que beaucoup d'acteurs de la série vous diraient pareil. On se lève le matin, on pense à son personnage, avant de tourner, avant de boire : "Peut-être que ça ou ça va se passer." Et parfois, cela se passe ainsi. Parfois, je me retrouve sur la même longueur d'onde avec Damon. Il a cette étrange clairvoyance parfois. Ca donne cette impression en tout cas. Ou alors il est tout simplement caché dans ma penderie quand je me réveille le matin (rires). Les showrunners feraient n'importe quoi !

    Justin Theroux, le héros de "The Leftovers", se livre à notre micro :

     

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