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    Festival d'Annecy 2019 : quelle place pour les femmes dans l'animation ?
    Clément Cusseau
    Clément Cusseau
    -Rédacteur
    Après des études en école de cinéma, il intègre la rédaction d’AlloCiné en 2011. Il est actuellement spécialisé dans les contenus streaming et l’actualité des plateformes SVOD.

    La productrice Corinne Kouper, à la tête du collectif Les Femmes s’animent, est revenue pour nous sur les inégalités hommes / femmes qui touchent le secteur de l’animation.

    D.R.

    AlloCiné : En quoi consiste l’association Les Femmes s’animent, présente pour la quatrième année consécutive à Annecy ?

    Corinne Kouper (productrice et co-fondatrice de l’association Les Femmes s’animent) : Je n’ai pris conscience que très tard du manque de parité dans le monde de l’animation. Je pense que je ne m’en suis rendue compte tardivement tout simplement parce que ces écarts ne sont pas visibles, mais j’ai fini par m’y intéresser de près grâce à des associations américaines spécialisées sur ce sujet, dont Women in Animation créée il y a vingt-six ans déjà ! Je me suis donc penchée sur la parité hommes / femmes en France, et j’ai découvert que nous en sommes encore très loin et c’est pourquoi j’ai décidé de mobiliser des gens pour former un groupe de femmes intéressées par le sujet et c’est ainsi qu’est née en 2015 l’association Les Femmes s’animent.

    La France est-elle en retard sur ces sujets par rapport aux États-Unis ?

    Je n’ai pas les chiffres poste par poste en tête, mais les écarts sont à peu près égaux entre ces deux pays. Il semblerait en revanche que cet écart soit moindre en France pour le cinéma en prises de vues réelles, et il serait intéressant d’enquêter pour découvrir la cause de cela. En France comme aux Etats-Unis, on constate effectivement une présente majoritairement masculine dans le monde de l’animation alors que les écoles sont pourtant fréquentées par davantage de femmes (environ 60 % d’inscrites seront les chiffres communiquées). On compte environ 30 % de femmes dans le monde de l’animation, des chiffres en baisse dès lors qu’on se limite à des postes à responsabilités comme réalisatrice, directrice de l’animation… Ces problèmes sont donc communs à nos deux pays, et nous essayons donc de les comprendre pour mieux les résoudre.

    Comment expliquer ce décalage entre la présence importante de femmes dans les écoles d’animation et leur présence minoritaire au sein de l’industrie, qui plus est dans des postes d’ordre artistiques ?

    Il y a plusieurs raisons à cela. Cette année à Annecy, nous avons eu la chance de recevoir les représentants des plus grands studios et l’un des intervenants américains disait notamment qu’aux États-Unis, les femmes étaient effectivement très présentes dans la production. Est-ce parce que l’on accorde plus de confiance à une femme dans un poste d’organisation ? Donc en effet, on trouve moins de femmes dans les postes de création, et même je dirais dans les postes de leaders créatifs où l’on ne trouve encore que trop peu de femmes.

    Et je pense qu’il faut aussi le dire, beaucoup de femmes ne vont malheureusement pas chercher non plus ces postes, c’est à dire que beaucoup ne se sentent pas légitimes pour ce type de fonctions, et c’est un gros travail que nous faisons pour donner aux étudiants davantage de confiance en elles et d’assurance.

    Le mouvement « Me Too » a-t-il permis d’éveiller les consciences au sein de l’industrie animée ?

    Nous avons lancé notre collectif en 2015 et dès l’année suivante nous avons organisé une table ronde ayant pour sujet le sexisme dans les studios. A l’époque, nous avions l’impression de parler dans le vide, mais nous avons tout de même été bouleversées par le nombre de témoignages recueillis et dès cet instant nous avons compris que quelque chose était en train de se passer. Une nouveau table-ronde était programmée pour novembre 2017, mais quelques semaines avant cette date, l’affaire Weinstein s’est déclenchée. Le sujet était déjà dans l’air, et il ne fallait qu’une affaire comme celle-ci pour que la situation n’implose. Comme le rappelait Julie Gayet (présidente cette année du jury Longs Métrages, ndlr), il n’y aurait probablement pas eu de Me Too sans la campagne électorale de Donald Trump. Nous vivons actuellement un moment très fort qui je l’espère va faire évoluer la société.

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