Les films s'enchainent mais ne se ressemblent pas pour John Ford, toujours capables de se renouveler ou d'offrir une nouvelle vision dans un même genre. La même année que le génial Fort Apache, il met en scène Three Godfathers où il s'intéresse au destin de trois bandits qui vont se retrouver avec un enfant entre les mains.
Ford met très vite en place le contexte de l'histoire avec cette attaque de banque et surtout l'errance dans le désert pour nos trois compères où ils vont se retrouver face à la soif, le vent, la faim et surtout une mère enceinte. Et c'est cela qui va intéresser le metteur en scène de Stagecoach, l'histoire de ces trois amis où, à travers cette parabole des Rois Mages, il va faire ressortir l'humanisme des personnages ainsi que l'amitié, le sacrifice, le pardon ou encore l'amour.
Comme souvent donc, il s'intéresse à l'humain avant tout, délaissant l'action et mettant en scène les qualités humaines sans excès ou caricature. Dans cette fable, il n'y a pas de mauvais hommes, chacun montrant une belle face de l'humanité que ce soit les trois "godfathers" ou le shérif et on retrouve, en plus de l'humain, la religion au centre du récit. Il trouve toujours le ton juste et apporte quelques touches d'humour, de douceur et de sensibilité à son oeuvre et ce, malgré quelques scènes parfois un peu risibles mais sans être préjudiciable. Il arrive à rendre tout cela intéressant, que ce soit grâce aux personnages et leurs évolutions ou aux idées scénaristiques qui savent se montrer inspirées et surprenantes.
Derrière la caméra il montre à nouveau tout son savoir-faire malgré quelques petites fautes de rythme, notamment dans la première partie tandis qu'il met en avant plusieurs images magnifiques telles celles d'introduction ou dans le désert avec ses tempêtes. Il utilise une belle partition avec brio tandis qu'il retranscrit bien le contexte de son récit, sans oublier non plus les seconds rôles. Si Harry Carey Jr ne montre guère de charisme et de présence, c'est tout le contraire de Ward Bond et surtout Pedro Armendáriz et John Wayne, qui portent le film sur leurs épaules.
John Ford se réinvente dans le western en livrant ici une oeuvre sensible, belle et surtout humaine, où les quelques petites maladresses ne sont guère préjudiciables face à tant de talents, que ce soit devant mais surtout derrière la caméra.