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    Sans lui, pas de Walking Dead ni de Zombieland : le premier film de morts-vivants ressort au cinéma et il faut absolument le voir
    Vincent Formica
    Vincent Formica
    -Journaliste cinéma
    Bercé dès son plus jeune âge par le cinéma du Nouvel Hollywood, Vincent découvre très tôt les œuvres de Martin Scorsese, Coppola, De Palma ou Steven Spielberg. Grâce à ces parrains du cinéma, il va apprendre à aimer profondément le 7ème art, se forgeant une cinéphilie éclectique.

    Oeuvre pionnière du cinéma d'épouvante, La Nuit des morts-vivants est ressortie au cinéma le 25 octobre ! Et vous ne devez vraiment pas la rater !

    Amateurs de zombies et de chair putréfiée, soyez au rendez-vous dans vos cinés ! La Nuit des morts-vivants, réalisé en 1968 par George A. Romero, ressort en salles dans une version restaurée en 4K.

    L'histoire suit Barbara et Johnny. Chaque année, ils vont fleurir la tombe de leur père. La route est longue, les environs du cimetière déserts. Peu enclin à prier, Johnny se souvient du temps où il était enfant et où il s'amusait à effrayer sa sœur en répétant d'une voix grave : "Ils arrivent pour te chercher, Barbara."

    La nuit tombe. Soudain, un homme étrange apparaît. Il s'approche de Barbara puis attaque Johnny, qui tombe et est laissé pour mort. Terrorisée, Barbara s'enfuit et se réfugie dans une maison de campagne. Elle y trouve Ben, ainsi que d'autres fugitifs. La radio leur apprend alors la terrible nouvelle : des morts s'attaquent aux vivants.

    La Nuit des morts-vivants
    La Nuit des morts-vivants
    Sortie : 21 janvier 1970 | 1h 36min
    De George A. Romero
    Avec Duane Jones, Judith O'Dea, Karl Hardman
    Presse
    4,8
    Spectateurs
    3,7
    Voir sur Mubi

    UN PREMIER COUP DE MAÎTRE

    La Nuit des morts-vivants est la première œuvre cinématographique de George A. Romero, alors âgé de 28 ans. Le pape des films de zombies et ses amis d'université ont toujours eu le désir de réaliser un long-métrage. Malheureusement, les démarches auprès des financiers se sont révélées catastrophiques.

    Romero et ses acolytes ont alors décidé de fonder leur propre société de production : Image Ten, en la finançant par leurs propres moyens. Chaque actionnaire s'engageait à rapporter 600 dollars à la société.

    Le capital obtenu sera alors quintuplé en étant vendu cher à des tiers. Grâce à cela, le metteur en scène et son équipe parviennent à réunir 114 000 dollars pour lancer la production de La Nuit des morts-vivants.

    Si George A. Romero est aujourd'hui passé maître du cinéma d'horreur, il n'était pas spécialement amateur du genre lorsqu'il a commencé à tourner La Nuit des Morts-Vivants. En effet, si le cinéaste et ses complices ont décidé de se tourner vers l'horreur pour leur premier film, c'est avant tout pour espérer rentabiliser les capitaux investis.

    DES ZOMBIES ET DES DOLLARS

    À l'époque, la télévision avait fait chuter les taux de fréquentation des salles de cinéma. Il fallait surtout s'assurer que le film allait rapporter de l'argent tout en restant une œuvre de qualité.

    "Sans doute, nous aurions préféré réaliser un grand film dramatique. Mais une fois que nous avons opté pour un film d'horreur, nous nous sommes efforcés de le rendre le plus réaliste possible avec le budget dont nous disposions", analyse le producteur Russel Streiner.

    Le succès du film a lancé la carrière de Romero, qui a réussi à faire de La Nuit des morts-vivants une des œuvres les plus rentables du cinéma indépendant à l'époque. Le film a rapporté 5 millions de dollars de recettes lors de sa sortie aux Etats-Unis, de quoi largement rentabiliser l'investissement de 114 000 dollars.

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    À noter que George A. Romero s'est inspiré de Je suis une légende, le célèbre roman de Richard Matheson, pour écrire le scénario de La Nuit des morts-vivants. Le livre raconte l'histoire de l'unique survivant sur Terre d'une terrible pandémie transformant les humains en vampires.

    Par ailleurs, le film a été tourné à la fin des années 60, période troublée avec la guerre du Viêtnam prenant de l'ampleur sur le terrain mais également dans les médias. La Nuit des morts-vivants s'est imprégné de ce contexte politique et se définit ainsi plus volontiers comme une œuvre sociale qu'un film d'horreur à part entière.

    "Nous étions juste une bande de gamins des sixties, dégoûtés que l'élan peace and love n'ait pas pu changer le monde. De nouvelles guerres et des affrontements raciaux remplaçaient ceux qu'avaient connus nos parents. Notre colère s'est naturellement retrouvée dans le film", expliquait le cinéaste au micro de Télérama en 2008.

    LE RACISME AU COEUR DE L'OEUVRE

    De plus, l'œuvre de Romero évoque aussi le racisme aux Etats-Unis, sujet brûlant dans les années 1960 avec notamment le combat des afro-américains pour les droits civiques. Pour le critique de cinéma français Serge Daney, "le vrai sujet du film n’est évidemment pas les morts-vivants, mais bien le racisme", assure-t-il dans Les Cahiers du cinéma en 1970.

    En effet, un des personnages principaux du film, Ben, est incarné par un comédien noir, Duane Jones. Sans rien révéler du dénouement de La Nuit des morts-vivants, pour ceux qui ne l'auraient pas encore vu, on peut dire que celui-ci est extrêmement marquant, voire choquant, surtout quand on le replace dans le contexte des USA dans les années 1960.

    "J'ai simplement choisi Duane Jones car il était meilleur que les autres", a toujours martelé Romero. Quant à l'acteur, il ne s'est jamais dit qu'il avait été embauché parce qu'il était noir. "En revanche, je me suis rendu compte que, parce que j'étais noir, cela donnait un élément historique différent au film", a-t-il indiqué.

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    Duane Jones et Judith O'Dea

    Interrogé par Indiewire en 2016, quelque temps avant sa mort, Romero avait admis qu'il n'avait pas du tout l'intention de traiter la discrimination raciale à travers le personnage de Ben.

    "Quand nous avions fait le film, je souhaitais parler du manque de communication, de ces gens qui, même lorsqu'ils font face à des situations improbables, continuent de se quereller pour des choses futiles plutôt que de faire face au vrai problème. C'est quelque chose que l'on retrouve encore aujourd'hui. C'est ce qui m'intéresse vraiment", a-t-il précisé.

    "Je n'ai pas réalisé à l'époque quel impact ce choix pourrait avoir. Une fois le film terminé à Pittsburgh, nous avons embarqué les bobines dans le camion et avons pris la route jusqu'à New York pour la première. Ce soir-là, à la radio, nous avons appris que Martin Luther King venait d'être assassiné", a confié le cinéaste.

    ROMERO OF THE DEAD

    À la lecture des différents événements historico-politiques, Romero a compris qu'il pouvait faire revenir ses morts-vivants chaque fois qu'il avait quelque chose à dire sur les mutations de la société américaine.

    "Une occasion rêvée de m'amuser avec les codes du genre, tout en glissant des considérations politiques. Je suis toujours resté fidèle à cette approche", assurait-il.

    Ainsi, le metteur en scène a continué dans son genre de prédilection tout au long de sa vie. Après La Nuit des morts-vivants, il a notamment réalisé Zombie, Le Jour des morts-vivants, Land of the Dead ou Diary of the Dead. Son dernier long-métrage, Survival of the Dead, est sorti en 2009. Romero est décédé en 2017 à l'âge de 77 ans.

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