Mon compte
    Elephant Man : le film a l'un des plus beaux maquillages du cinéma mais a été ignoré par les Oscars
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Chef-d'oeuvre absolu, "Elephant Man" est porté à bout de bras par l'immense acteur que fut John Hurt, bouleversant dans le rôle de John Merrick. Une composition largement aidée aussi par un extraordinaire maquillage, hélas non récompensé aux Oscars.

    Inoubliable composition du regretté John Hurt, immense dans son rôle d'Elephant Man chez David Lynch. Sans manichéisme, d'une grande honnêteté envers son sujet et son public, la réalisateur tisse au travers d'une admirable photographie en noir et blanc signée par Freddie Francis le récit de la beauté transfigurant la laideur. Un film d'une puissance émotionnelle absolument dévastatrice.

    Le profond humanisme qui irrigue l'oeuvre n'est pas seulement ressenti par les spectateurs. Il l'a aussi largement été par les acteurs eux -mêmes, très imprégnés par la gravité du sujet, à commencer par John Hurt.

    "Ce film a changé ma façon de penser sur beaucoup de choses. C'est difficile de mettre le doigt dessus, mais toute l'expérience de cette ampleur est... Ca serait étrange si ca n'avait aucun effet sur vous. Ca en a eu un [sur moi], et probablement sur mon propre comportement aussi. Ce film est une leçon d'humilité" commentera-t-il plus de trente ans après la sortie du film.

    Il est aussi largement aidé dans sa tâche par l'extraordinaire et impressionnant maquillage de John Merrick. C'est à Christopher Tucker, maquilleur britannique spécialisé dans la création de prothèses pour les films d'horreur, que l'on doit cette création. L’équipe s’était rendue à l’Hôpital royal de Londres où est conservé un moule du buste de John Merrick afin de s’en inspirer pour le film.

    BFI

    A l'origine du projet, David Lynch voulait faire lui même les prothèses avec de la mousse de polyuréthane souple. Mais peut satisfait du résultat, il s'adressa alors, tardivement, à Christopher Tucker.

    Il a fallu 7 heures lors de la première application du maquillage d’Elephant man, réalisé par un maquilleur réputé, Wally Schneiderman. Avec de l'entraînement, le temps est redescendu à 3 ou 4 heures "seulement"; mais les journées de tournage duraient déjà 12 heures, auxquelles il fallait rajouter plus de 3 heures de démaquillage pour Hurt.

    Il ne tournait donc qu’au mieux un jour sur deux, et parfois un jour sur trois. C'est dire s'il fut mis au supplice... Il lui est même arrivé de dormir assis durant le tournage, comme son personnage, pour gagner du temps et ne pas revivre quotidiennement cette épreuve...

    Révéler son visage le plus tardivement possible

    Si David Lynch souhaitait semble-t-il révéler assez rapidement le visage et le corps atrocement difforme de John Merrick, l'acteur penchait plutôt pour temporiser sa révélation, qui devait arriver plus tard dans le film.

    "David voulait montrer le maquillage de l'homme-éléphant plus tôt dans le film que je ne le souhaitais. Je pensais que plus on attendait avant de le montrer entièrement, mieux c'était. On avait tellement de retard avec le maquillage qu'on y travaillait encore pendant le tournage. Je faisais des scènes avec le déguisement, puis je filais directement à Old Kent Road [le lieu où se trouvait l'atelier de Christopher Tucker] travailler avec Chris.

    J'essayais de le persuader en lui disant : "ne le termine pas trop vite, car on a une autre séquence la semaine prochaine, que j'adorerais tourner avec le déguisement. En partie parce que le déguisement avait un succès incroyable. Les gens s'en souviennent".

    D.R.

    Malgré ses huit nominations dont celle du Meilleur acteur pour John Hurt, Elephant Man fut scandaleusement ignoré par les Oscars lors de la cérémonie de 1981. Une absence choqua sans doute encore plus : aucune récompense ne venait justement saluer l'extraordinaire travail sur le maquillage.

    Mais il y a une raison à cela : la catégorie de la récompense n'existait pas officiellement. C'est à la suite du tollé provoqué à ce sujet par Elephant Man que la catégorie en question verra le jour l'année suivante, qui récompensa le fabuleux travail de Rick Baker pour Le loup-garou de Londres. Le film de Lynch a donc tristement essuyé les plâtres...

    FBwhatsapp facebook Tweet
    Sur le même sujet
    Commentaires
    Back to Top