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    Greta Gerwig : "Lady Bird est la fille que j'aurais voulu être"

    A l'occasion de la sortie de "Lady Bird", premier long métrage écrit et réalisé par Greta Gerwig, rencontre avec la cinéaste, en lice pour l'Oscar de la meilleure réalisatrice.

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    AlloCiné : Tout le monde doit vous poser la question, mais qui est Lady Bird ? Est-ce vous ? Une partie de vous ? 

    Greta Gerwig, scénariste et réalisatrice : Je viens de Sacramento. C'est ma ville natale. Je suis allée à l'école là-bas. Tout ça me ressemble beaucoup donc. Je savais que je voulais faire un film sur Sacramento, dont le coeur de l'intrigue parlerait d'une relation mère-fille.

    Mais à vrai dire, j'étais à peu près l'opposée du personnage de Lady Bird quand j'étais ado. Je n'ai jamais fait en sorte qu'on m'appelle par un autre nom très différent du mien. Je ne me suis jamais teint les cheveux rouge vif. J'étais beaucoup plus obéissante, j'étais plus du genre à ne pas vouloir décevoir les gens. Je voulais suivre les règles et faire en sorte que les gens m'apprécient.

    Dans un sens, d'écrire Lady Bird était comme une exploration de ce que je ne pouvais pas être quand j'avais cet âge. Elle est tellement directe, elle est tellement courageuse… Elle a des défauts, mais elle est aussi très admirable. C'est venu de moi, mais ce n'est pas moi. C'est celle que j'aurais voulu être.

    J'étais à peu près l'opposée du personnage de Lady Bird quand j'étais ado

    Mais le cœur du film raconte le fait d'aimer un endroit que vous devez quitter ; à quel point elle et sa mère sont proches mais aussi à quel point elles se disputent… Tout ça, ce ne sont pas littéralement les événements de ma vie, mais c'est très proche de moi et de mon expérience. Je crois beaucoup au fait que plus vous faites quelque chose de personnel, plus c'est universel. Le fait que les gens puissent s'identifier représente beaucoup pour moi. D'avoir l'impression que vous êtes déjà quelque part alors que ce n'est pas le cas. Mais c'est le genre de choses que je peux moi-même ressentir par exemple devant un film de Wong Kar Wai. C'est comme si je connaissais Hong Kong alors que je n'y suis jamais allée. C'est ce sentiment, vous sentez que quelque chose est vrai. Ce point m'intéresse beaucoup. Quand je me mets à écrire, je commence toujours par quelque chose qui m'est assez proche et je laisse alors les personnages devenir eux-mêmes, prendre différentes tangentes.  Mais les fondations me sont proches. 

    Universal Pictures International France

    D'avoir ces intentions, c'est une chose, mais comment avez-vous fait pour que cela fonctionne aussi bien, que cela paraisse aussi vrai, vécu ?

    Ce que je préfère dans le fait de réaliser un film, c'est le fait que ce soit un travail collectif. Le seul moment pendant lequel vous êtes seule, c'est quand vous écrivez. Dès que vous commencez à le fabriquer, vous collaborez avec le directeur de la photo, les producteurs, le chef costumier, les acteurs…, et ils y apportent tous de leur vie. Ils apportent leur expérience, leur vécu, leur idée de la famille, de la ville où ils ont grandi… C'est comme si ça devenait un rêve partagé dans un sens. J'adore ce moment, le fait de le donner aux autres. C'est la première étape, avant au final de le donner au public, comme si vous le donniez à chacun personnellement.

    Saoirse Ronan a compté tellement pour ce film

    Je ne fais pas d'improvisation sur mon plateau. Les mots sont dits exactement comme ils sont écrits, mais j'aime le fait de collaborer avec les acteurs, de discuter de leur vision des personnages : comment ils s'habillent, comment ils marchent, comment ils se présentent… Pour moi, tout ça ne pouvait que venir d'eux. Et à coup sûr, le personnage de Lady Bird est une vraie collaboration entre Saoirse Ronan et moi. Le film ne serait pas tel qu'il est sans elle, comme tous les autres acteurs du film d'ailleurs. Elle a compté tellement pour ce film. Elle m'a aussi aidé à aller plus loin dans ce que j'avais écrit. Elle l'a rendu plus clair à mes yeux.

    D.R.

    Quelque chose qui est également très beau dans le film est de voir à quel point la musique, la lecture ont compté pour vous, et j'ai justement lu que vous aviez pu avoir les chansons dont vous rêviez pour le film d'une façon assez originale. Pouvez-vous nous en dire plus ?

    J'avais mentionné un certain nombre de chansons bien précises pour le film, qui me semblaient importantes, que j'avais envie d'avoir, en plus de la comédie musicale, écrite par  Stephen Sondheim. Tout ça était dans le scénario, et je ne savais pas comment j'allais obtenir tout ça. Mais en fait, j'ai écrit des lettres expliquant quel était mon projet et pourquoi je voulais ces chansons. C'était assez émouvant, car toutes ces chansons de Dave Matthews, Alanis Morrissette, Justin Timberlake… tous ont dit oui ! J'ai eu de la chance car j'ai pu m'adresser à eux de façon sincère, je pensais vraiment ce que je leur ai dit. Je leur suis très reconnaissante d'avoir accepté.

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    Votre film reçoit de très belles critiques et a même battu un record sur Rotten Tomatoes. Comment vivez-vous tout cela ? Est-ce que cela met de la pression ?

    Oui, c'est palpitant. Parce que chaque personne qui a participé à ce film y a mis beaucoup du sien, chacun y a mis beaucoup d'amour, de tendresse, de coeur et d'âme. C'est incroyable que les gens réagissent ainsi au film car je sais que nous avons beaucoup travaillé.

    C'est certainement intimidant, mais avant tout, cela fait plaisir. Je ne fais pas des films pour que les gens n'aillent pas les voir. Je les fais pour qu'ils rient, pleurent, l'apprécient et qu'ils aient envie de venir le voir. Donc c'est vraiment agréable quand c'est reçu de cette façon.

    C'est incroyable que les gens réagissent ainsi au film

    Vous êtes aujourd'hui en France [l'entretien a été enregistré en décembre 2017, Ndlr.]. Avez-vous accompagné le film ailleurs, mis à part les Etats-Unis ?

    Oui, je suis allée en Angleterre, à Londres. Je suis allée au Canada. J'ai rencontré des gens de Suède, du Danemark, d'Allemagne… Des journalistes du monde entier… Je ne suis pas encore allée partout, mais ne vous inquiétez pas, j'ai encore du temps !

    Vous allez bientôt tourner à nouveau avec Mia Hansen Love [Greta Gerwig jouait dans Eden]…

    Oui, c'est vrai. Elle a écrit un très beau film. Je suis très fan de son travail. Je vais faire ce film avec elle.

    La bande-annonce de Lady Bird, qui débarquera sur grand écran le 28 février 2018 :

     

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