Que dire ? Est-ce que j’ai vraiment besoin de dire qui est Clint Eastwood ? Beaucoup le connaisse qu’en tant que réalisateur, certains le connaissent aussi en tant qu’acteur et quand on a un CV aussi long et complet que papi Eastwood, ça se respecte. Et pour ma part, moi qui n’est pas du tout fan des films de guerre, je le respecte davantage pour m’avoir offert deux coups de cœur avec "Lettre d’Iwo Jima" et "Mémoires de Nos Pères", bien que ça ne détrône pas "Sur la route de Madison" qui reste mon film préféré de Clint Eastwood.
Pour en revenir à "American Sniper", on ne peut pas dire que ce nouveau long-métrage n’a pas fait parler de lui avant de sortir en salle. Beaucoup ont crié à la propagande pro-guerre en prétendant voir une glorification de Chris Kyle, surnommé « La légende » et considéré comme un héros de guerre aux USA, ce qui n’empêche pas ce film d’être un grand succès commercial à l’heure actuelle. Mais, étant un grand fan du réalisateur et des dénonciations qu’il fait dans beaucoup de ses films, j’ai naturellement été voir ce nouveau film de Eastwood au cinéma.
Et au final, je n’ai aucun regret à faire, c’est une fois de plus un très bon film de papi Eastwood, pas sans plusieurs défauts, il y en a même un bon nombre mais quoiqu’il en soit je n’ai pas vu la propagande pro-guerre dont tout le monde parle. Commençant à avoir ma manière de rédiger mes critiques, parlons d’abord de la réalisation et de la mise en scène : et encore une fois, Clint Eastwood a conscience de son sujet, il filme la violence du conflit en Irak sans se retenir ou cacher les effusions de sang. Les scènes de sniper sont particulièrement bien fichues également, la tension et l’oppression étant présentes dans chacune des scènes ou l’on voit Chris Kyle accroupie avec son fusil de chasse,
notamment lors de la première scène en début de film ou il n’hésite pas à abattre un gosse et sa mère sur le point de lancer une grenade aux soldats et au tank avançant sur le terrain,
on sent un poids sur nos épaules et un sursaut intérieur à chaque balle tirée par le sniper. Chacune de ces scènes est bien monté et nous confronte à la violence humaine, montrant qu’en temps de guerre il est facile pour tout homme de tuer son prochain.
Il y a juste une scène qui fait tâche et a un montage en désaccord avec les autres scènes,
c’est celui ou Chris abat Mustafa dans le dernier tiers du film, on a un ralenti sur la balle de fusil de sniper tiré à longue distance, on peut supposer sans mal que cette scène a une significative puisqu’on nous a montré le sniper oriental dans une très courte scène avec sa famille (j’imagine) mais c’est contraire au reste des scènes montées par le réalisateur. Ça aurait été plus percutant de faire un simple ralenti de trois secondes sur Mustafa recevant la balle en pleine tête au lieu de faire un montage lent qui ne sert pas à grand-chose au final.
Ce n’est pas mauvais, mais ça reste du superflu. Ceci étant dit, Eastwood sait filmer ce qu’il met à l’écran, il sait installer le stress et la tension quand il faut et calmer le jeu lors du retour de Chris Kyle à son foyer, on ne peut pas bouder son travail sur ce point et sa nomination aux Oscars est plus que justifié, je le soutiens pour le coup.
Mais puisqu’on parle des oscars, parlons du jeu d’acteur avec la tête d’affiche du film : Bradley Cooper qui n’a pas volé sa nomination dans la catégorie des meilleurs acteurs. L’acteur s’en sort parfaitement dans la peau du héros américain. L’acteur s’en sort aussi bien en jouant le rôle du sniper que celui du mari incapable d’être réellement présent aux côtés de sa femme, le maquillage ainsi que le changement physique qu’il a suivit sont frappantes, et pour ça chapeau !
Sienna Miller est très convaincante aussi, bon elle n’est pas aussi mise en avant que Bradley Cooper mais elle le droit à son lot de scène forte en émotion et la comédienne est juste lors de ces moments là, on sent son impuissance face à un époux incapable de revenir à une vie normale, tourmenté et marqué par la guerre qui l’a mentalement perverti. Pour le reste des acteurs, je n’ai pas tant de chose à dire car le film se base avant tout sur le point de vue du personnage de Chris Kyle (d’où l’impression de voir un film américain patriotique, on y vient). Luke Grimes, Keir O’Donnell, Jake McDorman, Sam Jaeger ainsi que les autres ont bien fait leur travail, Eastwood sait diriger ses acteurs même si ils ne sont pas très mis au premier plan à part pour certains moments qui joueront sur la psychologie de Chris Kyle.
Venons-en d’ailleurs, puisque c’est à travers lui que Clint Eastwood traite les thèmes de la vie privée des soldats revenus de longue période de guerre et de l’impact et des traces que ça laisse en eux. Chris Kyle, celui qui est mentionné et a vraiment existé, a prétendu dans ses écrits personnels n’avoir regretté aucun de ses gestes, et ce point semble être bien respecté dans ce que nous montre le metteur en scène.
Néanmoins, Chris Kyle ne sombre jamais davantage dans un esprit pro-guerre ou dans un esprit anti-guerre. Cela est démontré lors des scènes de Sniper ou il a la lourde tâche d’abattre tout ce qui pourrait entraver la mission des SEALS,
même si c’est un enfant ou une femme. Il éprouve son dégoût d’ailleurs lors des deux premiers meurtres qu’il comment et dans la seconde partie, quand il aperçoit l’enfant vouloir s’emparer du bazooka d’un iraquien qu’il a abattu, il prie pour que ce dernier n’ait pas à l’utiliser afin de ne pas avoir à l’abattre.
Toutefois, ça ne l’empêche pas de presser la détente quand ça devient nécessaire, ou même de se montrer plus violent envers certains civils
comme lorsqu’il découvre une cachette d’arme chez un collaborateur des terroristes d’Al-Qaïda.
Ce qui permet aussi au réalisateur de mettre en évidence le fait que notre nature est facilement influençable face aux atrocités qu’on est capable de commettre en temps de guerre, et cela même dés notre plus jeune âge
avec la scène ou Chris abat son premier animal étant enfant.
Comme dans la plupart de ses films, l’écriture est intelligente et la morale est bonne et à retenir, raison pour laquelle le style de Clint Eastwood me plait tant dans ses réalisations.
En revanche, si je dois faire un véritable reproche par rapport à l’écriture du scénario, ce serait peut être sur les scènes de combats aux sols, notamment dans la seconde parties. Elles ne sont pas mauvaises, elles sont même bien filmé et certaines scènes font très fortes
comme celle du boucher à la perceuse qui n’hésitent pas à tuer l’enfant un iraquien ayant partagé des informations avec les soldats américains,
mais techniquement ça reste à peu près le même schéma :
Chris et ses potes discutent dans le véhicule qui les transportent, les ennuis arrivent avec Mustafa ou d’autres terroristes qui les attaquent, un des mecs qui sur lesquels ont s’était un peu rapproché est grièvement blessé et va y rester sur place ou plus tard avant que le groupe ne se replie ou poursuit la mission sur place.
Rien d’horrible ou de gênant, mais c’est à souligner quand même.
Par contre, ce qui est beaucoup plus dérangeant et pas fin du tout venant de Eastwood, c’est les dernières minutes du film ainsi que le générique,
le jour ou Chris Kyle a perdu la vie et ou l’on nous montre clairement, en un plan direct, le responsable de sa mort devant sa voiture.
Mouais… pas terrible pour le coup, mais le plus gênant ensuite c’est le générique de fin : en soi, on peut comprendre que Clint Eastwood voulait rendre hommage à Chris Kyle
avec les archives du jour de son enterrement,
mais
avec tous les drapeaux américains déployés
ainsi que la musique patriotique d’Ennio Morricone en fond, ça devient du patriotisme forcé vraiment malvenu.
Ceci étant dit, pour ceux qui reprochent à ce film d’être du patriotisme et de la glorification de l’armée américaine, j’ajouterais comme rappel que ce film se base sur la vision de Chris Kyle, de ses mémoires et que Clint Eastwood cherche à rester fidèle au point de vue du sniper.
Donc, le fait qu’on voit un enterrement qui rend hommage de manière patriotique à un soldat américain mort pour son pays, ou
c’est celui ou Chris abat Mustafa dans le dernier tiers du film, on a un ralenti sur la balle de fusil de sniper tiré à longue distance, on peut supposer sans mal que cette scène a une significative puisqu’on nous a montré le sniper oriental dans une très courte scène avec sa famille (j’imagine) mais c’est contraire au reste des scènes montées par le réalisateur. Ça aurait été plus percutant de faire un simple ralenti de trois secondes sur Mustafa recevant la balle en pleine tête au lieu de faire un montage lent qui ne sert pas à grand-chose au final.
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, c’est tout à fait justifié dans le fait ou le réalisateur cherche à adopter le point de vue du soldat décédé il y a deux ans maintenant, et aussi à se baser sur le ressenti des américains vis à vis de l'attentat du 11 septembre 2001 qui était (et est toujours) ancré dans nos mémoires.
En clair, et pour conclure ma critique, je dirais que : "American Sniper" mérite amplement sa place aux Oscars, malgré des soucis de répétitions à certains moments et une fin patriotique trop forcée pour faire l’impasse dessus. La réalisation vis-à-vis du sujet est efficace et forte, l’interprétation de Bradley Cooper est impressionnante, les thèmes abordés sont intelligent et dénonciatrices et l’émotion est au rendez-vous comme dans beaucoup de ses films. Pour ma part, ça n’atteint pas le niveau d’excellence de "Sur la route de Madison", "Lettre d’Iwo Jima" ou "Gran Torino", mais ça surpasse "Mystic River", "J.Edgar", "Un monde parfait" ou encore "Invictus" parmi les films que j’ai visionné de ce réalisateur. Aujourd’hui, Clint Eastwood a 84 ans et ce film pourrait être, peut être, son dernier, alors je ne peux que vous recommander d’aller le voir pour vous en faire votre propre opinion.