« Sicario » dégage une grande intensité en raison de sa musique, de ses plans aériens qui se traînent, et surtout par le personnage Kate Macer jouée par Emily Blunt. L’actrice, sous la direction de Villeneuve, parvient à traduire toutes ses interrogations, ses préoccupations, ses inquiétudes. On s’identifie à Kate Macer. Tout comme elle, on s’interroge, on est préoccupé, on est inquiet de la mission pour laquelle elle s’est portée volontaire. On vit, on ressent tout à travers ses silences, ses regards. A cela s’ajoutent Alejandro (Benicio Del Toro), personnage discret et non moins énigmatique, s’exprimant par des phrases très courtes, quelque peu brutales, voire glaçantes et Matt Graver (Josh Brolin), personnage à l’allure faussement désinvolte. Tous deux participent grandement à cette intensité. Laquelle ne va pas me lâcher jusqu’à la fin du film. Quand on apprend la raison de sa présence dans cette mission, cela fait froid dans le dos. Et pourtant, des loups comme Alejandro, Matt Graver, nous en voyons à la pelle dans les séries, comme « 24h Chrono » par exemple et ils nous fascinent par leurs méthodes expéditives, radicales, dénuées de sentiments. Face au terrorisme ou à toutes formes de terrorisme, ou de comportements mafieux, ces loups paraissent indispensables pour maintenir un semblant de démocratie ou maintenir l’équilibre de la finance. Seulement (il n’est pas question de dévoiler la raison), Kate Macer n’a pas sa place dans ce milieu même si elle a les compétences et l’expérience du terrain. Parce qu’elle a tout simplement des scrupules, et ceux-ci ne sont pas compatibles pour certaines missions où le respect de la loi flirte avec la ligne rouge de l’illégalité. Enfin, Villeneuve filme la violence en hors champ, ce qui n’est pas banal par ces temps qui courent. C’est tout aussi efficace, surprenant et intense.