Que de délicatesse et de talent pour rendre supportable l’horreur de cette histoire… Car en voyant ce médiocre séducteur tourner autour de l’émouvante Virginie Efira, arriver à la duper à ce point, en saisissant, ou se rappelant, combien c’est facile, quand on est un peu cultivé, de séduire une jeune femme qui aimerait tellement le devenir : un chouya de Nietzsche, quelques pincées d’anecdotes glanées en voyage, un brin de promenade en forêt, et la joie de la chair remuée jusqu’aux tréfonds, on est presque pris de nausée. Et ce n'est pas tout, car cette jolie fille consent à toutes les humiliations, à tous les caprices de son ami: à son refus de se marier, de reconnaître leur enfant, de venir la voir sinon quand il en a le temps, le désir, ou le besoin de se distraire. Et l’avilissement est si brutal que l’on n’est pas loin de se demander ce qu’on fait là, à s’intéresser à cette oie trop blanche, à cette petite esclave d’un tout petit maître. Mais non, il faut rester et souffrir, avant de sentir la tendresse monter avec la colère, les fils d’une vie simple et aimée se renouer – trop tard, bien faiblement, mais se renouer. Jenny Beth, le visage sec, la chevelure noire et hargneuse, est bouleversante. Comme le récit est bien mené, chaque touche bien posée: c’est magnifique.