Robuste : les secrets du tournage

Robuste est le premier long métrage de Constance Meyer après trois courts métrages : Frank-Etienne vers la béatitude, Rhapsody et La Belle affaire. La cinéaste a eu l'idée du film via une image. Elle se rappelle :  "J’avais en tête l’image d’un homme robuste évanoui dans les bras d’une femme qui le porte, le sauve. Comme une scène galante inversée. C’est cette micro-situation - l’abandon d’un homme dans les bras d’une femme - qui est à l’origine du film. Il fallait ensuite détricoter cette image pour en faire une histoire."

Constance Meyer et Gérard Depardieu se connaissent bien puisque l'acteur était à l'affiche des trois courts métrages de la réalisatrice, mais aussi de L'Autre Dumas et Bellamy sur lesquels elle a oeuvré comme assistante réalisatrice. Elle explique comment elle a rencontré le célèbre acteur :

"En fait, j’ai rencontré Gérard Depardieu avant, dans le milieu du théâtre. Puis j’ai étudié trois ans à la Tisch School, l’école de cinéma de la New York University dont Spike Lee est d’ailleurs le directeur artistique. Ça a été une expérience incroyable, l’école brasse énormément de gens de divers pays."

"Là bas il n’y a pas de départements (réalisation, montage, scénario...). On fait tout, à tour de rôle. On devait réaliser un film de quelques minutes sans dialogues, ça m’a beaucoup marquée : raconter une histoire en se passant de mots."

"La deuxième année on devait réaliser un film plus long et j’ai écrit Frank-Etienne vers la béatitude (2012) en pensant à Marina Foïs et à Gérard Depardieu : j’ai eu la chance de tourner avec ces deux acteurs hors norme. A partir de là a débuté une collaboration entre Gérard et moi."

Constance Meyer et le directeur de la photographie Simon Beaufils ont tourné avec de vieilles optiques pour donner davantage de grain et la matière à l’image. La cinéaste tenait absolument à ancrer le film dans un univers fictif et esthétiquement maîtrisé. Elle confie :

"D’autant plus que c’est un film essentiellement tourné en intérieur. J’avais besoin d’un chef opérateur qui sache créer une atmosphère un peu en suspens, onirique, un léger décollement de la réalité. Simon comprenait très bien cette dimension-là et m’a beaucoup apporté sur le plan artistique."

Le point commun entre les deux personnages et acteurs principaux réside dans leur corpulence. Une caractéristique cachant des fragilités que Constance Meyer a voulu développer : "Il y a bien sûr mon envie de montrer la grâce qui se dégage de leurs corps, mais ce qui m’intéressait c’était aussi de révéler la fragilité derrière leur corpulence. Les contradictions m’intéressent et je me disais 'c’est beau de voir cet homme qui semble avoir vécu 150 vies et de voir cette femme qui semble si combattive, qui fait de la lutte, et de réaliser qu’à l’intérieur de ces deux êtres se joue tout autre chose'."

"Leur vulnérabilité - le sentiment amoureux pour Aïssa, la proximité avec la mort pour Georges : ce sont ces failles-là qui m’ont intéressée, plutôt que de me limiter au constat sur les corps robustes qu’on ne voit pas assez au cinéma, même si c’est vrai."

Constance Meyer et son équipe ont trouvé le décor de la maison dans le 16ème arrondissement de Paris. Elle explique : "Et ça a été déterminant : il y avait des vitres partout, et ce salon en demi-cercle. On a retravaillé le découpage en fonction de ce décor très particulier."