Lorsque l'on choisit d'adopter une approche enfantine, il en résulte souvent deux problématiques : l'intérêt que peut susciter le film chez les adultes et la simplification excessive de son scénario. Maintenant que l'on sait cela, disons autre chose : non, un scénario simple n'en fait pas, en tant que tel, un mauvais scénario. En revanche, le recours à des raccourcis ou approximations scénaristiques devrait éveiller, chez chacun de nous, une forme d'incrédulité.
Ce premier film de la saga Harry Potter nous dresse d'emblée le portrait de personnages facilement identifiables, manquant souvent de nuances, qui nous retire tout de suite toute forme d'ambiguïté ou de complexité. Par là, j'entends qu'on a pas la moindre chance de trouver un intérêt à un personnage aussi méprisant que Drago Malefoy (bien qu'il soit développé dans les autres films) ni à l'intello de service Hermione Granger, ou encore moins aux esclavagistes Dursley.
Tout est schématisé pour être sûr que l'enfant qui est ciblé, ou l'enfant qui sommeille en chacun de nous, ne soit pas perdu dans cette histoire, laquelle histoire n'a pourtant rien de bien complexe. C'est pourquoi on nous sert un Hagrid pataud qui, à la manière d'un meneur de jeu de rôle, permet de faire avancer nos trois protagonistes lorsqu'ils calent ; ou un professeur Rogue que tout accable, jusqu'à sa manière d'être et de parler.
Ajoutons à cela des incohérences scénaristiques qui contribuent à rendre l'univers – pourtant bien construit, du reste – moins crédible, comme l'accès ô combien dangereux pour un élève, mais en aucun cas sécurisé, au troisième étage (n'importe quel élève aventurier finit dans la gueule du cerbère) ; ou, mieux, l'heure de colle nocturne dans la Forêt Interdite, sous la surveillance négligée d'Hagrid et d'un chien, alors que des créatures très dangereuses y rodent – ce n'est pas pour rien que Dumbledore précise, lors de sa première prise de parole au banquet de bienvenue, de ne pas y aller. Le châtiment infligé à ces quatre élèves apparaît alors comme extrêmement sévère, pour ne pas dire inconscient.
Et, autre paradoxe, la confrontation finale, très effrayante pour un enfant, alors que tout le reste du film est écrit pour s'adresser à eux. Dommage que les péripéties soient aussi grossièrement écrites, car l'univers est esthétiquement réussi. Par ailleurs, une histoire riche, à double lecture enfants/adultes, n'est pas de l'ordre du fantasme. Pixar, Ghibli et même parfois Disney, pour citer les plus connus, l'ont maintes fois prouvé.