Il est étonnant que cette série ne soit dotée sur allociné que de 4 étoiles et demi sur 5. Elle devrait en être dotée de 6 ! Car, Dexter est incontestablement une série culte. Ceux qui en doute devraient s’interroger de savoir pourquoi elle fait autant l’objet d’études universitaires en sociologie, en psychologie, ou criminologie. En effet, la série est d'autant plus intéressante à étudier qu'elle marque un tournant radical dans la représentation collective du crime en série, et dans l’histoire des héros de la télévision. Dexter est le 1er héros (ou anti-héros) télé qui est, à la fois présenté comme un criminel, un tueur en série, et en même temps, un justicier. C’est un psychopathe, donc théoriquement nuisible pour la société, et ses actes criminels sont condamnables par la justice, et la morale collective. Pourtant, les créateurs de la série parviennent non seulement à susciter chez nous de l’empathie pour lui, voire même de la sympathie. Et, le plus paradoxal, c’est qu’ils parviennent, en plus, à nous le présenter comme indispensable à la justice. Pas la justice légale, mais la justice morale. Car, Dexter, tout tueur en série qu’il est , ne se concentre que sur les autres tueurs en série. Ceux, qui tout comme lui, ont des pulsions criminelles, mais qui sont plus malfaisants que lui, car eux, contrairement à lui, trucident sans vergogne des innocents, et parviennent, par leur génie, à échapper à la justice. Dexter, le criminel fait en sorte le nettoyage des « ordures » dont la Justice n’est pas parvenue à se défaire. Le crime soigné par le crime. Ce type de héros, le héros méchant, qui tue des bien plus méchants que lui, est un archétype qui, certes, existait auparavant au cinéma. The Punisher, apparaît pour la 1ère fois à l’écran, avec Dolph Lungren en 1989, puis Darkman apparaît en 1990, avec Ian Neeson. Mais les réalisateurs n’osaient pas vraiment représenter cet archétype à la télé dont le système de diffusion est beaucoup plus contrôlé. La sortie de la série Dexter, avec pour héros cet archétype très ambivalent, et très noir, représente un basculement radical de l'inconscient collectif. Il faut d'ailleurs attendre 11 ans après la série Dexter, pour que ce type de héros réapparaisse à la télé, en 2017, avec The Punisher. Et encore, Dexter est politiquement totalement incorrect dans le sens où il ne poursuit pas, contrairement au Punisher, Darkman, ou d’autres de ses collègues, une vengeance personnelle. Il ne le fait pas non plus dans un but de justice. Il commet ses crimes pour des raisons purement thérapeutiques. Son désir de tuer étant compulsif, il lui fallait pour continuer à l’assouvir, trouver un moyen de surmonter le sentiment de culpabilité que pourrait avoir toute personne "normale". Or Dexter veut être "normal". Lorsqu'il parvient à accéder à la normalité et à poursuivre ses meurtres, de nouvelles et nombreuses problématiques tout aussi passionnantes à étudier, vont se greffer les unes aux autres. Ainsi, se pose la question "comment pouvoir avoir des amis?". Puis "comment aimer et se faire aimer ?". Ensuite "Comment mener une vie de couple?". Ou encore "comment être un bon père?", et ainsi de suite....Outre les qualités de fond de la série, on peut aussi admirer, pour chacune des saisons, l'humour et la spiritualité des dialogues, et l’excellence des acteurs. Un régal total.