Park Chan-wook : rétrospective en huit films - Page 4

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"Ris. Tout le monde rira avec toi. Pleure. Tu seras seul à pleurer." Citation du film

De quoi ça parle ?

A la fin des années 80, Oh Dae-Soo, père de famille sans histoire, est enlevé un jour devant chez lui. Séquestré pendant plusieurs années dans une cellule privée, son seul lien avec l'extérieur est une télévision. Par le biais de cette télévision, il apprend le meurtre de sa femme, meurtre dont il est le principal suspect. Il est relâché 15 ans plus tard, toujours sans explication. Oh Dae-Soo est alors contacté par celui qui semble être le responsable de ses malheurs, qui lui propose de découvrir qui l'a enlevé et pourquoi.

Ce qu'il faut savoir

Pour son deuxième épisode consacré à la vengeance, Park Chan-wook décide d'adapter un manga japonais, Old Boy, de Nobuaki Minegishi et Garon Tsuchiya. Brutal et baroque, il signe alors film manipulateur qui distille les informations petit à petit pour induire le spectateur en erreur et le surprendre régulièrement. Commence alors un film coup de poing terriblement anxiogène grâce auquel le cinéaste a remporté son plus gros succès à ce jour. Dès les premières minutes, malgré le mystère qui entoure l'enfermement du protagoniste, tout laisse supposer à une histoire classique de vengeance. Pourtant, le récit évolue alors de telle façon que la question que nous nous posons ne soit plus "Qui ?" mais "Pourquoi ?".

Très vite, les éléments sortant de l'ombre accablent le personnage et contribuent à le salir, lui enlevant peu à peu son statut de victime. "Oh Dae-su parle beaucoup trop" dit à un moment du film l'antagoniste Woo-jin Lee concernant les raisons qui l’ont poussé à l'enfermer toutes ces années. Cette simple réplique semble alors définir le vrai propos du récit : il ne s'agit pas d'un film sur la rédemption mais d'un conte brutal sur les conséquences que doit affronter le coupable d'un crime affreux. Malgré ses quinze ans d’enfermement qui le changent considérablement, tant sur le plan physique que de la personnalité, Oh Dae-su est resté le même personnage lâche et irresponsable qu'il était au début du film et il n’échappera pas au poids de sa responsabilité.

Tel est pris qui croyait prendre

Puni par le plus horrible crime qui soit, il perd tout son sang-froid lors du face à face final et redevient l’être faible et suppliant, pathétique même, qu’il était au début du film. Dans un ultime élan de lâcheté, il ne voit comme seule solution à cette histoire déroutante l'auto-mutilation du véritable coupable : sa langue. La vengeance est finalement accomplie mais pas dans le sens où on l'attendait : Woo-jin Lee a fait souffrir son bourreau mais n'a pas soulagé sa peine. Oh Dae-su se retrouve, quant à lui, confronté aux fantômes du passé qui ressurgissent pour l’accabler. Dans un dernier élan de lâcheté, preuve qu'il n'a finalement jamais vraiment changé, il se fait effacer la mémoire pour oublier ses crimes et vivre paisiblement aux côtés de sa propre fille.

Old Boy a provoqué l'émoi lors du Festival de Cannes dont le président du jury cette année, Quentin Tarantino, a très vite scandé l'amour qu'il portait à cette œuvre. Récompensé par le Grand prix, il aura permis à Park Chan-wook de se faire connaître du grand public occidental et d'offrir à chacun de ses films, passés ou futurs, une mise en avant rarement accordé au cinéma coréen. Un remake a depuis été réalisé par Spike Lee avec Josh Brolin dans le rôle principal.

L'anecdote en +

Si la célèbre bagarre filmée en plan-séquence est devenue une scène culte, il faut savoir qu'à l'origine Park Chan-wook avait prévu un découpage beaucoup plus conséquent. Ce n'est qu'au moment de tournage qu'il a décidé d'improviser et de tourner toute la séquence en une seule prise.