Un huis clos lumineux
1943, Ukraine, Hugo a 12 ans. Pour le sauver de la déportation, sa mère le confie à son amie d’enfance Mariana, une prostituée qui vit dans une maison close à la sortie de la ville. Caché dans le placard de la chambre de Mariana, toute son existence est suspendue aux bruits qui l’entourent et aux scènes qu’il devine à travers la cloison…

Le réalisateur Emmanuel Finkiel adapte ici La Chambre de Mariana d’Aharon Appelfeld, roman à forte charge autobiographique qui explore, sous la forme d’une fable, la pulsion de vie dans un monde en ruine. Ce huis clos paradoxalement traversé de lumière semble construit comme le troisième volet du triptyque du cinéaste sur la mémoire de la Shoah, après Voyages, lauréat du César de la Meilleure première œuvre en 1999, et La Douleur, nommé 8 fois lors du festival de Cannes 2019.

Un rôle de virtuose
Pour incarner le personnage de Mariana, figure fantasque et tragique, Emmanuel Finkiel avait besoin d’une interprète capable de tout : de rire, de chanter, de pleurer, de danser entre les extrêmes. “Pour jouer ce personnage-instrument qui est parfois une flûte traversière, parfois une basse mélancolique, il me fallait une virtuose.”, explique le réalisateur.
Mélanie Thierry, déjà impressionnante dans La Douleur, relève ici un défi rare : incarner une Ukrainienne, dans la langue, le corps et même les silences. Elle se lance ainsi dans une préparation intensive pendant près de deux ans.

En laissant son jeu plonger dans un désespoir profond puis rebondir sur une démonstration d’amour pur en quelques fractions de secondes, Mélanie Thierry livre une performance qui transcende les mots, au service d’un personnage inoubliable.
Une œuvre sensorielle et symbolique
La Chambre de Mariana est plus qu’une adaptation littéraire : c’est un conte sur la survie de l’âme. En filmant le monde depuis le regard d’un enfant caché, Emmanuel Finkiel mise sur le hors-champ, les interstices et les sons. Les cadres, sublimes, deviennent essentiels. Les silences sont quant à eux assourdissants et la lumière est presque sacrée.

Hugo, joué avec une grande justesse par le jeune Artem Kyryk, devient le guide du spectateur dans cet espace mental où le désir de vivre devient plus fort que la peur. Grâce à Mariana, il découvre la beauté, la tendresse et tant d’autres choses vitales. Mélanie Thierry, dans cet écrin de douleur et de poésie, incarne la vie comme une promesse.
La Chambre de Mariana, drame historique puissant et émouvant, est à découvrir en salle dès maintenant.