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    Milla : "En Australie on reçoit plus d'argent si l'égalité homme/femme est respectée"
    Chaïma Tounsi-Chaïbdraa
    Chaïma Tounsi-Chaïbdraa
    -Journaliste streaming
    Experte en binge-watching et plateformes de streaming, Chaïma Tounsi s’amuse tous les soirs à zapper sa télécommande sur Netflix, Disney+, Canal+...

    AlloCiné a rencontré Shannon Murphy, la réalisatrice du très réussi Milla, lors du Festival de Marrakech en décembre 2019. Après de multiples reports, son long-métrage sort enfin au cinéma ce 28 juillet. Rencontre.

    AlloCiné : Le cinéma australien est l'un des plus vieux au monde. Qu'est-ce qui fait sa spécificité ?

    Shannon Murphy : Je dirais qu'il se démarque tout d'abord par son sens de l'humour, qui est  unique. On retrouve cela dans Milla. On arrive à explorer la comédie même dans des moments sombres. J'ajouterai que comme on est un pays insulaire, on a tendance à penser qu'on est à la traîne. Donc on fait tout pour être original (rires). Pour finir je dirais que nos paysages sont aussi différents : le bruit de la nature,  les animaux... Je trouve ça fascinant. Et puis on a des réalisateurs de tous horizons. Je suis heureuse que le Festival de Marrakech (en 2019 ndlr) leur offre une rétrospective.

    Milla est basé sur une pièce de théâtre qui s'appelle Babyteeth (dents de lait). Une métaphore qui est filée tout au long du film. Pourquoi ce choix de titre et quelle est sa signification ?

    J'ai adoré cette métaphore. C'est rare mais notre personnage possède encore une dent de lait. Quand tu regardes le film, tu penses comprendre sa signification jusqu'à une certaine scène. Quand elle la perd enfin, cela représente pour le personnage une véritable transition dans sa vie. Elle passe de l'enfant à l'adulte. Pour elle, c'est un moment de douleur mais aussi de joie. Cette dent de lait montre à quel point ses parents se sont accrochés à elle, l'ont surprotégée. Il fallait qu'elle soit elle-même et qu'elle découvre l'amour pour la première fois, afin qu'elle soit enfin libre. 

    Milla
    Milla
    Sortie : 28 juillet 2021 | 1h 58min
    De Shannon Murphy (IV)
    Avec Eliza Scanlen, Toby Wallace, Essie Davis
    Presse
    3,6
    Spectateurs
    3,7
    Voir sur Mubi

    Je trouve qu’il y a un rapport de proximité entre Milla (Eliza Scanlen) et le spectateur. Elle regarde d'ailleurs souvent la caméra. 

    Oui c'est vrai. J'ai voulu montrer le côté revigorant de la jeunesse, qui découvre les premiers amours. Plus le film avançait, plus j'ai voulu me re-concentrer sur le personnage de Milla, son esprit, sa force... Disons qu'elle a conscience de toutes ces choses qui lui arrivent.  Comme je le disais plus haut, le film est adapté d'une pièce de théâtre.

    Aviez-vous pensé à changer la fin ?

    Non, vraiment pas. Surtout que la pièce de théâtre débute justement sur la fin. J'ai juste changé cela. Cette fin est vraiment importante. Ce que j'aime dans cette histoire, c'est qu'elle est compliquée et difficile.

    Le film offre aussi une BO particulièrement réussie et travaillée.

    Oh merci ! C'était important parce qu'à cet âge, on est obsédés par la musique. Nos meilleurs souvenirs tournent parfois autour de ça. Il y a beaucoup de passion. Je voulais que le spectateur ressente à nouveau ce sentiment. On a travaillé vraiment dur pour trouver la BO parfaite. 

    Ben Mendelsohn y joue un personnage très humain et touchant, lui que l'on a plus l'habitude de voir dans des rôles d'antagonistes. Comment a-t-il rejoint le projet ?

    Je connaissais son agent et elle lui a proposé le script. C'était son premier rôle en Australie depuis Animal Kingdom. Ben l'a adoré, ça m'a rassuré (rires). Je dirais que c'était spécial pour lui parce qu'il n'a pas eu à jouer un personnage sombre ou antipathique. Et il est aussi père de famille, l'une de ses filles avait d'ailleurs l'âge de Milla. Il a pu se connecter au personnage. Et puis au-delà de ça c'est quelqu'un de très drôle. Donc je savais que l'aspect comédie serait facile à jouer pour lui.

    Memento Films Distribution

    Vous avez expliqué dans différentes interviews que vous regrettiez de voir si peu de réalisatrices. Il me semble qu'en Australie aussi vous militez pour l'égalité hommes/femmes.

    Oui, et d’ailleurs dans la grande majorité des productions, nous sommes sur une répartition hommes/femmes à 50/50, et à tous les niveaux : scénaristes, réalisateurs, costumiers... Je pense que c'est un sujet important à aborder. La diversité l'est tout autant. Ça devrait être la norme partout. Ceux qui ne participent pas à cet effort devraient rendre des comptes.  

    Quelles seraient les solutions ? 

    En Australie, on reçoit plus d'argent pour nos projets si l'égalité est respectée. J'espère que les gens le feront plus tard sans penser à ça. Le problème c'est que certaines personnes n'arrivent toujours pas à imaginer des femmes dans des postes importants. Aujourd'hui on donne la parole aux femmes pour qu'elles ne se laissent plus faire. C'est ce que je fais : je travaille toujours avec des scénaristes femmes parce que je les trouve meilleures.

    Propos recueillis à Marrakech le 1er décembre 2019.

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