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    Dans les tumultes de la Révolution

    "L'Anglaise et le duc" de Eric Rohmer est présenté ce vendredi hors compétition à Venise. Le cinéaste recevra un Lion d'or pour l'ensemble de sa carrière.

    Après La Marquise d'O en 1975 et Perceval le Gallois en 1978, Eric Rohmer s'attaque à nouveau à un film en costumes. Sous la Révolution française, l'ancienne maîtresse du prince de Galles, futur George IV, s'établit en France à la demande de son nouvel amant, le duc d'Orléans. Le cousin du roi Louis XVI est acquis aux idées révolutionnaires mais la jeune femme tentera de le dissuader de voter la mort du monarque.

    Grace Elliott, royaliste, amie de la reine d'Angleterre, n'hésite pas à dire ce qu'elle pense. "Vous croyez mener la Révolution mais c'est elle qui vous mène", lance-t-elle au duc d'Orléans. Du pont de la Concorde où s'entassent les cadavres, aux salons feutrés en passant par sa résidence secondaire de Meudon, la belle Anglaise nous fait vivre la Révolution en direct. Eric Rohmer prend alors la casquette de professeur et nous fait découvrir ou redécouvrir de façon très pédagogique cette période tourmentée. Mais aucun didactisme dans ce film. Il y a même du suspense lors, par exemple, de l'attente des résultats du vote pour l'exécution du roi. Suspense également lorsque Grace cache un proscrit dans son lit, et qu'une patrouille s'apprête à fouiller sa demeure...

    Monarchiste Eric Rohmer dans son portrait de cette belle Anglaise royaliste ? Il s'en défend. "Personnellement, je ne peux pas être attaché à la monarchie... La monarchie, même les descendants du duc d'Orléans ne tiennent pas à la rétablir !", explique-t-il à Télérama.

    Le projet de L'Anglaise et le duc est ancien. Il y a dix ans, Eric Rohmer découvre dans une revue d'histoire l'existence de Grace Elliott et de ses mémoires. L'article expliquait qu'on pouvait encore voir son hôtel particulier. "Je m'intéresse beaucoup aux lieux : le fait que cet hôtel existe encore, qu'on puisse le localiser, m'a particulièrement frappé. Et cela m'a donné l'idée d'un film", explique Eric Rohmer dans le dossier de presse de L'Anglaise et le duc. Pourtant, le cinéaste apprenait par la suite que l'article était inexact : le bâtiment était postérieur à la Révolution, ce qui n'a pas empêché Eric Rohmer de réaliser le film, l'envie de représenter Paris à l'époque étant restée intacte.

    Utilisation du numérique

    La Marquise d'O a été tourné en décor naturel et Perceval le Gallois en studio. Pour L'Anglaise et le duc, Eric Rohmer a eu recours à une technique novatrice : les personnages ont été incrustés sur des peintures grâce au numérique. Les tableaux ont été peints par Jean-Baptiste Marot suivant les indications du cinéaste. L'effet produit est étrange, puisqu'il donne au spectateur l'impression que les acteurs sont des éléments des peintures. Il permet cependant d'avoir une vision réaliste du Paris de l'époque.

    Eric Rohmer sera présent à Venise pour recevoir un Lion d'honneur récompensant l'ensemble de sa carrière, prix déjà obtenu par Alain Resnais. Pour Alberto Barbera, le directeur du Festival, il s'agira d'un moment fort. Eric Rohmer "réussit à se renouveler dans chacun de ses films, ajoutant une nouvelle brique à l'édifice de son oeuvre, une construction d'une rare cohérence et beauté."

    M-C.H.

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