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    Ça : "Pour nous, c'est d’abord un film dramatique et ensuite un film d’horreur"

    Dans un peu plus d'un mois, le clown-tueur vous invite à une nouvelle plongée dans les égouts de Derry et dans l'univers terrifiant de Stephen King. Rencontre avec son réalisateur Andrés Muschietti et sa productrice Barbara Muschietti.

    Warner Bros. France

    Studios Pinewood, dans la banlieue de Toronto. C’est ici que Warner Bros. a recréé de toutes pièces l’univers du roman culte de Stephen King : IT / Ça. Confiée au réalisateur Andrés Muschietti (Mamá), cette adaptation en deux parties (la première se focalisera sur les enfants, la seconde sur les adultes trente ans plus tard) est notamment portée par Bill Skarsgård dans le costume du clown dévoreur d’enfants Pennywise / Grippe-Sou. Un croquemitaine aux ballons rouges qui a établi ses quartiers dans un système élaboré d’égouts entièrement reconstitué en studios, tout comme la ville de Derry qui les surplombe s’ailleurs.

    Comme Heath Ledger qui revisita dans The Dark Knight le rôle du Joker immortalisé par Jack Nicholson, le comédien a la lourde tâche de réinventer l’interprétation de Tim Curry dans la mini-série de 1990. Nous assistons justement à une scène où le clown tue un jeune enfant qu’il a enlevé en le noyant dans les eaux putrides des égouts : Pennywise est parfois harnaché à un système élaboré de câbles lui permettant de surgir des eaux stagnantes puis de la survoler. Après tout, on flotte tous en bas…

    La vision du plateau est viscérale et torturée avec une pointe de claustrophobie. Et de coulrophobie, évidemment. Pour une version beaucoup plus sombre et sanglante. La visite des égouts est prévue le 20 septembre en France… En attendant, l’équipe nous tease la première partie du long métrage.

    AlloCiné : Comment est née l’idée de cette nouvelle version ?

    Barbara Muschietti : Je voudrais déjà clarifier le fait qu’il ne s’agit pas d’un remake. En fait, c’est la première fois qu’un film pour le cinéma est tiré du roman de Stephen King : avant c’était une mini-série, pour la télévision donc. Pour mon frère Andres et moi, c’est un beau rêve qui se réalise car nous étions fans du livre dans notre jeunesse. Pennywise est un monstre iconique et légendaire pour moi !

    "Ça" est un roman culte, mais surtout une mini-série culte pour toute une génération. Quelle pression cela représente-t-il pour un réalisateur de revisiter cette histoire ?

    Andrés Muschietti : C’était un rêve d’arriver sur ce projet, d’autant que je suis un fan de Stephen King et de ce livre en particulier. C’est vraiment un classique de la littérature d’épouvante. Et même si j’étais prêt à me replonger dans l’horreur après Mamá, je m’attaque ici à un monument du fantastique américain. La mini-série de 1990 a laissé une profonde empreinte sur moi et sur les spectateurs… donc ce n’est pas facile de relever le défi et de faire encore mieux.

    Est-ce que vous serez fidèle au livre ou prenez-vous des libertés ?

    Barbara Muschietti : Je veux rassurer les fans : notre but et de rendre hommage et d’être fidèle au livre ! Le livre est notre bible, et non pas la mini-série. Nous avons juste changé la période du livre pour que ceci se passe dans les années 80. Nous étions des enfants pendant les années 80, et c’est donc une période que nous gardons avec amour au plus profond de nous et qui de plus correspond bien à l’esprit de l’histoire. Pour nous c’est fascinant de revenir au cœur de l’horreur du livre, de ce clown monstrueux qui se nourrit de la peur des gens. C’est franchement effrayant ! Ce que j’aime avec mon frère, malgré toutes les petites crises que nous traversons pendant le tournage -on s’engueule même en Espagnol, ce qui rend l’équipe folle car ils n’ont aucune idée de ce qui se passe !(Rires)-, c’est qu’il sait ce qu’il veut : avec ce film, il voulait vraiment imaginer un monde troublant, déjanté, effrayant, comme l’univers suggéré par les mots de Stephen King. Et je crois qu’il y est arrivé. Lorsque vous plongerez dans ce monde dégoutant des égouts de Derry où vit Pennywise, je vous garantis des frissons comme vous n’en avez jamais ressentis. Si vous pensez que vous avez eu peur avec notre film Mamá, c’est certain que là vous allez vivre une expérience de mort imminente !

    Vous parliez de Mamá. Quelle différence faites-vous entre ce film et "IT / Ça" ?

    Barbara Muschietti : Outre le fait que Mamá était une histoire assez personnelle créée par Andrés et moi alors et qu’ici c’est le maître Stephen King qui mène le récit, je crois aussi que Mamá parlait d’un « monstre » malgré elle : Mamá n’était pas diabolique mais une créature incomprise, même par elle-même, et qui tentait de protéger ces jeunes filles. Alors qu’ici nous avons clairement un monstre plein de malice et extrêmement pervers. C’est un monstre sadique, qui n’a rien à voir avec Mamá. Difficile de s’attacher à Pennywise, de ressentir de la tristesse, alors qu’avec Mamá il y avait un émotion hors norme, on pouvait presque ressentir de l’empathie pour ce démon. Et puis il n’y a pas de limites à l’horreur que peut commettre Pennywise. Et il ne semble avoir aucun point faible. Cela rend donc cette créature encore plus effrayante, car on se sent démuni face à lui.

    Pourquoi est-ce que les Américains ont cette peur des clowns ?

    Barbara Muschietti : C’est vrai que pour moi qui viens d’Argentine, il n’y a pas cette phobie, cette peur des clowns. Chez nous, on a surtout des clowns tristes qui font rire. Je crois qu’aux Etats-Unis, la raison pour laquelle les gens ont peur des clowns… c’est Stephen King ! Le livre IT puis la série ont en quelque sorte déclenché une peur du clown. Les clowns ne sont de toute façon visuellement pas très chaleureux, donc c’est facile de faire peur en exagérant leur maquillage, leurs traits et de les transformer en créature fatales comme Pennywise.

    Parlez-nous du choix de Bill Skarsgård pour le clown maléfique : c’est difficile après Tim Curry de choisir un acteur pour ce rôle, non ?

    Barbara Muschietti : C’est vrai que Tim Curry était tellement « naturellement » effrayant que ce n’était pas facile de trouver un Pennywise parfait pour notre version. Nous avons fait un casting interminable et vu des centaines d’acteurs. C’était presque un cauchemar. Nous avons vu des acteurs connus et inconnus, des acteurs qui nous ont fait du Tim Curry, nous avons même eu des femmes postulant pour le rôle ! Mais quand on a eu Bill en face de nous, nous avons été immédiatement conquis. Il a une compréhension parfaite de cette créature : c’est un animal qui « joue » avec sa nourriture ! De plus il a un physique assez extraordinaire et presque enfantin, presque romantique, qui ajoute une couche d’inconfort lorsqu’il devient Pennywise. Préparez-vous à trembler !

    Est-ce que, comme la série, vous allez faire en sorte de rendre l’expérience plus réelle et plus viscérale avec moins de CGI et plus d’effets mécaniques ?

    Andrés Muschietti : Oui. Pour que l’on puisse bluffer le spectateur, il faut en fait mêler des méthodes d’effets spéciaux pratiques avec des effets visuels digitaux. La combinaison des deux écoles est toujours la meilleure solution. En même temps, comme la créature change de formes et d’apparences sans cesse, il est difficile de ne pas avoir recours à un volume important d’effets CGI. Sinon les transformations ne seraient pas très efficaces, du moins limitées comme c’était le cas dans la série. Même si la série, par son atmosphère et la présence presque malsaine de Tim Curry en Pennywise était tellement terrifiante que j’en ai encore des cauchemars !

    Sur un plan personnel, qu’apportez-vous à un film comme celui-ci ?

    Andrés Muschietti : La peur. Il faut absolument amener ses propres peurs, ses démons intérieurs. Sinon c’est un exercice de style futile et superficiel. Si vous avez peur et si vous transposez vos propres peurs, alors les gens vont ressentir votre effroi. La peur, c’est contagieux. Dans mon cas personnel, j’ai peur de la nuit comme quand j’étais un enfant. J’avais aussi peur de l’obscurité et des fantômes, des créatures de la nuit.

    Justement, quel est le défi pour faire peur avec ce film ?

    Andrés Muschietti : Le vrai défi, c’est de montrer suffisamment mais pas trop, pour créer une peur psychologique, reposant sur la paranoïa plus que sur la réalité. J’aime ne pas tout montrer à l’écran, car je crois que notre imagination est notre plus grand agent créatif de peur. Pennywise doit d’abord vous effrayer pour ensuite vous dévorer. Car si vous n’avez pas peur vous n’êtes pas à son goût ! Comme si la peur entrainait un changement de goût de votre chair et sang… On doit donc voir Pennywise. Et c’est un vrai défi de maintenir l’horreur alors qu’on va forcément s’habituer à le voir. Il nous faut donc trouver des circonstances en permanence pour effrayer le public.

    Comment s’organise la collaboration avec votre frère ?

    Barbara Muschietti : Je pense que nous formons un tandem hors norme. Et ce projet en particulier correspond totalement aux émotions et aux passions de mon frère pour le cinéma d’horreur. Je pense que tous les deux nous avons des démons intérieurs et cela se ressent dans la fabrication de ce film. C’est un film authentique avec des gens passionnés et impliqués à 100% dans le processus créatif, sans aucune retenue. Pour nous, c’est d’abord un film dramatique et ensuite un film d’horreur. C’est d’abord le portrait de ces sept jeunes qui tentent de trouver leur place dans la petite ville de Derry. Et ensuite c’est une sorte de chasse aux sorcières, après le monstre Pennywise.

    Le film se passe dans les années 80 : que représente cette époque pour vous ?

    Andrés Muschietti : C’est toute ma jeunesse. J’étais un jeune homme, comme les victimes de Pennywise. C’est ça pour moi les années 80, un retour à l’enfance, à l’innocence en quelque sorte. Les années 80 sont au cœur du film, un peu comme la série Stranger Things, dont nous avons d’ailleurs l’un des acteurs en la personne de Fin Wolfhard. C’est un jeune acteur plein de talent.

    Depuis le succès de la série Netflix "Stranger Things", il semble que nous soyons à nouveau dans un cycle où les jeunes sont au cœur de l’action, comme dans les années 80 justement avec "Les Goonies" ou "Stand By Me"…

    Barbara Muschietti : Je pense que voir sept jeunes personnes affrontant l’impossible donne un degré d’émotion que l’on n’a pas quand on voit un adulte combattant une créature semblable. C’est sans doute une vieille formule hollywoodienne de remettre les enfants au cœur des histoires, surtout avec de l’action et de l’horreur. Il s’agit sans doute aussi de mettre « l’enfant en nous » en avant, pour ainsi exorciser nos propres démons. Ce qui est intéressant pour moi, c’est également de comprendre le processus de confiance en soi et comment une « jeune âme », aussi sensible et vulnérable, arrive à s’armer de confiance, à revêtir une armure indestructible et à affronter toute horreur qui se met sur son chemin. Encore une fois, je ne pense pas que l’on atteint de tels sommets émotionnels avec un adulte et un parcours similaire.

    Parlez-nous de la création de la ville de Derry…

    Barbara Muschietti : Derry est un personnage à part entière. C’était donc essentiel de recréer cette ville presque grandeur nature. Derry est inspirée presque à 100% de Bangor, une ville de l’Etat du Maine si chère à Stephen King. Nous y avons donc été et ceci en plein mois de janvier sous des mètres de neige ! Nous y sommes restés une semaine, et c’est là que vit Stephen King. Ca a été très émouvant pour nous d’être dans « l’antre » du maître de l’Horreur. King supporte la ville avec des millions de dollars et il y est vénéré : il donne ainsi plus de 5 millions de dollars par an pour diverses associations ! Et tout le monde a une histoire sur ou avec Stephen King. Cette petite communauté nous a énormément éclairés sur la synergie, l’énergie qui doit régner dans la ville fictionnelle de Derry. Ce qui est intéressant à savoir, c’est que de nombreuses histoires de Stephen King sont nées d’un évènement ou d’une personne réelle de Bangor. Dans le cas de IT, Stephen King l’a écrit après la mort d’un jeune homme, torturé par des camarades de classe. Cela l’a poussé à imaginer la ville de Derry où Pennywise règne en maître de la peur et se nourrit de la peur des autres. C’est vraiment fascinant comme processus créatif, car c’est de l’horreur ancrée dans le réel et non pas une fable fantastique. A l’issue de cette semaine, nous avions en tête les « visions » nécessaires pour construire la ville de Derry ici, dans la banlieue de Toronto.

    Est-ce que vous avez rencontré Stephen King pour ce film ? S’est-il impliqué dans la mise en place du film, sur le tournage ?

    Barbara Muschietti : Non et ce fut son choix. Il ne veut en aucune sorte se mettre sur la route des réalisateurs et producteurs qui adaptent ses livres. Cela parait étrange mais il adore uniquement écrire les livres et ensuite il aime laisser les cinéastes recréer l’univers qu’ils ont imaginé à partir de la lecture des romans. Il n’a pas d’implication sur notre film. C’est sans doute dommage, mais c’est son choix et nous le respectons.

    Que pouvez-vous nous dire de la deuxième partie ?

    Andrés Muschietti : J’espère que ce premier opus marchera car j’ai parfaitement en tête le second volet des aventures de Pennywise avec un parallèle entre les années 80 et les années contemporaines dans lesquelles nous vivons. Alors, espérons que tout se passe bien… Dans tous les cas je vais déjà me concentrer sur ce premier film, et j’espère bien vous effrayer.

    "Ça", en salles le 20 septembre

    "Ça", en salles le 20 septembre

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