Ce véritable "ovni" du cinéma américain commence par un plan remarquable où l'on voit apparaître le personnage interprété par Burt Lancaster, venu de nulle part et courant à grandes enjambées vers une somptueuse villa du Connecticut. C'est là que débute un surprenant périple où cet homme mystérieux, va prendre conscience de la fragilité de son existence et de la fatalité de la vie.
Il s'apprête à rejoindre à la nage sa villa, en traversant chaque piscine de son voisinage. Perry puis Pollack, seront derrière la caméra pour filmer cet étrange film. La mise en scène très kitsch, haute en couleur, avec des ralentis poussés à l'extrême, fait encore plus ressortir le côté superficiel d'une société bourgeoise américain vide de sens et statique, figée dans une époque par peur de découvrir un avenir dont elle ne connaît pas l'issue.
Les préjugés raciaux (la scène ou Lancaster sans s’en rendre compte blesse moralement le chauffeur afro-américain de l’un de ses voisins) et sociaux (la scène de la grande party entre autres) de cette "Amérique", sont surlignés au fil des rencontres que Lancaster va faire lors de son périple. Chaque personnage est plus individualiste et méprisant envers lui, lui qui représente l'échec après avoir connu la réussite. La longue traversée qu'il entreprend n'est qu'un prétexte pour dénoncer les travers d'une « Amérique » de plus en plus individualiste et qui ne laisse pas de place à ce qui ne sont plus au sommet de la pyramide sociale. Cet homme, qui a jadis fait parti de cette société, se rend compte un peu plus à chaque nouvelle rencontre, de l’inconsidération et de l’indifférence dont il faisait preuve vis-à-vis de son entourage. Lui qui croyait avoir tout réussi, n’avait en fait réussi que socialement, et ce confort matériel le protégeait des autres et le rendait aveugle. Désormais, il a raté sa vie personnelle, perdu tout ce qu’il avait, dont sa famille. C’est cette lente descente vers la dure réalité de ce qu’il a été encore hier, qui sera la chose la plus difficile à accepter. Il s’humanisera sans doute au fil du film mais il est trop tard, perdu à jamais dans son désespoir et sa solitude. Son personnage représente bien sûr une métaphore de la haute société américaine.
« The Swimmer », de par son ton désenchanté et pathétique, sa construction narrative inhabituelle pour ce genre de production et la beauté de ses images, n’en finira pas de hanter la mémoire des cinéphiles. A voir absolument.