Jack est un film qui pourrait franchement virer au ridicule le plus lourd vu son histoire. Un enfant dans le corps d’un adulte qui va à l’école en CM2, on pourrait voir venir le nanar. Mais bon, c’est quand même Coppola derrière la caméra, on se doute bien qu’il ne va tout de même pas nous servir une comédie ridicule et lourdingue.
Jack est un film de qualité, certes parfois inégal, et qui n’évite pas une tonalité un peu guimauve, mais qui s’avère tout de même bien maitrisé et réussi.
D’abord je dois reconnaître que Robin Williams livre une prestation de haut vol. Je ne suis pas loin de croire que c’est la meilleure de sa part que j’ai vu jusqu’à maintenant. Il entremêle avec une vraie finesse le comique et le sérieux, et parvient idéalement à se glisser dans la peau d’un gamin de dix ans, imposant beaucoup d’humanité et se rendant sympathique de suite. Il faut avouer qu’il évolue dans le registre qui lui sied typiquement. Autour de lui des seconds rôles assez inattendus ! Jennifer Lopez, qui étonne en professeur des écoles, et s’avère aussi d’une grande subtilité. Ses échanges avec le héros sont très beaux par exemple. Bill Cosby hérite aussi d’un rôle secondaire, et Diane Lane campe la mère de Robin Williams. On pourra aussi admirer la très charmante Fran Drescher, dans un rôle qu’on imagine un peu lourd au début, mais auquel elle apporte naturel et fraicheur. Les acteurs, même les jeunes, sont tous très bien dans leurs rôles, et c’était important dans un film comme celui-ci.
Le scénario part donc sur une idée originale : suivre un homme qui vieilli quatre fois plus vite que les autres à ses dix ans. On le verra donc fréquenter l’école, se faire des amis, chercher l’amour, et puis aussi se rendre compte de la nature de son problème. Le film n’est pas forcément parfait. Il reste tout de même très gentillet, un peu convenu, le héros ne rencontrant finalement que des amis et il y a des passages attendus. Le film se concentre plutôt sur les petits détails amusants mais anecdotiques de cette présence adulte étrange au sein d’une école. On passe du match de basket à l’achat facilité de magasines érotiques, des scènes qui sont souvent drôles et bien emballés par Coppola, mais qui montre que le film a choisi un chemin assez confortable. Mais c’est rythmé, pas ennuyeux, la fin est réussie, et il faut avouer que Jack dégage tout de même une poésie mélancolique d’un bel effet, puisque le spectateur à l’inverse du héros n’est pas dans l’ignorance de son destin à brève échéance.
Visuellement Coppola signe un film élégant, doté d’une mise en scène habile. Il suit à merveille ses acteurs, saisit leurs expressions discrètes, bref, fait un joli film intimiste d’où se dégage, avec pourtant peu d’effets une atmosphère singulière. La séquence d’ouverture pose d’ailleurs bien le côté légèrement excentrique, décalé et poétique du film, qui pour autant reste bien ancré dans le quotidien de son époque. La belle musique de Kamen vient sans doute apporter une pierre non négligeable à cette ambiance suave et poétique.
Jack est un conte moderne qui pourra sûrement paraître trop gentil, trop timide, n’ayant finalement abordé pratiquement que les points optimistes dans la vie de Jack, et ne s’étant pas trop acheminé sur ses difficultés, ses doutes, même s’ils apparaissent un peu. Maintenant il y a de bons acteurs, Coppola livre un film agréable, et ça reste un divertissement intelligent et touchant. 3.5