Voir "Délivrance" confirme ma première impression sur le cinéaste John Boorman. Celui-ci ne fait pas du grand cinéma, il fait du divertissement. Mais, et c'est là que son cinéma se démarque, il le fait débarrassé de tous ses excès, ses vulgarités, ses sentiments faciles, sa violence gratuite et tout le spectaculaire auxquels Hollywwod nous à habitués progressivement, jusqu'à la saturation complète d'aujourd'hui. C'est pour cela que les films de Boorman ("La forêt d'émeraude" et "Délivrance", ceux que j'ai vus) ne vieillissent pas, car le cinéaste n'a pas succombé à cette surenchère idiote et imbécile du toujours plus. Le cinéma américain de ces dernières décennies, en allant toujours plus vite (ces derniers temps, je n'arrivais même plus, physiquement, à regarder ce cinéma, l'épilepsie me guettant), toujours plus loin, toujours plus fort (on montre un peu plus de sang, de sexe, d'effets spéciaux, de situations ahurissantes, etc), nous a rendus insensibles à l'excès. Nous avons tout vu, nous sommes allés toujours plus loin dans l'horrible, le pathétique, le déjanté... Au final, c'est parce qu'on y retrouve la mesure, le plausible, la lenteur de la vie réelle qu'on réapprécie un film comme "Délivrance", qu'on peut enfin à nouveau ressentir les sensations recherchées, au lieu d'être continuellement exaspérés. C'est le spectaculaire, le toujours plus, qui nous laissent désormais insensibles. "Délivrance" n'est pas un chef d'oeuvre, ce n'est même pas véritablement un bon film, c'est juste ce que le cinéma de divertissement à l'américaine aurait toujours du rester, s'il n'avait pas succombé à cette fuite en avant stupide et mortifère.