Après Paperboy, pas franchement bien reçu, Lee Daniels renoua avec le film à Oscars en espérant la même réussite que Precious. Ici, il décide de parler d’Eugene Allen (renommé Cecil Gaines), un majordome de la Maison Blanche.
Au-delà du simple biopic bêta et hagiographique auquel on aurait pu s’attendre, Lee Daniels et Danny Strong décident de parler de la ségrégation et de broder autour de l’histoire d’Eugene Allen afin de toucher plus de personnes. Et cela donne de l’ampleur à un récit passionnant qui est en fait une biographie de deux personnes, Cecil Gaines et son fils Louis, qui passe par tous les courants de pensée afro-américaines : le révérend Lawson, les Black Panthers, Martin Luther King… Ceci qui sonne donc comme didactique est parfaitement réussi par Lee Daniels qui parvient à ne pas être démonstratif et tout en retenue, malgré les nombreux moments émouvants (sans jamais être larmoyants) qui jalonnent le film.
C’est bien simple : dès les premières minutes, le ton est donné. Le Majordome est un vrai drame familial et historique, une fresque jamais misérabiliste mais toujours édifiante, qui enchaîne les acteurs et les figures historiques en contre-emploi (David Banner en père aimant, Jesse Williams en professeur et gourou, Clarence Williams III en vieil homme sage, une flopée d’excellents acteurs comme James Marsden, Alan Rickman ou John Cusack en Présidents des Etats-Unis…) sans jamais s’en servir comme gimmick. Le film se concentre donc sur ces deux héros qui ont, chacun de leur côté, fait autant pour la lutte contre la ségrégation, tout en faisant graviter quelques personnages passionnants autour d’eux. Le tout est parfaitement interprété par Forest Whitaker et David Oyelowo, exceptionnels et qui devraient récupérer quelques récompenses méritées à la fin de l’année. On retrouve aussi Oprah Winfrey, Lenny Kravitz et Cuba Gooding Jr. (quel plaisir de le revoir au cinéma !), tout aussi bons.
Mis en musique avec le même soin apporté au scénario et à la réalisation (cette chanson de Dinah Washington…), Le Majordome est un film sublime, important et indispensable pour tout le monde et qui réussit là où Ali ou même Malcolm X s’étaient un peu cassé les dents : parler de la ségrégation de manière convaincante, intuitive et immersive. Bravo et merci, messieurs.