Elles sont âgées entre 13 & 18 ans et vivent en banlieues parisiennes ou dans les quartiers nord de Marseille. Elles se livrent face caméra sur leur rapport aux autres, leur adolescence ou encore leur identité.
Hélène Milano (Château rouge - 2025) pose un regard très tendre et hyper-réaliste sur ces jeunes filles qui ont toutes pour point commun de vivre en vase clos, dans des cités. Elle les questionne sur leur rapport à la France, leur relation à la langue de ce pays qui les a vu naître et dont certaines doivent aussi jongler avec la langue maternelle et/ou paternelle. Il y est aussi question du machisme qui gangrène leur quotidien (il n’est pas chose aisé de se faire respecter dans une cité où les garçons tiennent le mur et font la loi), de leur regard par rapport aux garçons et ce sentiment d’exclusion.
Il est très intéressant de voir comment (et pourquoi) ces jeunes filles ont été contraintes d’adopter le langage (et l’apparence) des garçons pour pouvoir exister (et se faire respecter). Elles parlent toutes le langage des cités, avec une véhémence qui leur est propre. Certaines revendiquent même être devenues des garçons manqués, afin de masquer leurs formes qui commençaient à se développer à l’adolescence. Comme un masque qui les protège.
« C'est plus un bouclier qu'une arme. »
Elles ont beau être jeunes, elles sont d’une grande maturité et n’hésitent pas à nous expliquer que le seul moyen qu’elles ont trouvé pour ne plus se laisser faire, c’était de devenir un garçon, en adoptant leur tenue vestimentaire, ainsi que leur manière de s’exprimer, car aucune faiblesse ne leur sera acceptée. Elles savent à quel point les garçons dans les cités, ont tout pouvoir et peuvent en un rien de temps, créer de toute pièce la réputation de tel ou untel.
Il en ressort un constat assez édifiant de la situation de ces jeunes filles dans les cités, qui ne devraient pour rien au moment, devoir adopter les codes masculins pour pouvoir se sentir exister. En centrant uniquement son film sur les filles, la réalisatrice délaisse volontairement les garçons, afin de mieux les retrouver à travers son prochain film (Les Charbons ardents - 2019).
Tourné comme un banal reportage pour le petit écran, la valeur de ce documentaire tient à sa volonté de prendre à revers l’image néfaste des banlieues diffusées par les médias en mettant en avant la condition féminine difficile dans ces quartiers des régions parisiennes et marseillaises. La série de témoignage de jeunes adolescentes sur leur quotidien ne fait qu’effleurer de loin chacun des thèmes susceptibles d’être intéressants à traiter (communautarisme, violence sexuelle, rapport entre religion et féminisme…), et ce du fait du manque de recul des intervenantes, bien que certaines d’entres elles s’avèrent très clairvoyantes. Des interviews des garçons et des parents auraient permis un travail bien plus approfondis sur ces problèmes de société.
Ces filles sont formidables, et le sujet est important. Malheureusement, on sort de ce film avec une impression d'un sujet tout juste abordé, et très consensuel finalement (au sens bobo du terme)… Quid de la parole des mères ? Quid de la parole des garçons ? Ça aurait été indispensable d'avoir ces temoignages là. Sans parler de la confusion entre la banlieue parisienne et les quartiers marseillais, j'ai pas compris pourquoi y'a ces deux poles de temoignages. Et au niveau de la forme, les images sont laides, c'est vraiment dommage. Et la musique inutile et omniprésente… Vraiment dommage.
Un docu remarquable par la qualité des témoignages de ces jeunes adolescentes courageuses: on imagine le travail relationnel réussi par la cinéaste en amont de ces images! Un docu qui évite les écueils du "qui trop embrasse mal étreint" parce qu'il reste sur cette unique approche : qu'est-ce qu'être/devenir fille dans certains milieux: des" quartiers" de grandes villes de France), qui évite la polémique mais offre aux spectateurs des vérités sur les conditions de vie sociale. La cinéaste ne réponds pas aux questions que soulève ces témoignges et c'est tant mieux! Pour une fois, la pensée du spectateur est libre et je suis sortie changée de ces images et de ses mots entendus. Formidable!
Ne vous fiez pas à son affiche (assez décevante), "Les Roses noires" est un film admirable, que j'ai eu la chance de voir en avant-première. Il y a là des visages, des mots, comme je n'en avais jamais vu ni entendu sur un écran de cinéma (ou de télévision). C'est un miracle d'avoir réussi à faire surgir, je dirais presque "accoucher", une telle vérité, et on sent bien la relation de confiance qui a dû s'établir entre la réalisatrice et les adolescentes. Du reste c'est un film dans lequel se manifeste un vrai point de vue de cinéaste, tant dans la manière profondément éthique dont sont menés les entretiens, que dans la beauté étonnante de tous les plans "de transition".