Le début du film se situe à l’été 1943, et semble faire référence à la bataille de Koursk. C’est là, sur le front, un jeune tankiste russe, qui a brûlé dans son char détruit par les Tigres allemands, est retrouvé par la troupe. Malgré ses blessures normalement létales, il survit et s'en remet miraculeusement. Il souffre d'amnésie rétrograde et semble habité par un mysticisme hors du commun. Son char aurait été détruit par le Tigre blanc, un char nazi gigantesque à la puissance de feu incroyable, qui surgit de façon improbable, se jouant des marécages et autres pièges, prenant les troupes blindées à revers et les détruisant les uns après les autres sur le son particulier de son canon, avant de disparaître comme par miracle, dans la brume… ce qui n'est pas sans rappeler une tactique mise en exergue dans l'histoire du tankiste allemand Michael Wittmann, ainsi que le projet de char démesuré "Maus"/Panzer VIII, conçu par Ferdinand Porsche sur une commande d'Hitler).
La légende est née.
Celui qu’on appelle désormais Ivan Naïdenov dit entendre les chars, et aussi ressentir la présence du Tigre blanc, et n’a qu’un but, une obsession : le traquer et le détruire. Il passe pour un fou, un illuminé, mais son commandement, convaincu par le 6ème sens qu’il semble posséder depuis qu'il a survécu à l'impensable, lui assigne un équipage et un T-34 spécial avec l’ordre de trouver et de détruire le Tigre blanc... qui n'a pas encore révélé tous ses secrets... Les scènes de combats de char sont d'ailleurs filmées avec un total réalisme et surtout sans jamais s'enliser dans le larmoyant... on se croirait vraiment au coeur des combat. Pourtant, mélanger le militaire avec le mystique, le film de guerre avec le fantastique, est un pari ultra-risqué, remarquablement réussi par le réalisateur russe Karen Shakhnazarov. Il s'est basé sur le roman d'Ilia Boïashov, "Le tankiste", qui décrit des batailles contre des chars fantômes. Enfin, la bande-son est occupée par Wagner, malheureusement un peu trop timidement exploitée. Ceci dit, les acteurs, inconnus en Europe occidentale, sont eux aussi très convaincants, notamment Alekseï Vertkov dans le rôle principal. Bref, une belle réussite.
Outre l’histoire fantasmagorique, c’est un film qui se regarde comme un docu-fiction sur la guerre. On est en 1943 et les soviétiques sont en train de prendre le dessus sur l'envahisseur nazi. Malgré les défaites sur le front de l’Est, Hitler s’entête, mais l’Armée Rouge, qu’il prenait pour une bande de paysans bolchéviks mal armés, est bien supérieure en nombre et bien plus déterminée. La suite, on la connaît.
Si on peut trouver le découpage du film un peu hâché et la fin un peu bâclée, au final, l'1h40 passe bien quand on s’intéresse un tant soit peu à l’Histoire. Si on regrette que sur la fin,
on quitte les champs de combat, que la scène de la signature de la capitulation des Allemands n’apporte rien à la thématique du film, et que le monologue d’Hitler guère non plus, elle aide cependant à
une certaine réflexion sur le pourquoi de la guerre, de cette guerre, quelles ont été les conséquences de la folie des grandeurs d'Hitler sur l'Histoire, et appelle à se documenter.