John Carrol Lynch, dont c'est le premier film ici, porte un nom qui ne parlera, sans doute, qu'aux cinéphiles les plus avertis et pourtant il doit bien faire parti des visages les plus connus des seconds couteaux américains. Que ce soit dans le "Fargo" des frères Coen, le "Zodiac" de Fincher ou encore le "Shutter Island" de Scorsese, Lynch porte sa bonhomie à travers nombre de classiques outre-Atlantique. Mais cette fois, c'est derrière la caméra que l'homme se distingue dans ce très joli portrait d'un vétéran au crépuscule de sa vie. Et pour une première, c'est plutôt réussi.
Qui plus est que le personnage central de cette histoire est incarné par un autre second couteau très apprécié des cinéphiles. Harry Dean Stanton ("Alien, le huitième passager", "Paris, Texas", "Christine", ...) incarne Lucky, un nonagénaire toujours fringuant malgré les années et les paquets de cigarettes quotidiens. Il mène tranquillement sa barque en solitaire dans une petite ville perdue au milieu du désert jusqu'à ce qu'un malaise sans raison apparente vienne perturber sa quiétude.
"Lucky" est l'un de ces films magnifiques qui souffrent d'ambitions trop modestes, que ce soit dans sa durée ou ses seconds rôles, mais qui parvient tout de même à nous faire passer un excellent moment en compagnie d'un personnage haut-en-couleur. A travers ses diverses rencontres et interactions avec les habitants et autres gens de passage, le film de Lynch est une très belle réflexion sur les années qui passent et le sens du mot futur lorsque l'on a parcouru la quasi-totalité du chemin. Subtil, nostalgique et doux, l'histoire de Lucky est un pied-de-nez aux plus pessimistes tant le personnage, malgré un corps marqué par la vieillesse et les âges, se révèle être un indestructible philosophe soucieux de voir le bon côté de chaque chose.
Véritable voyage initiatique vers les dernières années de l'existence humaine, "Lucky" marque, espérons-le, un début de carrière prometteur et surprenant de la part de l'une des gueules de cinéma des années 90-2000.