Bon, alors pour le coup je ne pige absolument pas la cabale généralisée contre ce film. D’accord c’est très amateur, mais en même temps j’aimerai vraiment connaitre le budget de ce métrage : 3 euros et un sandwich ? Pour ma part, j’ai trouvé cet ensemble bien agréable et différent.
D’abord les acteurs ne sont pas si mauvais. Certes de Turckeim surnage dans la première partie, et l’on sent un sérieux différentiel de talent, mais Isabelle Goguey, un peu faiblarde au début finit clairement par s’emparer de son rôle, et livre une prestation ingénue et touchante. Elle essaye vraiment de bien faire, et convainc sans difficulté lorsqu’elle s’occupe de ses anciens. Les anciens justement qui sont tous des cas particuliers (j’adjoins le gardien), assez réussis. Les personnages ne sont pas mauvais du tout, avec une tentative toutefois relativement maladroite de leur donner de la consistance (les déboires sentimentaux du gardien par exemple), et les interprètes quoique parfois en surjeu, sont bien inquiétants. Donc un point très honorable pour un casting d’anonymes.
Le scénario est sympa lui aussi. Bon c’est vrai il y a des longueurs, le film peine un peu à rebondir à mi-parcours, et c’est naïf. Mais on sent plein de bonne volonté. L’histoire se démarque d’abord. Pas de spectaculaire outrancier, le film instaure une ambiance, essaye même d’établir des sentiments, des échanges, un réalisme de bon alois teinté parfois d’un surréalisme à la Rollin qui fait un mélange étonnant. A noter aussi une fin à laquelle je ne m’attendais pas du tout et qui a de l’allure. Pour ma part La nuit de la mort m’est apparue comme un film avec de bonnes idées, pas toujours bien développée mais qui ont au moins le mérite d’être les siennes, et il y a plus d’un film avec un budget monstrueux qui préfère repomper sur les autres.
La mise en scène est inégale. Honnêtement pendant la majeure partie du film je n’ai pas trop de chose à dire, Delpard se débrouillant honorablement, avec des maladresses. Il y a tout de même de bonnes idées, notamment la séquence des vieux avançant dans le couloir frontalement qui à un coté assez impressionnant tout de même vu leurs tronches. En revanche il y a un passage d’action sur la fin bâclé de chez bâclé. Je comprends que Delpard n’est pas trop eut recours à des scènes nerveuses dans son film, car là impossible de faire plus mauvais. Faux raccord sur faux raccord, scènes incompréhensibles, montage à l’arrache, pendant deux ou trois minutes c’est un summum de bouillie filmique. Dommage, mais ce n’est que trois minutes. Les décors comme la photographie sont gris et froids, tristes et déprimants. Mais une maison de retraite dans les années 80 ca ne devait pas être beaucoup plus réjouissant, et ca apporte une ambiance singulière à ce film délicieusement déprimant. Coté effets visuels, ouïe ! Là il y a droit de rigoler car c’est d’une puissante médiocrité, avec mousse et jus de tomate à tous les étages pour finalement assez peu de séquences horrifiques. Il y a quand même un cadavre vers la fin qui a une certaine allure. La musique est très particulière. Elle est signée d’un grand compositeur, Petitgirard, certes vers ses débuts. Elle est très présente, et il est impossible de faire plus saignant pour les oreilles. C’est terriblement strident et dissonant. Mais c’est excellent. L’effet avec les images est garanti, et rien qu’à écouter le cœur palpite, vos membres tremblent, vous vous crispez, honnêtement je vous conseille de mettre votre son à fond et je vous garantie de sérieuse sensations.
Au final La nuit de la mort est un bon film, tout à fait regardable, plaisant, à condition bien sur de le juger objectivement, en tenant compte de ses très faibles moyens, de son casting d’anonyme, et du faible écho du fantastique en France ce qui ne rend que plus méritoire cette tentative de Delpard. D’autant plus que le film a de réelles qualités à faire valoir, à la première d’entre elle pour un petit film de passionné : la générosité. La nuit de la mort ne se moque pas du spectateur, et cherche à lui offrir un film plus intelligent que bien des séries B de luxe actuelles, en faisant au mieux avec presque rien. 3.5