Si j'aime Clint Eastwood ? Bien sûr, je l'adore autant en tant qu'acteur (particulièrement dans la trilogie du dollar mais aussi dans ses propres films) que comme réalisateur. Si j'aime les westerns ? Bien sûr, la trilogie du dollar me fait jubiler par moment à la limite de l'orgasme et je prends mon pied à me délecter encore et encore de ces merveilles de Leone sans aucune lassitude... Mais je ne crache pas non plus sur des classiques du genre avec les John Wayne ou Charles Bronson.
Mais je ne m'attendais absolument pas à cela... Avec Impitoyable, titre prometteur, Clint Eastwood prend à contre-pieds et déchire l'image d'Epinal du "Western" en mille morceaux, il détruit le genre. Oubliez tout ce que vous avez pu voir jusque là !
Certes les images sont magnifiques, les paysages, les couleurs, on en prend plein les yeux et les décors sont très réalistes avec ce petit bled de Big Whiskey sans doute typique de ce que pouvait être un petit bled à l'époque. Le scénario est assez classique de ce que peut proposer Eastwood dans ses films mais colle bien avec l'ambiance western. Le casting est superbe, avec Morgan Freeman et Gene Hackman, qui sont toujours aussi plaisants à regarder. Mais même si il y a de la violence
(la prostituée qui se fait lacérer le visage, le shérif qui dérouille des hommes désarmés dont le fameux "Duc")
, on est très loin de l'ambiance western habituelle au cinéma... C'est long... Très long avant d'entendre un coup de feu... Et les dialogues sont d'une platitude... Tout comme les personnages à vrai dire, sauf ce brave Gene Hackman qui sort son épingle du jeu en shérif autoritaire et débonnaire. On attend la confrontation et elle met du temps à venir dans une scène finale qui tranche et, au final surprend par rapport au reste du film.
En fait, Eastwood a réalisé un western extrêmement réaliste, je crois, de ce que pouvait être le terrain et la vie de l'époque. Dans les décors mais aussi dans l'histoire et les personnages. Le jeune frimeur qui aimerait être une légende, les crapules d'une autre époque désormais repenties qui trainent le poids des ans, le shérif débonnaire qui démonte la légende d'une grande gachette de l'Ouest, les prostituées maltraitées et mal considérées, des petits malfrats, et le reste de la population sans grand intérêt... En vrai, l'Ouest américain devait assez ressembler à ça quand on y pense. En tout cas, plus que les images d'un héros blanc américain comme John Wayne ou ce qu'a voulu nous raconter Sergio Leone dans chacun de ses films ou chaque protagoniste était très spécial et particulier. Ici point de héros, point de sauveur charismatique, point de courage, point de face à face, point d'as de la gachette... A moins que ?
J'ai été tellement surpris par le déroulement du film que ça m'a un peu déçu, encore une fois le titre était si prometteur... Sans les dix dernières minutes (
à partir du moment où nos deux amis apprennent que Ned a été pris par le shérif
), avec une scène finale comme un sursaut qui détonne par rapport au reste du film, j'aurais mis une étoile de moins. Et tout l'hommage de Clint à Sergio tient finalement en cette seule scène, parce que c'est là qu'on retrouve un peu de sa patte. Pour moi cette scène relève à elle seule l'intérêt du film. Encore faut-il tenir jusque là sans s'endormir avant, mais je crois que ça vaut quand même le coup...