Une série qui a déjà l'avantage de son originalité (surtout pour les trois premières saisons, j'y reviendrai par la suite), et le principe de l'anthologie permet une certaine liberté dans le visionnage des épisodes, chacun pouvant se visionner comme un moyen-métrage, voire un film pour certains épisodes qui dépassent les 1 heure.
La thématique, ou plutôt les thématiques restent les mêmes : notre lien avec les écrans, et surtout ce que les écrans ont changé dans notre relation avec les autres. Car la série est centrée sur notre relation à l'autre, c'est en ce sens une série parfaitement en phase avec notre époque, qui en mettant l'accent sur nos travers, nous interroge sur nos comportements, et ce que l'on considère comme "allant de soit" : telle que la notation permanente de nos prochains, quand on sort d'un restaurant, du visionnage d'un film ou d'une série (tiens), quand on fait un covoiturage...
Le défaut principal de l'anthologie, c'est une certaine répétition des situations, car on recommence de zéro à chaque nouvel épisode, donc impossible de "creuser" à partir de la fin de l'épisode précédent. Et dans le même registre de l'anthologie, il y a aussi le caractère presque impératif d'une chute à chaque fin d'épisode, un 'twist" qui souvent m'a déçu, et qui semble être là seulement pour mettre un point final à l'histoire. Le problème, comme dans les épisodes "White Bear" ou "Blanc comme neige" (White Christmas), c'est que le twist final casse une ambiance, un monde qui avait été créé et auquel on avait donné sa crédibilité. J'aurais préféré que certains épisodes gardent à la fin une part de mystère... Mais pour d'autres, comme dans le pilote "National Anthem", on est proche de la perfection, et contrairement à beaucoup de critiques qui trouvent que "Shut Up And Dance" est l'épisode le plus perturbant de la série, je trouve plutôt en réalité que National.. est une référence au niveau du malaise qu'il peut générer chez le spectateur. Car ici, le héro n'est pas trouble, c'est quelqu'un de normal auquel tout le monde peut s'identifier... Et la situation à laquelle il doit faire face nous met d'autant plus mal à l'aise. Cet épisode est sans doute le plus simple d’accès au premier abord (pas d'éléments de science fiction, rien qui fasse référence à une technologie futuriste), mais c'est je crois l'un des plus efficaces, et qui marque le plus durablement les esprits.
Un autre aspect que je souhaite rajouter : même si les épisodes sont indépendants les uns des autres, il y a des éléments, comme des clins d'oeil qui reviennent d'un épisode à l'autre. L'exemple de la chanson de "15 millions de mérites" qui revient dans une autre saison, dans une autre situation, interprétée par de nouveaux personnages, nous indique aussi que finalement, tout est lié. Et que peut-être Black Mirror peut se regarder comme une sempiternelle variation sur l'inadaptation de l'humanité face aux nouveaux outils qu'elle a créée.
Le sujet principal qui parcourt la série, c'est le transfert de conscience, qui apparaît dès le premier épisode de la saison 2, et qui est rabaché - sans grand intérêt il faut dire - dans l'ultime épisode de la saison 5. Dans Bientôt de Retour, la mise en scène de cette idée est une vraie réussite, dans Black Museum ça semble plus être un recours pour parvenir à faire un nouvel épisode.
Il faut regarder la saison 1 pour ce qu'elle propose de différent, les saisons 2 et 3 pour la maîtrise de la réalisation.. Et les deux autres saisons si l'on est fan. J'avoue que pour ces deux dernières saisons je n'ai pas tout regardé. Et quand on touche au sublime avec "San Junipero" (épisode 4 de la saison 3), on ne peut être que déçu par la suite...