Amis dans la vie, Michael Angelo Covino et Kyle Marvin sont également amis dans "The Climb", qu’ils ont écrit ensemble et que le premier a réalisé. Une amitié très particulière, dont le caractère toxique perçait déjà dans le court-métrage au même titre, d’une durée de 8 minutes, réalisé un an auparavant. Ce premier long métrage a obtenu un coup de cœur du Jury de la sélection Un Certain Regard de Cannes 2019 et le Prix du Jury au Festival du cinéma américain de Deauville 2019.
« The climb » : l’ascension. C’est bien par une ascension que débute ce film, celle d’un col par deux cyclistes. A dite vrai, pour toute personne ayant pratiqué l’arrière pays de la Côte d’Azur, ce début de film apporte une surprise énorme surtout si c’est à vélo qu’on a sillonné cette région. En effet, on entre dans un film américain et, en cinq secondes chrono, on reconnait le dernier kilomètre de la montée du col de Vence, un col qu’on connait dans ses moindres détails. La surprise passée, on pourra constater que le film lance d’autres clins d’œil à notre pays, en particulier dans le domaine cinématographique : un extrait de Le grand amour de Pierre Etaix, par ci, une courte apparition de Judith Godrèche par là, dans le rôle d’Ava, l’épouse de Mike. Bref, Michael Angelo Covino et Kyle Marvin, sont de fins connaisseurs du cinéma français et ils se revendiquent autant de la Nouvelle Vague, de Claude Sautet et de Bertrand Tavernier que de Woody Allen, auquel ils sont souvent comparés.
Mais revenons à nos deux cyclistes et à cette première séquence, l’ascension à vélo du col de Vence, peut-être la meilleure du film, en tout cas la plus emblématique. Alors que cette montée de près de 10 kilomètres va bientôt se terminer, les deux amis sont toujours ensemble, mais on ne met pas beaucoup de temps à constater que Mike est un bien meilleur cycliste que Kyle, quelque peu en surpoids. Et c’est justement parce qu’il ne craint pas d’être rattrapé par Kyle que Mike balance alors, avec une grande perversité, la relation qu’il a eue avec la fiancée de son ami. Une perversité qui va jusqu’à introduire un quiproquo qui n’a rien d’anodin entre la durée de cette relation et la distance qui reste à parcourir pour arriver au col. « How long » ? 2 kilomètres, mon ami ! Un film drôle, cruel, mais également élégament dramatique, avec le chapitre suivant qui nous parle d’un enterrement avec, à la fin, les fossoyeurs noirs qui entonnent « We shall not be moved ».
Ce premier long métrage de Michael Angelo Covino est particulièrement inventif dans sa forme et on ne peut qu’apprécier la qualité de la mise en scène et des dialogues ainsi que par la variété des humeurs qu’il présente : drôle, corrosif, dramatique, cruel. Le passage d’un chapitre à l’autre pourra présenter un problème pour certains spectateurs, l’arrivée se faisant chaque fois brutalement, sans préparation, avec souvent de nouveaux personnages dont on ne sait rien et pour lesquels il faut un certain temps pour comprendre qui ils sont. Pour les autres spectateurs, nul doute que ce côté surprenant puisse au contraire représenter un plus.