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    "Je ne me sentais pas capable de le faire"... Pourquoi Guillaume Labbé a accepté le rôle dans Les Yeux Grands Fermés sur TF1
    Lucie Reeb
    Lucie Reeb
    -Journaliste séries
    Passionnée de séries depuis son plus jeune âge, elle regarde de tout, mais garde une place particulière dans son cœur pour les séries pour ados.

    Guillaume Labbé est ce lundi soir à l'affiche de "Les Yeux Grands Fermés", une fiction coup de poing dans laquelle il donne la réplique à Muriel Robin. Pour l'occasion, AlloCiné s'est entretenu avec le comédien.

    Dans Les Yeux Grands Fermés, qui est diffusé ce lundi 2 octobre à 21h10 sur TF1, Guillaume Labbé incarne Stéphane, un père de famille, qui va être suspecté par sa propre mère, campée par Muriel Robin, d’être incestueux envers son fils.

    Dans ce téléfilm écrit par Emilie Clamart-Marsollat, le comédien se glisse dans la peau d’un personnage à contre-emploi, bien loin des rôles qu’il a pu jouer dans Plan Coeur et Je te promets. Pour l’occasion, AlloCiné a rencontré Guillaume Labbé afin de parler des Yeux Grands Fermés et de ce qui l’a convaincu de participer au projet.

    Les yeux grands fermés
    Les yeux grands fermés
    Sortie : 2 octobre 2023 | 1h 30min
    De Clément Michel
    Avec Muriel Robin, Guillaume Labbé, Pauline Etienne
    Spectateurs
    3,0
    Voir sur TF1+

    AlloCiné : Qu'est-ce qui vous a attiré dans le rôle de Stéphane dans Les Yeux Grands Fermés ?

    Guillaume Labbé : Ce qui m'a attiré, c'est ce qui m'a repoussé. Quand j'ai lu le scénario, je me suis immédiatement dit que je ne pouvais pas le faire, parce que c'était impossible de comprendre ce personnage, de l'aimer. Et c'est justement ça qui m'a attiré.

    J'ai lu la note d'intention de l'autrice (Emilie Clamart-Marsollat, ndlr), et ça m'a donné envie. Le fait qu'il y ait Muriel Robin qui joue m’a aussi donné envie. Je me suis dit que le projet allait être bien fait.

    Le challenge a été de comprendre, de ressentir et de me demander comment une telle chose est possible. Je ne sais pas si j'ai réussi, mais c'était une plongée dans un truc horrible et intéressant à la fois.

    Ce qui m'a aussi attiré c'est l'idée que nous puissions faire parler de ce sujet important et ainsi d'aider ne serait-ce qu'une personne, c'est quelque chose d'assez fou.

    Comment s'est passé le casting ? Est-ce que vous n'avez pas pris peur en voyant le rôle ?

    On m'a proposé le scénario, que j'ai lu, et que j'ai refermé immédiatement car je ne me sentais pas capable de le faire. Pas parce que c'était mal écrit, ou parce que je ne trouvais pas ça bien, ou que je n'y croyais pas ou que je n'avais pas envie de jouer ce personnage.

    Je trouvais l'histoire très bien, mais c'était impossible. C'est forcément un rôle qui fait peur. Il fallait que je trouve une cohérence. Pour trouver une cohérence, il fallait que je comprenne le personnage.

    Quand j'ai lu le scénario, je me suis immédiatement dit que je ne pouvais pas le faire, parce que c'était impossible de comprendre ce personnage, de l'aimer. Et c'est justement ça qui m'a attiré.

    Ce que j'aime faire quand je joue, c'est de me mettre réellement dans la peau du personnage. Je me demande toujours quelle partie de Guillaume est ce personnage. Le personnage est comme une partie de moi.

    Et dans le cas de Les Yeux Grands Fermés, il fallait que Stéphane soit une partie de moi. C'était un peu vertigineux de chercher à savoir quelle partie de moi aurait pu être blessée comme il l'a été.

    TF1
    Eden Lopes

    Comment vous êtes-vous préparé pour le rôle ? Avez-vous rencontré des associations ?

    J'ai été beaucoup aidé par l'autrice. Elle connaît très bien son sujet. J'ai aussi lu beaucoup de rapports et d'études sur le sujet. Il n'y en a pas eu beaucoup sur les pères incestueux. J'ai trouvé une étude qui a été faite au Canada, où ils sont allés en prison pour interroger ce genre de personnes. C'est ce qui m'a aidé à voir quel type de gars, quel profil psychologique j'allais jouer, lequel se rapprochait potentiellement du personnage, lequel je pourrais incarner et lequel servait le plus le propos de l'autrice.

    Je ne voulais pas faire un pervers narcissique qui n'a aucune émotion. Et en même temps il fallait que je joue quelqu'un qui nie alors qu'il est coupable, et qui manipule les gens. Il y a différentes façons de manipuler.

    Soit tu manipules en sachant ce que tu fais, dans le but de ne pas te faire prendre, soit, comme dans le cas de Stéphane, tu as une sorte de dissociation, et tu crois réellement que ce que tu fais n'est pas mal. C'est dans cette direction que nous sommes allés.

    Comment s’est déroulé le tournage avec Eden Lopez, qui joue le petit Adrien ? Comment fait-on pour tourner ce genre de film avec un enfant ?

    Nous avons beaucoup discuté en amont avec sa mère, qui était présente sur le tournage, pour savoir ce qu'elle lui avait dit. Nous n'avons jamais parlé du sujet tous les deux. Je savais que sa mère lui avait tout expliqué : ce dont parle le film, le sujet...

    Mais avec lui, je ne suis jamais rentré dans le sujet. Je ne voulais pas que, quand il joue quelque chose, il joue la peur de l'attouchement. C'était aidé par le réalisateur qui donnait à Eden des actions concrètes.

    Il lui disait par exemple "là tu es triste et tu parles doucement parce que tu n'as pas envie de faire du bruit". Il ne disait pas "tu n'as pas envie de faire du bruit parce que tu ne veux pas que ton père entre dans la chambre". Cette manière de travailler a beaucoup aidé.

    Et puis, quand les caméras étaient éteintes, nous jouions beaucoup ensemble sur le plateau. On faisait du foot, on rigolait, on racontait des blagues. On s'est beaucoup amusé, ce qui a permis d'alléger les journées. Il a fallu bien lui expliquer, mais c'est le travail des coachs présents sur le plateau, que quand la caméra est coupée, c'est la vraie vie qui commence. C'est d'ailleurs la même chose pour les adultes.

    Comment s’est passée la collaboration avec Muriel Robin, et votre relation mère/fils ?

    Ça s'est très bien passé. Je ne la connaissais pas personnellement et je la trouve vraiment très forte. J'aime aussi bien son talent de comédienne, que sa personne en elle-même. Elle est à la fois sensible et très forte en même temps.

    Il y a un mélange de beaucoup de choses chez elle qui m'attire. Quand on s'est rencontrés, ça a été très simple et naturel. C'est aussi un des éléments qui m'a fait accepter ce rôle. Je savais que Muriel Robin n'allait pas faire un téléfilm sur l'inceste qui jouerait sur les peurs des gens pour faire de l'audience.

    Je savais que ça serait une fiction engagée. Et encore une fois, dans la note d'intention de l'autrice, on comprenait qu'il y avait une vraie volonté de parler d'un sujet qu'elle porte depuis très longtemps.

    TF1
    Muriel Robin et Guillaume Labbé

    Le téléfilm suggère l’inceste plus qu’il ne le montre. Pourquoi ce choix ? Est-ce dû à l’heure et à la chaîne de diffusion ?

    Il y a une double raison à ça. La première, c'est qu'il fallait qu'il y ait toujours un doute. Nous devions être du point de vue de la mère. C'était un choix de ne pas me suivre moi, le père, de ne pas savoir ce que je fais de mes journées.

    On ne me suit pas par exemple quand je m'en vais de la chambre, parce que le téléspectateur aurait des infos. Et il ne faut pas qu'on ait ces infos. Et après, je pense que ça aurait été trop violent de montrer.

    Je savais que Muriel Robin n'allait pas faire un téléfilm sur l'inceste qui jouerait sur les peurs des gens pour faire de l'audience. Je savais que ça serait une fiction engagée.

    Peut-être que ce serait nécessaire de le montrer dans d'autres fictions, mais je pense que c'est inmontrable. Et c'est peut-être le problème justement. C'est une question qu'on se pose toujours. Dans Irréversible, quand ils montrent le viol, on se demande toujours si c'est quelque chose de nécessaire. Avec l'inceste, je me pose la question.

    Nous comprenons au fil du téléfilm que votre personnage est à la fois un bourreau et une victime. Pourquoi c'était important que ce personnage ne soit pas juste un méchant ?

    Il a un passé, une histoire. C'était intéressant parce que ça permettait de mettre l'accent sur le fait qu'il est important d'ouvrir les yeux et d'oser en parler. C'est le gros problème dans ce genre d'affaires. Les gens n'en parlent pas. Ce sont souvent les éducateurs ou les gens en contact avec les familles qui parviennent à déceler l'inceste.

    Il fallait donc montrer que, si on n’en parle pas, il y a de grandes chances pour que la violence soit répétée et que ça détruise d'autres vies. Ce que j'aime dans ce film, c'est qu'il y a une ouverture. On sent qu'un après est possible.

    Mais à titre personnel, même si mon personnage n'avait pas été une victime, j'aurais cherché quelque chose pour le rendre humain. J'aurais trouvé une faiblesse. Et la réalité, c'est que 100% des bourreaux ont eu une enfance difficile. C'est ce qu'on a découvert avec les études sur les tueurs en série. On ne naît pas avec un monstre à l'intérieur. Pour moi, les gens qui ont été maltraités, maltraitent les autres.

    Est-ce qu'il y a une scène qui vous a particulièrement marquée lors du tournage ?

    La scène la plus difficile à jouer et celle où je vais lui dire "bonne nuit". Elle est très courte mais on entre dans le vif du sujet. C'est la première fois qu'on était dans un rapport tactile. C'est une tendresse qui va déborder jusqu'à tuer psychiquement quelqu'un. C'était une scène difficile à tourner parce qu'on se projette dans quelque chose qui est horrible.

    Dans un autre registre, il y avait aussi des scènes de pur plaisir parce qu'il y avait des émotions fortes. Je pense par exemple à la scène à la fin quand ma mère me fait passer mon doudou et que tout à coup, mon personnage se rend compte qu'il a été une victime.

    Il accepte enfin que son père qui était vu comme un dieu pour tout le monde, l'a maltraité. D’un coup, tout remonte en lui. En tant que comédien, et en tant qu'homme, cette scène est géniale à jouer.

    TF1
    Muriel Robin

    Dans un registre complètement différent, vous serez très prochainement à l'affiche de Escort Boys, une série pour Prime Video. Pouvez-vous nous parler un peu du projet ?

    C'est une série adaptée d'une fiction israélienne. Ruben Alves en sera le réalisateur. J'y joue un homme parti de sa Camargue natale pour devenir comédien à Paris, qui revient chez lui suite à la mort de son père.

    Ce dernier était devenu apiculteur, mais il ne gagnait pas d'argent. Je reviens parce qu'il y a ma petite sœur qui vit là-bas et qui va être placée si on ne parvient pas à avoir de l'argent. Je me rends compte rapidement que, financièrement, c'est la merde. Et je découvre qu'un des hommes qui travaillait avec mon père fait des passes, et que ma petite sœur et mon père étaient au courant.

    Prime Video annonce Escort Boys, une série sexy et solaire avec Guillaume Labbé [EXCLU]

    Mon personnage va remettre sa morale en question avec cette découverte. Mais comme j'ai besoin d'argent, je vais accepter de façon temporaire de devenir escort avec mes trois meilleurs amis.

    C'est une série qui va beaucoup aborder la sexualité masculine, qui, en dehors des comédies, est très peu discutée. Les hommes ne parlent pas beaucoup entre eux de la sexualité, et on va donc voir qu'il y a plein de façons différentes d'aborder le sujet. La série est drôle et sexy. J'ai vraiment hâte qu'elle sorte.

    C'est enrichissant de jouer des personnages complètement différents dans chacun de vos projets ?

    C'est génial. Jusqu'à présent, j'ai vraiment eu de la chance, car on me propose toujours des rôles très différents les uns des autres. Je me dis souvent "c'est pas possible, pourquoi on me propose ce rôle ? Je ne suis pas ce personnage."

    Et puis je travaille le rôle et je comprends. Au début, c'est vertigineux parce que je n'ai pas confiance en moi. Puis après on voit comment on peut jouer le personnage. C'est cool de faire des rôles différents.

    Est-ce que vous avez d'autres projets ?

    Je serai dans une série Arte qui s'appelle Machine qui est réalisée par Fred Grivois. C'est un projet très spécial, qui, je l'espère, arrivera au printemps. J'ai hâte de voir ce que ça va donner. Et j'ai d'autres projets qui vont arriver, mais je ne peux pas encore en parler.

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