Palme d'or à Cannes 2025 : qui est Jafar Panahi, cinéaste iranien interdit de sortie de territoire pendant 14 ans ?
Mégane Choquet
Mégane Choquet
-Journaliste
Journaliste spécialisée dans l'offre ciné et séries sur les plateformes quel que soit le genre. Ce qui ne l'empêche pas de rester fidèle à la petite lucarne et au grand écran.

Il a reçu la Palme d'or lors de la 78ème édition du Festival de Cannes pour le film "Un simple accident" : qui est le cinéaste iranien Jafar Panahi ?

JACOVIDES-MOREAU / BESTIMAGE

A l'issue de la 78ème édition du Festival de Cannes, le Jury présidé par Juliette Binoche a remis sa Palme d'or 2025 au film Un simple accident de Jafar Panahi. Tourné en clandestinité en Iran, ce drame intense et bouleversant raconte la révolte politique à travers un évènement banal. Ses personnages y voient leur destin basculer après un accident sur la route.

Un simple accident
Un simple accident
De Jafar Panahi
Avec Vahid Mobasheri, Maria Afshari, Ebrahim Azizi
Sortie le 1 octobre 2025

Habitué du Festival de Cannes, le cinéaste iranien a reçu la Caméra d'or pour son tout premier film, Le Ballon blanc, il y a déjà trente ans. En 2011, il est récompensé d'un Carrosse d'or à Cannes pour l'ensemble de son oeuvre. Sept ans plus tard, Jafar Panahi obtient le Prix du scénario pour Trois visages.

Cette année, le cinéaste iranien accède à la récompense ultime, la Palme d'or, pour Un simple accident. Ce prix récompense son nouveau long-métrage, mais aussi la vie, l'oeuvre et le combat, comme l'a souligné Juliette Binoche.

"Nous sommes ici, avec tous ceux qui souffrent, non par opinion politique, mais par le cœur, par la compassion, la tendresse, par une humanité partagée, pour la liberté, est retrouvé", a déclamé la Présidente du jury.

"L'art provoque, questionne, bouleverse. Il désarçonne l'ancien et surprend une dimension insoupçonnée en nous. L'art mobilise l'énergie créatrice de la part la plus précieuse, la plus vivante en nous. Une force qui permet de transformer les ténèbres en pardon, en espérance, en vie nouvelle. C'est pourquoi nous avons choisi, pour la Palme d'or, Un simple accident de Jafar Panahi".

Jafar Panahi

Jafar Panahi, réalisateur iranien qui revient d'un long combat et toujours en lutte

Né en 1960 à Mianeh en Iran, Jafar Panahi, fils d'un peintre en bâtiment, a grandi dans les quartiers déshérités de Téhéran. Après des études de réalisation au Collège de Cinéma et de Télévision de Téhéran, Jafar Panahi réalise plusieurs courts et moyens métrages pour la télévision de son pays.

C'est dans les années 1990 que le cinéaste se lance dans la réalisation de longs-métrages, remarqués en festivals, à Cannes, à Locarno ou encore à Venise. Au fil de ses films, son cinéma est considéré comme subversif par le régime iranien.

En 2010, Jafar Panahi est accusé de propagande contre la République Islamiste. Il fut alors condamné par la justice iranienne à 6 ans de prison ferme pour propagande contre le régime. Invité à faire partie du jury officiel au Festival de Cannes, il est retenu par les autorités iraniennes à la prison d'Evin. Une chaise vide à son nom est installée symboliquement à côté du jury tout au long du festival.

Placé en liberté surveillée et interdit de sortie de territoire, Jafar Panahi continue de réaliser des films clandestinement, à l'aide d'autres cinéastes dissidents et combatifs, pour interroger la condition du cinéma iranien et le régime iranien.

Le réalisateur est de nouveau arrêté à l'âge de 62 ans en 2022. La Cour suprême a annulé la condamnation et a ordonné un nouveau procès. Il ne sera libéré que 7 mois plus tard après une grève de la faim et de la soif pour protester contre les conditions de sa détention dans la prison d'Evin.

JACOVIDES-MOREAU / BESTIMAGE

Il fut libéré sous caution le 3 février 2023. Jafar Panahi n'a pu quitter l'Iran pour la première fois depuis près de 14 ans, que fin avril 2023 pour un séjour en France où vit sa fille, après délivrance d'un passeport par son pays.

Le discours tourné vers l'espoir de Jafar Panahi, suite à sa Palme d'or

"C'est difficile de m'exprimer. Merci. Permettez-moi de remercier ma famille. Je vous remercie. Pour tout le temps où je n'étais pas présent avec eux. Je remercie toute l'équipe qui m'a accompagné sur ce chemin pour qu'on fasse le film ensemble.

Je remercie aussi l'équipe française qui m'a accompagné pour la post-production, Philippe Martin des Films Pelléas, Alexandre Mallet-Guy de Memento, et aussi Mk2, notre distributeur international.

Il n'aurait pas été possible de faire ce film sans une équipe engagée. Je m'adresse à tous les Iraniens et Iraniennes, peu importent leurs opinions diverses, et au monde, et je me permets de leur demander une chose.

Mettons tous nos problèmes et nos différences de côté. Le plus important, en ce moment, c'est notre pays et la liberté de notre pays. Essayons d'arriver à un moment où personne ne doit nous dire ce que l'on doit porter comme vêtement, ce que l'on doit dire et ce que l'on ne doit pas faire.

Le cinéma est une société. Personne ne doit nous dire ce que l'on doit faire ou ne doit pas faire. Espérons que ce jour arrive. Merci à toutes les personnes présentes et merci au Festival de Cannes."

Le film "Un simple accident" de Jafar Panahi sortira au cinéma le 10 septembre 2025.

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