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    Rencontre avec Ulrich Seidl pour "Paradis : amour"

    Rencontre avec le sulfureux cinéaste autrichien Ulrich Seidl autour de son "Paradis : amour", présenté en compétition du dernier Festival de Cannes.

    AlloCiné : Beaucoup de gens voient en vous un cinéaste provocateur. Quelle réponse apportez-vous à ce jugement ?

    Ulrich Seidl : Je ne me vois absolument pas comme un cinéaste provocateur. Je ne me dis jamais, lorsque je prépare un film, que je dois à provoquer les gens. Ce n'est absolument pas du tout mon but. En revanche, je me vois davantage comme un observateur. Je cherche à évoquer des tabous sociaux dans notre monde. Je cherche également à dépeindre des relations, des rapports intimes dans nos vies quotidiennes qui, elles, sont provocatrices.

    Il y a beaucoup de ces relations intimes dans "Paradis : amour", un film sur le manque d'amour, sur la détresse amoureuse et sexuelle...

    Paradis : amour est un film sur la quête d'amour, la quête de tendresse, la quête de sexualité. Il s'intéresse à des femmes d'un certain âge qui sont, pour des raisons sociales, obligées d'aller chercher ailleurs l'assouvissement de leurs désirs. Elle partent à la recherche de jeunes hommes noirs, car notre société ne leur offre pas la possibilité de trouver ce qu'il leur faut chez nous. Le fait de dépeindre cette quête, en soi, n'est pas triste. D'ailleurs, je pense qu'il y a beaucoup d'humour dans le film.

    Paradis : amour / © Happiness Distribution

    Un mot sur le casting, qui n'a pas du être aisé à mettre en place.

    Le processus de casting de Paradis : amour a été très long et difficile. Il était important que les actrices sachent de quoi il s'agissait, qu'elles voient tout de suite dans quoi on s'embarquait. Il aurait été impensable de faire un casting, d'être prêt à faire, par exemple, des scènes de sexe entre une femme blanche et un jeune homme noir, sans savoir vraiment si la comédienne était prête, disponible pour jouer de telles scènes. C'est pour cela que, bien longtemps avant le tournage, je suis allé en Afrique avec plusieurs des comédiennes possibles pour travailler avec elles, voir comment elles réagissaient sur place, comment elles se laissaient aller avec les jeunes comédiens noirs. C'était très important. Les scènes du films étaient très souvent crues, il s'agissait de scènes intimes, il fallait voir qui était vraiment à l'aise pour jouer ce que je recherchais.

    Le film est le premier d'une trilogie. Pouvez-vous nous en dire plus ?

    Au départ, il ne devait s'agir que d'un seul et même film, qui raconterait en parallèle trois histoires différentes. Trois histoires qui porteraient sur deux femmes autour de la cinquantaine et la fille de la première. Cela dit, j'ai tourné environ 80 heures de rushs pour Paradis : amour, et à la table de montage, il s'est avéré que le meilleur résultat artistique était de faire trois film plutôt qu'essayer de tout tisser dans un seul et même film-fleuve de six heures. Mon approche cinématographique est surtout de ne pas exécuter le scénario tel qu'il existe. Ce n'est pas l'idée. Je me laisse influencer par le tournage, par ce que je vis. L'histoire se développe, évolue, s'oriente selon ce qui se passe durant le tournage. Des choses fonctionnent, d'autres non, et cela détermine la suite du tournage. Une fois en salle de montage, j'essaie de réécrire le film, d'en faire quelques chose d'encore différent de ce que j'avais écrit au début.

    Entretien réalisé par Clément Cuyer durant le Festival de Cannes 2012

    La bande-annonce de "Paradis : amour" :

    Paradis : amour

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