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    "Broadchurch", le bilan de la saison 2 : pari réussi ou suite inutile ?

    Attendue au tournant après son excellente première saison qui ne nécessitait pas forcément une suite, "Broadchurch" a-t-elle réussi son pari ? Voici notre bilan de la saison 2...

    Colin HUTTON - © ITV and Kudos Film & Television Limited
    Il y avait un garçon, il s'est fait tuer. J'ai attrapé l'assassin. Mais alors pourquoi suis-je toujours ici ?

    Dès la bande-annonce, David Tennant alias Alec Hardy donnait le ton. Pourquoi une saison 2 de Broadchurch ? Avons-nous vraiment envie de la voir et de potentiellement gâcher l'émotion encore vivace procurée par la première ? Celle-ci aurait très bien pu se suffire à elle-même.

    Oui mais voilà, le succès mondial de la "petite" série anglaise en a fait une marque : les US ont eu leur version, Gracepoint, qui a fait un flop; la France aura bientôt la sienne, Malaterra, avec Nicolas Duvauchelle, Simon Abkarian, Constance Dollé et Louise Monot... Il était inconcevable pour ITV de ne pas prolonger l'aventure et ça tombe putôt bien puisque le créateur, Chris Chibnall, jure que c'était son objectif depuis le départ, avec une idée qui lui trottait déjà dans la tête quant à l'intrigue avant même que la saison 1 ne soit commandée.

    On sait désormais qu'il y aura même une saison 3 ! Mais maintenant que la diffusion de la 2ème est terminée chez nous, quel bilan en tirer ?    

    Vous n'avez pas encore vu la saison 2 ? Regardez cette bande-annonce et arrêtez tout de suite la lecture de cet article !!

    Le procès de Joe Miller tient-il la route ?

    Globalement, oui. A défaut d'être totalement crédible dans son déroulement -quelques points laissent franchement à désirer- le procès a le mérite d'être extrêmement bien mené par les scénaristes, qui le rythment de révélations, de cliffhangers et d'émotions fortes.

    Les deux avocates opposées, incarnées par les excellentes Charlotte Rampling et Marianne Jean-Baptiste, nous offrent des duels au sommet, intenses et révélateurs sur un système judiciaire où les stratégies les plus vicieuses ont souvent tendance à triompher sur la vérité. Tout le monde sait Joe Miller coupable mais il parvient malgré tout à s'en sortir au nom du "doute raisonnable". Rageant, mais hautement symbolique. On déplorera toutefois la mise en scène ridicule avec laquelle l'exil de Joe est traité dans le dernier épisode. 

    En voulant s'intéresser également à la vie privée des avocates, de leur relation tumultueuse passée à leurs tourments individuels actuels, les scénaristes ont sans doute été un peu trop gourmands et ambitieux. Par manque de temps essentiellement -huit épisodes, c'est finalement si peu- ils n'ont pas véritablement pu les explorer de manière naturelle et logique. Le résultat laisse donc à désirer et frustre plus qu'il ne passionne.

    L'intrigue policière Sandbrook était-elle indispensable ?

    Non. Et c'est bien de ce point de vue que Broadchurch a raté sa saison. En voulant garder un élément d'enquète policière pour ne pas trop perturber le téléspectateur -c'est en tout cas ainsi que l'on peut analyser ce choix- c'est tout l'inverse qui s'est finalement produit. Revenir sur l'affaire qui hantait déjà en saison 1 Alec Hardy avait du sens, d'autant que cela a permis d'explorer enfin les démons du personnage, mais peut-être davantage au cours d'une troisième saison qu'en parallèle du procès de Joe.

    Au-delà de la schizophrénie inconfortable que cela a pu créer auprès d'une partie du public, ballader d'une scène à l'autre d'une histoire à l'autre, les deux affaires ne se rejoignent jamais, donnant le sentiment d'un grande manque d'unité tout au long de la saison. On finit par s'en désintéresser, en partie à cause du couple central, très caricatural au point d'en devenir tout sauf crédible. Et puis on a déjà connu James d'Arcy et Eve Myles bien meilleurs ailleurs.

    Les différents rebondissements ne convainquent pas et accentuent ce sentiment de malaise. On nous avait habitué à plus de rigueur et d'intelligence dans l'écriture et le traitement des sentiments humains. Par conséquent, le dénouement laisse relativement indifférent, de même que le sort des personnages.

    Alors, pari réussi ou suite inutile ?

    La suite n'était certainement pas utile, et le pari n'est pas vraiment réussi. Mais Broadchurch n'est pas passée en l'espace d'une saison de magnifique à mauvaise série. Elle a perdu en originalité, en puissance émotionnelle -laquelle ne semble plus que reposer sur la bouleversante Ellie, toujours incarnée à la perfection par Olivia Colman- mais elle a su garder sa beauté grâce au soin apporté à ses décors, sa bande-originale et sa photographie, et son sens de la mise en scène et du cliffhanger. Broadchurch reste une série d'exception, qui marque puis qui manque.

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