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    Mort de Suzy Delair, chanteuse et actrice pour Clouzot et Jeanson

    La comédienne et chanteuse Suzy Delair est décédée à 102 ans ce 16 mars 2020. Elle avait partagé son talent entre les caméras des cinéastes des années 30 et 60 et les scènes d'opérettes et de music-hall. Elle était la doyenne des actrices.

    D.R.

    Ses parents, de modestes artisans, souhaitaient qu’elle devienne sage-femme, mais dès son plus jeune âge, la petite Suzanne Delair se passionne pour le théâtre et rêve de monter sur les planches. Elle apprend ainsi le métier de modiste dans un atelier parisien puis le quitte pour faire de la figuration dans le film Un caprice de la Pompadour, tourné par Willi Wolff et Joe Hamman en 1930. Elle fait ensuite des apparitions anonymes pendant 10 ans, dans des œuvres diverses et variées tournées par des réalisateurs de renom : La Dame de chez Maxim's (1932) d’Alexander Korda, Poliche d’Abel Gance et La Crise est finie de Robert Siodmak en 1934, ou encore Prends la route de Jean Boyer en 1936.

    Sur scène... pour chanter !

    Parallèlement à sa carrière de comédienne, elle s’essaie également à la chanson, se produisant aux Bouffes-Parisiennes ou aux Folies-Bergères, entre autres lieux de music-hall. Elle se fait ainsi remarquer par Suzy Solidor, chanteuse française très connue à l’époque et obtient un juteux contrat en vue d'effectuer des prestations musicales sur différentes scènes de prestige de la ville parisienne. Après ce premier tournant dans sa vie professionnelle, Suzy Delair se distingue : l’un de ses admirateurs se nomme Henri-Georges Clouzot. Il la recrute pour jouer aux côtés de Pierre Fresnay dans Le Dernier des six, dont il écrit le scénario. Dirigé par Georges Lacombe, ce long métrage permet à Delair d’être enfin considérée à sa juste valeur sur grand écran, dans le rôle d’une parisienne spontanée, gouailleuse, râleuse et surtout empoisonnante. Le film connaît une suite, cette fois dirigée par Clouzot: dans le désormais classique L'Assassin habite au 21, Suzy Delair reprend son personnage de Mila-Malou. L’actrice devient la compagne de Clouzot, lequel la redirige dans un autre de ses plus célèbres films, Quai des orfèvres, où elle interprète une jeune chanteuse manipulatrice. Elle y tient tête à Louis Jouvet et à Bernard Blier.

    Les cinéastes français se l'arrachent

    Mêlant les registres et proposant tantôt des prestations comiques, tantôt dramatiques, Suzy Delair est également au générique de La Vie de bohème (1945) tourné par Marcel L'Herbier, de Copie conforme (1947) de Jean Dréville, de Pattes blanches (1949) de Jean Gremillon et de Souvenirs perdus (1950) de Christian-Jaque, le mari de Suzy Solidor. On la voit aussi dans Atoll K (1950) dirigé par Leo Joannon et John Berry, film qui raconte l’histoire de 4 naufragés (parmi lesquels Stan Laurel et Oliver Hardy) qui ont échoué sur une île contenant du plutonium. En 1956, Suzy Delair ajoute son nom à l’immense casting de Si Paris nous était conté où les plus célèbres acteurs français de l’époque (Jean Marais, Danielle Darrieux, Michèle Morgan, Gérard Philipe, Louis De Funès pour ne citer qu’eux) se réunissent pour une grande fresque historique autour de la première ville de France, le tout sous la direction de Sacha Guitry. René Clément la fait jouer dans Gervaise l’année suivante. Dans cette adaptation de L'Assommoir d'Emile Zola, elle interprète une modeste blanchisseuse au pathétique destin. Sa bouleversante prestation marque la mémoire des spectateurs de l'époque. Une séquence du film est restée célèbre, celle où son personnage se prend une fessée par Maria Schell. En 1960, elle rejoint le tournage de Rocco et ses frères du réalisateur italien Luchino Visconti, où elle croise Alain Delon et Annie Girardot. Elle retrouve René Clément pour une reconstitution de la Libération de Paris en 1944, Paris brûle-t-il ?, mais n’y joue qu’un tout petit rôle.

    Eloignement des écrans dès les années 60

    A côté du cinéma, Suzy Delair participe régulièrement à des opérettes inspirées de Jacques Offenbach (La Vie Parisienne), ou d’Oscar et Johann Strauss (Les Trois valses). Elle poursuit également son activité de chanteuse et obtiendra le Grand Prix du disque. Après 1962, elle se fait très rare à l’écran, privilégiant le théâtre et montant régulièrement sur les planches. A noter toutefois son bref retour pour Les Aventures de Rabbi Jacob de Gérard Oury en 1973 (où elle interprète la femme du faux rabbi que Louis De Funès incarne avec brio), Oublie-moi, Mandoline de Michel Wyn en 1975 et A nous deux de Claude Lelouch en 1979, qui constituent ses trois derniers rôles au cinéma. Elle continuera néanmoins à apparaître de temps en temps à la télévision dans différents feuilletons. Suzy Delair a été décorée de l’Ordre national du Mérite, en février 2000, puis a obtenu le grade d’officier de l’Ordre national de la Légion d’honneur en juillet 2006.

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