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    Mort à 58 ans de Jean-Marc Vallée, réalisateur de Big Little Lies et Dallas Buyers Club
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Jean-Marc Vallée, réalisateur cité à l'Oscar pour "Dallas Buyers Club", co-créateur et réalisateur de la série "Big Little Lies", est décédé ce 25 décembre à l'âge de 58 ans. En collaboration avec Alexandre Jourdain.

    Backgrid USA / Bestimage

    Le réalisateur québécois Jean-Marc Vallée, révélé par le film C.R.A.Z.Y. en 2005, co-créateur et réalisateur de la série Big Little Lies et du poignant Dallas Buyers Club, qui avait offert l'Oscar du Meilleur acteur à Matthew McConaughey, est décédé le jour de Noël. Il avait 58 ans. Annoncé par des médias américains, son décès a été confirmé par son fils auprès de Radio-Canada. Les circonstances de sa mort ne sont pas connues.

    "Jean-Marc était synonyme de créativité, d'authenticité, il essayait de faire les choses différemment" a déclaré son partenaire producteur Nathan Ross, dans un communiqué cité par Variety. "C'était un véritable artiste et un gars généreux et aimant.

    Tous ceux qui ont travaillé avec lui ne pouvaient s'empêcher de voir le talent et la vision qu'il possédait. Il était un ami, un partenaire créatif et un frère aîné pour moi. Le maestro nous manquera beaucoup, mais il est réconfortant de savoir que son style magnifique et son travail percutant qu'il a partagé avec le monde vivront".

    La révélation C.R.A.Z.Y.

    Après des études de cinéma à l’université du Québec à Montréal, Jean-Marc Vallée projette de devenir cinéaste. C’est d’abord par la réalisation de ses trois courts métrages, Stereotypes, Les Fleurs magiques et Les Mots magiques qu’il commence à affirmer son talent. Avec Stereotypes (1992), véritable cortège de références cinématographiques, le jeune metteur en scène rend un remarquable hommage aux grands classiques du cinéma américain.

    Il adopte en revanche un ton beaucoup plus personnel et autobiographique pour Les Fleurs magiques (1995) et plus tard Les Mots magiques (1998), dans lesquels il explore les relations père-fils. Ce premier essai derrière la caméra lui vaut de nombreuses récompenses, parmi lesquelles trois prix au festival international du court métrage de Montréal et un autre au festival de Sundance.

    Le succès inattendu de son premier long métrage de fiction, Liste Noire (1995); amène ensuite le cinéaste à distribuer le film dans plusieurs pays. Cette première victoire l’entraîne aux Etats-Unis où il tourne deux films avec l’acteur Mario Van Peebles : Los Locos (1997) et Loser Love (1999).

    Après ces deux productions à petit budget, il s’embarque dans la mise en scène de la série télévisée The Secret Adventures of Jules Verne (2000). Au cours de ces années, il prépare une grande œuvre dont le récit chevauche les années 1960 à 1970, qui s’inspire de sa propre jeunesse et de celle de son co-scénariste François Boulay : C.R.A.Z.Y..

    20th Century Fox

    Voulant dans un premier temps réaliser le film aux Etats-Unis, Jean-Marc Vallée se laisse finalement convaincre par son ami Michel Côté, ancienne vedette de Black List, de tourner au Québec. Ce dernier obtient par la même occasion l’un des meilleurs rôles de sa carrière, interprétant le personnage du père.

    En 2005, après dix années d’effort, C.R.A.Z.Y. sort enfin et permet à Jean-Marc Vallée d’obtenir un succès tant public que critique. Il fait par ailleurs connaître l’acteur Marc-André Grondin qui, enfant, a joué dans Les Fleurs magiques. Fort de cette nouvelle notoriété, le metteur en scène se voit confier par Martin Scorsese la réalisation du film historique Victoria : les jeunes années d'une reine (2009).

    Sur un scénario de Julian Fellowes (Gosford Park), cette production met en vedette Jim Broadbent, Miranda Richardson, Rupert Friend et Emily Blunt. Avec le drame Café de Flore en 2012, il renoue avec un registre plus intimiste, en mettant en scène les destins croisés d'une jeune mère parisienne et d'un DJ, entre le Paris des années 60 et celui d'aujourd'hui. Forte et déterminée, Vanessa Paradis y campe le rôle d’une mère prête à tout sacrifier pour le bien être de son enfant trisomique.

    Un rôle en or pour Matthew McConaughey

    L’année suivante, il réalise Dallas Buyers Club, drame inspiré d’une histoire vraie, qui relate la tragique destinée de Ron Woodroof. Alors que les médecins lui donnent 30 jours à vivre, ce dernier, diagnostiqué séropositif à l’âge de 35 ans, décide de se battre contre l'industrie pharmaceutique qu’il juge trop passive. Le réalisateur québécois s’offre pour l’occasion un casting américain de premier choix : Matthew McConaughey, Jennifer Garner et Jared Leto.

    Cité à l'Oscar du meilleur montage, Jean-Marc Vallée permet surtout à McConaughey d'obtenir l'Oscar du Meilleur acteur pour son extraordinaire composition, très solidement épaulé par Jared Leto qui repart quant à lui auréolé de l'Oscar du Meilleur second rôle. Magnifique revanche pour le cinéaste, qui s'était vu refuser le financement du film 86 fois.

    Ciné-concert : LE PIRATE NOIR

    Le réalisateur ne tarissait d'ailleurs pas d'éloges concernant la composition de Matthew McConaughey, même s'il nous avait avoué, lorsque nous avions eu le grand plaisir de le rencontrer pour évoquer le film, avoir eu quelques réticences de prime abord, mais bien vite balayées, pour confier le rôle principal à l'acteur.

    "Sur le tournage, Matthew était toujours dans le mouvement. C’est d’ailleurs là, peut-être, la seule divergence que j’ai eu avec lui, sur la première semaine de tournage. Il était toujours dans le mouvement, alors que moi je lui demandais l’absence de mouvement. D’en faire très très peu, l’économie de gestes ; l’école du "Less is More".

    Alors que lui me servait du "More is More", en me disant "fais-moi confiance !" Jared faisait pareil aussi. Du coup j’avais l’impression de faire un truc caricatural au début. Mais j’ai fait le choix de leur faire confiance. Et en salle de montage, j’ai finalement davantage gardé les prises de "More is More" comme Matthew le suggérait, plutôt que ce que je pensais. Et le résultat est là".

    Metropolitan FilmExport

    En 2014, il met en scène une formidable Reese Whiterspoon dans Wild. La comédienne, qui avait déjà remporté un Oscar pour sa prestation de June Carter dans Walk the Line, y incarne une femme terrassée par la mort de sa mère ("son grand amour"), se décidant à parcourir la côte ouest des Etats-Unis. Une trame qui se rapproche sensiblement de celle d'Into the Wild, autre grand film sur la quête de vérité face à la Nature.

    Dirigeant un solide Jake Gyllenhaal dans Démolition, où l'acteur incarne un banquier d'affaire en pleine introspection et burn out, Jean-Marc Vallée est le co-créateur et réalisateur de l'excellente série Big Little Lies, diffusée sur HBO, dans laquelle il dirige un casting féminin quatre étoiles : Nicole Kidman, Reese Whiterspoon, Shailene Woodley et Laura Dern. Il obtiendra d'ailleurs un Emmy Award en 2017 pour son travail sur cette série.

    Jean-Marc Vallée travaille également sur une autre série pour HBO, Sharp Objects, et devait réaliser, toujours pour la chaîne, une série intitulée Gorilla And The Bird, basée sur les mémoires de Zack McDermott, devenu bipolaire suite à un choc émotionnel dévastateur cherchant à retrouver sa santé mentale grâce au soutien sans faille de sa mère.

    L'humain, ses blessures et ses fêlures, mais aussi ses moments de grâce, aura souvent été au coeur de la carrière du regretté Jean-Marc Vallée, qui vient subitement de nous quitter à l'âge de 58 ans.

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