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    Ces personnages animés que vous ne verrez plus comme avant...
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    L'affaire entourant la suppression de Pépé le putois, accusé de perpétuer la "culture du viol", dans le prochain film d'animation "Space Jam", nous rappelle que d'autres personnages animés ont également subi le même sort...

    Warner Bros.

    L'affaire entourant la suppression de Pépé le putois, accusé de perpétuer la "culture du viol", dans le prochain film d'animation Space Jam, est une nouvelle illustration des vives polémiques qui se sont emparé du débat public depuis plusieurs années maintenant, sur de multiples sujets brûlants : toxicité masculine, personnage véhiculant les stéréotypes raciaux, ou personnages jugés plus en adéquation avec les valeurs et interrogations de notre temps. Des polémiques d'autant plus vives qu'elles bénéficient désormais d'une énorme caisse de résonnance, avec l'appui des réseaux sociaux. Voici sept exemples.

    Pépé le putois

    Dan un billet publié le 3 mars dernier dans le New York Times, le journaliste Charles M. Blow expliquait que le personnage de Pépé le putois, issu des Looney Tunes, participait à la culture du viol. La célèbre mouffette, archétype du dragueur lourd au fort accent français, harcelant la chatte Pénélope, était un personnage créé par Chuck Jones en 1945. Selon le site Deadline, la décision de Warner de retirer ce fameux personnage du film d'animation à venir Space Jam - Nouvelle ère est en réalité antérieure de plusieurs mois à la publication de l'article dans le New York Times, dans la foulée de l'arrivée du réalisateur Malcolm D. Lee aux manettes du film. Si Pépé le putois n'a pas été officiellement interdit, il n'est pas prévu que le personnage apparaisse dans les Looney Tunes Cartoons de Warner Bros. ou dans les séries à venir Bugs Bunny Builders et Tweety Mysteries.

    Oncle Remus dans "Mélodie du Sud" (1946)

    Mélodie du Sud est sans doute le plus gros caillou dans la chaussure de Disney. Sorti en 1946, le 11e long-métrage d'animation des studios Disney, mélangeant animation et prises de vues réelles, est adapté des "Contes de l'Oncle Rémus" (Tales of Uncle Remus) de Joel Chandler Harris, parus entre 1880 et 1905. Le film avait d'ailleurs permis à l'acteur James Baskett, qui incarne l'oncle Rémus, de se voir remettre un Oscar honoraire, tandis que le film remportait l'Oscar de la Meilleure chanson. Se déroulant dans le vieux Sud américain avec d'anciens esclaves et leurs anciens maîtres dans une plantation de coton, Mélodie du Sud n'est ressortie qu'en 1986 sur les écrans américains, pour son 40e anniversaire, et n'a jamais connu les honneurs d'une parution en DVD et Blu-ray. En 2011, Bob Iger, l'ancien PDG de Disney, expliquait qu'il n'était pas vraiment dans l'intérêt du studio et des actionnaires de ressortir de son carton le long métrage. La toute puissante NAACP, la National Association for the Advancement of Colored People, organisation américaine de défense des droits civiques des populations afro-américaines fondée en 1909, regrettait quant à elle que le film "contribue à perpétuer une image dangeureusement glorifiée de l'esclavage". Il va sans dire que l'oeuvre ne figure pas sur la plateforme Disney , et qu'elle n'est pas prête d'y figurer...

    Le Pygmée demi-portion (1948)

    Toujours politiquement incorrect, Tex Avery a fait les frais de la censure. Produit par la Metro Goldwyn Meyer en 1948, le Cartoon Le Pygmée demi-portion, dernier dessin animé du tandem d'ours Georges et Junior, fut censuré à la TV aux Etats-Unis à partir de 1968. La raison est évidente, à voir le cliché : le cartoon véhiculait abondamment les stéréotypes racistes envers la communauté Noire, entre les lèvres charnues, l'os attaché au sommet du crâne, et la tenue vestimentaire du pygmée, soulignant son côté cannibale. Visible dans l'édition laserdisc de l'intégral des Tex Avery, Warner le censura dans le coffret DVD sorti en 2003 en France, seul pays au monde à ce moment là à regrouper la quasi intégralité des oeuvres d'Avery.

    La cabane de l'oncle Tom (1947)

    Sorti en 1947 sous les auspices de la MGM, le cartoon La cabane de l'oncle Tom est l'autre oeuvre censurée de Tex Avery, pour les mêmes motifs que le Pygmé demi-portion qui sortira un an plus tard : il véhiculait les stéréotypes raciaux. Si le dessin animé a reçu un accueil chaleureux à sa sortie, sa ressortie en 1954 a provoqué un vif ressentiment, comme l'expliquait la publication hebdomadaire Pittsburgh Courier, lue par la communauté afro-américaine : "il n'y a aucune raison pour que les Noirs continuent d'être ridiculisés et montrés comme ça dans les films". Le cartoon fut interdit d'antenne à la TV américaine dès 1968. Et, tout comme Pygmée demi-portion, il fut censuré par Warner en 2003 dans l'édition du coffret DVD censé regrouper l'intégral des Tex Avery. Depuis, il est invisible.

    Elmer Fudd et son fusil

    Prenez le temps de savourer cette image, montrant le stupide chasseur Elmer Fudd braquer son fusil sur Bugs Bunny dans le cartoon The Wild Hare (1940), où notre lapin préféré prend un malin plaisir à tourmenter Elmer en lui lâchant pour la première fois son célébrissime "What's up doc ?"  Car vous n'êtes pas prêt de la revoir. Désormais, Elmer chassera son lapin sans son célèbre fusil. "Nous n'utilisons plus d'armes à feu", expliquait le producteur exécutif et showrunner de la série Peter Browngardt au New York Times. "Mais nous continuons à faire de la violence de cartoon, avec de la dynamite et les gadgets d'Acme". Pour le producteur, la décision de faire disparaître les fusils et pistolets sert à adapter le dessin animé aux "sensibilités modernes", à l'heure où les manifestations contre les violences policières se sont multipliées aux Etats-Unis.

    Sam le pirate et ses revolvers

    Créé par l'animateur Friz Freleng en 1945, Sam le pirate (Yosemite Sam en V.O) et ses impressionnantes moustaches, mi chercheur d'or, mi hors-la-loi, mi pistolero énervé, est l'un des plus fameux adversaires de Bugs Bunny. Dans la veine de la décision prise à l'égard de l'autre personnage Elmer Fudd, Sam le pirate ne portera désormais plus ses révolvers dans les nouvelles aventures des Looney Tunes. Mais il lui arrive de poursuivre désormais son meilleur ennemi... avec une faux. Comprenne qui pourra. Une page se tourne là aussi.

    Apu dans Les Simpson

    Apu Nahasapeemapetilon est un personnage culte de la série des Simpson. Marié avec Manjula, c’est le père d’une famille d'octuplés et le gérant de l’épicerie Kwik-E-Mart de Springfield. La polémique autour de ce personnage est née en 2017 avec un documentaire, The Problem With Apu. Réalisé par le comédien américain d’origine indienne Hari Kondabolu, il pointait le fait que le personnage d’Apu rassemblait tous les préjugés et clichés dont souffrent les indo-américains aux États-Unis, et donc stigmatisant. Des rumeurs ont commencé à courir -et pendant un bon moment- sur une possible suppression du personnage. Il n'en a rien été. Mais en janvier 2020, l'acteur Hank Azaria, identifié comme un acteur "blanc", et qui prêtait sa voix au personnage depuis ses débuts en 1990, a annoncé y renoncer. Il y a quelques temps, le créateur de la série, Matt Groening, a confirmé au journal USA Today que le personnage ne disparaîtra pas. Mais aura donc une autre voix...

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