Il y a quelque chose qui les séparent de quelques années-lumière, mais Johnny Halliday et Elvis Presley ont bien un point commun : les rockers étaient, aussi, des acteurs, avec chacun une trentaine d'anecdotes au compteur. Le King a une longueur de retard tout de même, puisque l'ensemble de sa carrière cinématographique tiendrait du navet cafardeux. Jailhouse rock, lui, est considéré, hormis les quelques documentaires qui lui sont dédié, comme l'un des meilleurs films le mettant en scène, avec notamment Bagarres au King crole.
Incarcéré après avoir commis un homicide involontaire suite à la courageuse défense d'une femme opprimée, Vince Everett apprend d'un compagnon de cellule, vieux chanteur de country, la façon dont on se sert d'une guitare. Sorti d'une prison qui lui aura salué son talent naissant en permettant un passage à la télévision avec des camarades, il tente de s'imposer avec l'aide de Peggy, une femme croisée dans un bar et persuadée que l'avenir lui appartient.
Bien sûr, on en fait beaucoup pour avoir des cigarettes, mais le film n'est pas tant une peinture clinquante et idéaliste de son époque. Au contraire, Everett/Elvis doit faire face au cynisme de l'industrie du disque et de l'intelligencia : on détourne ses arrangements, on ne lui fait pas confiance car il est inconnu... Le personnage lui-même est loin d'être lissé : veule, arrogant, en dépit de son charisme évident, Vince Everett n'est pas une figurine docile et romantique. Il s'épanouira bientôt à New York et même à Hollywood, oubliant ceux qui l'ont aidé, ainsi que ses amis dans la foulée.
On aurait du mal à qualifier le film de ''profond'', d'ailleurs son propos est naif [et bêtement anti-bourgeois : celui qu'on qualifie de ''provincial'', il comprend pas leur charabia], mais le portrait de cette ascension a le mérite de se pourvoir des gentilles audaces évoquées. Naturellement, l'ensemble débouche sur une conclusion des plus consensuelles et cet Everett jouit d'une chance insolente. On retient surtout de Jailhouse rock ce qu'il contient d'essentiel de la mythologie du personnage : six de ses titres, dont notamment la chanson-titre, les célèbres ''Baby I don't care'' et ''Young and beautiful''. En outre, le film peut se targuer de traverser les années sans trop de peine, grâce à une mise en scène et des acteurs impeccables [le King ne démérite pas]. Les fans vénèrent tout particulièrement ce Rock du Bagne ; pour les autres, c'est de la belle ouvrage, ce qui est déjà beaucoup.