"La mariée était en noir" est peut être le film le plus hitchcockien de François Truffaut, le rapprochement étant presque explicité par la présence de Bernard Hermann qui compose ici une bande-son très similaire à ce qu'il faisait pour le Maitre du Suspens. Avec cette "mariée", le cinéaste français propose une version originale du film de vengeance, qui plus est une vengeance féminine. Truffaut conduit plutôt bien son film, créant le suspens autours de ce personnage très énigmatique de Julie Kholer. On ne comprend pas très bien qui elle est, ni la raison de ses actes, et cette atmosphère de mystère fonctionne vraiment. Le réalisateur parvient à faire planer le soupçon sur des scènes à priori banales. Mais c'est surtout le personnage principal qui est envoutant, une femme dont on ne sait pas vraiment si elle est coupable ou innocente, comme la plupart des héros hitchcockiens. Jeanne Moreau incarne très bien cette dame énigmatique, froide, tout en intériorité. Un peu comme si Truffaut avait voulu lui donner un rôle aux antipodes de son inoubliable personnage de Catherine dans "Jules et Jim". Voilà donc un contrepoint très intéressant qui surprend le spectateur dans ses attentes. Le casting masculin est très bon aussi, avec une galerie d'hommes marquants, joués par Claude Rich, Michel Bouquet, Michel Londsale, ou encore Charles Denner. Des personnages masculins qui sont comme des variations sur le thème du Don Juan, séducteurs machos qui seront pris à leur propre jeu. Le film présente alors des scènes qui mélangent pulsion de mort et pulsion de sexe, et permettant à Truffaut d'appliquer une autre leçon du Maitre Hitch : filmer les scènes de meurtre comme des scènes d'amour. La mise en scène est très travaillé, jouant bien sur le hors-champ par rapport à la violence. Je l'ai cependant trouvée inégale dans sa recherche d'une ambiance particulière, alternant le très bon (le peintre et Diane) et le presque ridicule (le jeu de cache-cache). Je trouve également dommage que le flash back vienne expliquer un petit peu trop facilement les enjeux du film, en tuant un petit peu trop le mystère. Du coup, nous perdons un peu le suspens, même s'il nous reste les personnages et le talent visuel de Truffaut pour nous faire regarder le film jusqu'au bout! "La mariée était en noir" est donc pour moi un bon Truffaut malgré son côté inégal. Il conserve une ambiance assez forte, qui inspirera notamment Tarantino quelques années plus tard avec ses deux Kill Bill...