Récompensé au festival de Sundance, la bande-annonce se voulait alléchante. Prometteuse d'un souffle léger et poétique : Une chose est sûre, les promesses ont été tenues. Like Crazy c'est l'histoire d'un couple, thème qui ne plaira donc pas à tout le monde. Pourtant, il ne s'agit pas d'être fleur bleue pour apprécier le film, seulement de s'intéresser au sentiment amoureux, aux diverses manières de le décrire et aux contours raffinés qu'il engendre. Car si il y a bien un sentiment qui transcende la poésie, c'est bien l'Amour.
Drake Doremus dévoile donc un film empreint de légèreté, aux teintes orangées, aux musiques planantes et aux dialogues soignés. Il travaille la mise en scène, les mouvements de caméra, le montage et l'espace audiovisuel pour toujours dégager chez le spectateur cette impression de se mêler aux bienfaits et méfaits de l'amour. Comme si il serait maître d'une versification pleine de sens et de sentiments. Nous nous retrouvons donc devant une réalisation très épurée, au style artistique unique, qui nous fait respirer aux côtés des personnages en partageant tout avec eux.
Ces personnages sont interprétés de manière exemplaire, ce qui renforce l'immersion. Que ce soit les deux principaux où les quelques rôles secondaires (les parents, Sam et Simon, bien que ce dernier soit légèrement en-dessous). Ils arrivent à transmettre énormément d'émotion, que ce soit dans leurs gestes, regards, ou timbres de voix. Sans même devoir prendre la parole ils parviennent à faire comprendre tout un tas de données aux spectateurs. Ces mêmes données sont d'ailleurs mise en valeur par la gestion séquentielles du réalisateur, qui parvient à desservir une histoire riche, profonde et longue en 1h29 seulement, ce qui est à mon sens une prouesse.
Pour ce qui est de la narration, elle réserve beaucoup de haut et de bas aux personnages. On entre dans le domaine amoureux, caractérisé par une bulle où l'on ne sait pas toujours comment réagir. Tout est abordé, que ce soit ces petites séquences, sortes de clip-vidéo amoureux, où l'on apprécie la fraîcheur d'une rencontre, la bêtise des premiers jours, l'ignorance du futur et la jovialité du moment présent. Ou encore l'absence, l'hésitation, le manque, le non-dit, l'illusion, on varie toujours d'une tendance à une autre. Et au fur et à mesure que les minutes défilent les réactions deviennent sans cesse plus imprévisibles, symbole du fait que l'on ne sait jamais de quoi le lendemain est fait. Le réalisateur s'attache vraiment à se détacher de tout cliché, à ne pas encadrer une relation dans un bonheur parfait et une autre dans un malheur continu. Il tend d'avantage à représenter la relation, et les complications qu'elle peut apporter sur la durée, en fonction de toutes les variables qui viennent s'y ajouter.
Et s'il reste assez gentillet dans sa manière de traiter le thème (beaucoup moins noir qu'un Blue Valentine ou Un été brûlant), il garde à l'idée ce désir de faire comprendre le flou, l'indécis, l'inconnue, et tous ces sentiments étroitement liés et qui font partie intégrante de toute relation. Et puis nous ne sommes pas non plus obliger de traiter d'un thème négativement pour bien le traiter. Au contraire, réussir à traiter le thème avec justesse tout en essayant d'être le plus souple possible montre la qualité du scénario, qui n'enterre rien : Il laisse respirer la vie, l'amour.
Tout n'est pas simple et la fin coïncide avec cette impression d'incertitude, mais ce Tout là mérite d'être vécu. C'est en tout cas ce en quoi croit le réalisateur, et ce en quoi croient les acteurs. Le fait de montrer comme certaines personnes peuvent être unies, par des liens si forts, quoiqu'il se passe, met en lumière l'envie de saluer cette histoire, qui peut représenter toutes ces histoires que chacun vit un peu partout.
L'amour est instable, c'est l'image qui en transparaît dans ce film, et cette instabilité pousse les individus à être un peu "fous" quand il s'agit de prendre des décisions. Mais cette folie a une raison.
En tant qu'œuvre filmique l'ensemble est très réussi, beau et profondément artistique. En tant que récit, il se greffe parfaitement à une esthétique pure, parois troublée (ces quelques plans caméra à l'épaule sont merveilleux ; tout comme ceux qui évoquent le temps qui passe) mais si agréable à découvrir.
Les personnages portent sur eux un film compliqué à jouer et ils s'en sortent pourtant à merveille. Les défauts sont exclus de la réalisation, qui se révèle à la fois très coquette et très mature, au cœur de laquelle repose des dialogues intenses – ce que je n'ai pas assez souligné–. Un vrai plaisir cinématographique et une vraie immersion dans cette relation touchante.