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Lartimour
10 abonnés
83 critiques
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4,5
Publiée le 7 novembre 2016
Voilà un film fort et dérangeant, d'un réalisateur russe qui a adapté sa propre pièce de théâtre, qui elle-même est l'adaptation d'une pièce allemande. Le film raconte comment un jeune lycéen, peut arriver à détourner la religion pour manipuler un être plus faible. Mais le film montre aussi l'imbrication de la religion dans les organismes d'un état qui utilise la religion pour mieux contrôler la jeunesse dans le système éducatif de la Russie actuelle. On voit bien dans le film, un contraste entre les jeunes, nés après la chute de l'empire soviétique, très influencés par la modernité, et les professeurs les plus âgés dont on sent qu'ils ont encore un schéma de pensée formaté sous le régime communiste. Entre les deux, une professeure, qui devait être enfant à l'époque communiste et qui est maintenant ouverte à la réalité du monde actuel, tente seule, de lutter contre les ravages des discours de l'élève "malade" qui manipule sa mère, ses professeurs et surtout le maillon faible des autres élèves. La thématique du détournement de la religion, appliqué ici à la chrétienté orthodoxe, est une thématique universelle, que l'on retrouve dans les trois grandes religions monothéistes, et qui prend tout son sens avec l'actualité des attentas islamistes. Un seul manque dans ce film, on aurait aimé voir comment l'élève en est arrivé à ce stade de "folie", mais ce n'est pas le sujet du film. A voir absolument.
Glaçant... La pièce de théâtre d'origine est allemande, le film est russe, la situation qui y décrite pourrait être bientôt celle de la France. Veniamin est un lycéen fanatique: ses propos sont presque uniquement constitués de citations de la Bible, dont le réalisateur Kirill Serebrennikov prend bien soin de donner les références exactes en surimpression sur l'image. Dans la version authentiquement originale, le texte apparaît en cyrillique. Appliquant à la lettre les préceptes du texte sacré qu'il connaît par cœur, le jeune homme à la beauté froide refuse de se dévêtir à la piscine, conteste l'enseignement de la théorie de l'évolution, rejette la jeune fille intéressée par lui. Il reproche son divorce à sa mère totalement dépassée par le rejeton à qui on a envie de donner des claques et trouve le pope attaché à l'établissement un peu trop mou. Un intégriste, quoi. Un intégriste qui plonge tout habillé dans la piscine pour se faufiler entre les cuisses de ses camarades de classe féminines, quand il ne passe pas ses mains sur celles de son copain sous prétexte d'allonger une de ses jambes plus courte que l'autre. Il rend fous ses professeurs, l'administration du lycée, et peu à peu parvient, par ruse et manipulation, à retourner la situation à son profit: parents, religieux, personnel de direction, professeurs vont tous s'unir derrière lui contre la seule qui résistait encore à ce dangereux jeune homme, la prof de biologie. Le film se termine sur un projet de meurtre mais c'en est un autre qui sera commis par ce fou de Dieu. Les cours ont lieu sous la photographie de Poutine, une officine de police privée assure la surveillance de l'établissement, la prof de bio, accusée d'attouchements sur la personne de Veniamin, est virée par sa directrice sans autre forme de procès (le lycée semble jouir de l'autonomie de recrutement de ses enseignants), la mère de l'hystérique doit assurer trois emplois différents pour subvenir à ses besoins, le pope a son mot à dire aux conseils d'administration et de discipline: toute ressemblance avec une situation réelle ou à venir serait fortuite.
Kirill Serebrennikov arrive avec une justesse incroyable à mettre en image la radicalisation d'un jeune homme et les retombées que celle-ci provoque au sein de son école. "Le disciple" arrive à créer deux écoles, l'une, soutenu par l'ensemble de la direction, lui donne raison et, l'autre, seule face à tous, essaye tant bien que de mettre en lumière son radicalisme allant jusqu'à elle-même lire la Bible. Un sujet extrêmement bien traité mettant en avant le danger de l'interprétation d'un texte qu'il soit religieux ou non.
Attention aux crises d’adolescence. Celle que nous décrit Kirill Serebrennikov n’est pas des plus banales. Armé d’une vieille bible dont il n’extraie que les anathèmes un adolescent à la sexualité mal assurée étonne puis terrorise son lycée. Il subjugue, fascine, endoctrine. Face à lui des adultes prêts à tout excuser (la mère), à tout expliquer (les responsables du collège), à tout croire (le disciple), à tout exploiter (le pope). Jusqu’au drame. Seule la psychologue, pour essayer de comprendre et de combattre, entrera dans le jeu et n’en sortira pas indemne. Au-delà d’une critique de la Russie actuelle (poids d’une religion passablement arriérée, corps professoral peu efficace, âpreté de la vie quotidienne dans un lieu indéterminé mais abandonné) ce film est traversé d’un souffle qui n’est pas sans rappeler Dostoïevski. On y parle de souffrance, de foi, de croyance, de (fausse) rédemption, de folie. Et ça marche !
Film coup de poing, d'actualité et superbement interprété. Une critique acerbe de la société russe actuelle qui est incapable d'affronter un gamin tombé dans la dérive fanatique.