Drôle d'images où Daroussin, Ascaride, et Meylan se retrouvent dans une voiture près de la mer ; ils ont 20 ans et cette jolie incise dans leur jeunesse est un hommage non dissimulé à l'amitié professionnelle et humaine qui lie les acteurs et le réalisateur. Car "La Villa" est un film souvenir. Souvenir au sens narratif du texte où les frères et sœurs et amis se retrouvent dans cette magnifique calanque de Méjean. Souvenir au sens où le réalisateur réunit une nouvelle fois ses comédiens fétiches et fête avec douceur et poésie ce qu'Anaïs Demoustier nomme le centre du monde, c'est à dire la côte méditerranéenne. Car la mer rutilante, même en hiver, est tout, dirait Marguerite Duras. Pour une fois, Guédiguian ne privilégie pas l'entrée politique dans son film. Il parle d'immigration clandestine certes, mais il raconte surtout une histoire de vies, pour l'une au théâtre, l'autre dans son bateau de pêcheur, d'autres encore dans leur petit restaurant. Il y a ce père, au milieu, arrêté par un coup de cœur, et qui annonce la mort. "La Villa" est un film rempli des propres films de Guédiguian, dont explicitement "Ki Lo Sa ?". On ne peut pas s'empêcher de penser au "Milou en mai" de Louis Malle ou plus récemment "L'heure d'été" d' Olivier Assayas. On s'ennuie un peu, mais c'est un ennui délicat, léger, et tout à la fois profond, mettant en scène des personnages emportés dans une remise en cause existentielle. Il y aussi le conflit des générations, et en fond de toile, un univers marchand, bling bling qui fait oublier la douceur de vivre chère à nos contrées françaises. Les vieux se retirent sur la pointe des pieds, voire se suicident à la façon héroïque de Zweig et sa compagne, et il y a les jeunes, ambitieux, intéressés par l'argent, qui conquièrent le monde. En tout état de cause, Guédiguian a réussi à faire un film dont on pourrait imaginer qu'il soit le dernier, fermant magnifiquement la boucle à sa première œuvre "Le dernier été".