Du Pagnol d’Epinal
Après La Gloire de mon père et Le Château de ma mère, voici l’adaptation du Temps des secrets, le troisième tome des Souvenirs d'enfance de Marcel Pagnol. Après Yves Robert dans les années 90, c’est Christophe Barratier qui s’y colle pour adapter le 3ème volume de la tétralogie des Souvenirs d’enfance, jamais porté à l’écran. Marseille, juillet 1905. Le jeune Marcel Pagnol vient d'achever ses études primaires. Dans trois mois, il entrera au « lycée ». Trois mois... une éternité quand on a cet âge. Car voici le temps des vacances, les vraies, les grandes ! Enfant de la ville, ce retour tant attendu à ses chères collines d'Aubagne et d’Allauch, celles de « La Gloire de mon père » et « Le Château de ma mère » le transporte de bonheur. Il y retrouve la nature, les grands espaces et surtout son ami Lili toujours prêt à partager de nouvelles aventures, à l’âge où le temps de l’insouciance laisse place à celui des secrets. 108 minutes qui prouvent que ce film sans flamme particulière est surtout très – trop – révérencieux de l’œuvre de l’écrivain. Il ne manque pas un bouton de guêtre à ce film aussi corseté que ses actrices. C’est joli, mais tellement sans surprise que c’en est ennuyeux.
Le Schpountz, La Fille du puisatier, La Femme du boulanger et la trilogie des Marius… Pagnol est une inépuisable source d’inspiration pour le cinéma. Encore faut-il en avoir… de l’inspiration. Et ici, tout est trop millimétré, calculé, prévisible, que ça finit par en sonner faux. En particulier les accents fabriqués par les acteurs et les actrices. C’est sûr qu’on ne peut s’imaginer ces romans portés à l’écran sans l’accent du midi. Mais le casting est tellement connu, que ça ne fonctionne pas. Les enfants s’en tireraient mieux s’ils ne jouaient aussi mal. C’est du Pagnol studieux, de l’image – très belle au demeurant -, d’Epinal à la sauce au pistou. Il reste que Barratier aime et sait filmer des enfants, qu’il a un vrai savoir-faire et qu’il est très respectueux du texte et de la tradition au point de tourner dans la même maison qu’Yves Robert il y a 30 ans de cela. La musique de Philippe Rombi submerge l’ensemble et je voudrais encore une fois, exprimer mon agacement sur cette manie des plans de coupe animaliers, inutiles et gratuits… alors en avant les écureuils, les lièvres, les grenouilles, les rapaces… Ça rajoute à l’aspect artificiel de ce film familial qui devrait séduire les enfants et faire baîller les parents.
Le petit Léo Campion est bien mignon et plein de bonne volonté, mais ça ne suffit pas vraiment pour convaincre. Il est pourtant bien entouré par Guillaume De Tonquédec , Mélanie Doutey, François-Xavier Demaison, Anne Charrier, Michel Vuillermoz, Olivia Côte, même s’ils sont tous bien empêtrés dans leur accent factice. Reste les autres enfants, Lucie Loste-Berset, Baptiste Négrel, Tristan Margheriti, qui récitent leur texte avec beaucoup d’application… et c’est à peu près tout. Il manque l’émotion. Pagnol n’est pas trahi, bien au contraire, la trop grande fidélité nuit à la réussite du projet. Nostalgie quand tu nous tiens !